Plantes et Santé Le magazine de la santé par les plantes

Santé mentale : le naturel, ça marche ! (4/5)

Dépression, désordres alimentaires, hyperactivité… Ébranlées par les crises, nos sociétés connaissent une hausse des troubles de santé mentale. Face à ce défi, les plantes se montrent à la hauteur. De plus en plus d'études le prouvent, et les thérapeutes recourent de plus en plus à leurs pouvoirs dans leur pratique clinique. Ils nous confient leurs solutions pour prendre en charge ces maladies.

Anorexie, boulimie, combattre l'addiction grâce aux plantes
Anorexie, boulimie, combattre l'addiction grâce aux plantes

Anorexie, boulimie, combattre l'addiction

Contrairement à une idée répandue, les anorexiques, les boulimiques et les personnes atteintes d'hyperphagie n'ont pas de « problème avec la nourriture ». Dans le terme « trouble des conduites ou comportements alimentaires » (TCA), c'est avant tout « comportement » qu'il faut entendre. Ces troubles, d'origine complexe et multifactorielle, débutent souvent par un régime, entamé à l'adolescence ou jeune adulte sous l'influence des diktats de l'apparence, à la suite d'un stress intense et sur un terrain psychique fragilisé (anxiété, symptômes dépressifs, personnalité borderline, traumatismes liés à de la maltraitance ou à des abus…).

Anorexie, boulimie : parer aux dégâts sur la dentition

Dentifrice à l'aloe vera anorexie

Il n'est pas rare que les dentistes repèrent un trouble du comportement alimentaire (TCA). « Les anorexiques se déminéralisent par l'intérieur : j'observe une gencive fine sur la radio. Les boulimiques, par l'extérieur : l'émail est détruit, laissant apparaître les couches jaunâtres de la dentine », note Florine Boukhobza, docteure en chirurgie dentaire, phytothérapeute et homéopathe. L'acidité provoquée par les vomissementsa peut entraîner une forte érosion allant jusqu'à la perte des dents. Ses conseils pour limiter les dégâts :

  • Un bain de bouche au bicarbonate de soude durant 21 jours pour basifier le terrain.
  • Un dentifrice au gel d'aloe vera, plante réparatrice, cicatrisante et anti-inflammatoire.
  • Une tisane à la gentiane durant 21 jours : en plus de contenir des flavonoïdes diminuant l'acidité, elle est tonique, anxiolytique et stimule la sécrétion de bile, ce qui contribue à soulager les troubles digestifs.

Hyperphagie, anorexie ou boulimie ?

L'anorexie se caractérise par une restriction alimentaire sévère qui entraîne une maigreur mortifère, accompagnée d'une perception altérée de sa silhouette et de son poids (l'anorexique se juge toujours trop gros). L'hyperphagie, comme la boulimie, consistent, elles, à engloutir de façon récurrente des quantités hors norme d'aliments en un temps limité (jusqu'à 10 000 calories absorbées en moins de deux heures). Le boulimique va chercher à éliminer ce surplus calorique par des vomissements volontaires, des médicaments (laxatifs, diurétiques, etc.), le jeûne ou le sport à outrance.

L'hyperphagique, lui, est plutôt en surpoids, voire obèse. Pour ces deux profils, le diagnostic est posé quand de telles crises surviennent plus d'une fois par semaine sur des périodes d'au moins trois mois (chez certains, cela va jusqu'à quatorze fois par semaine).

 

Coupe-faim : bonne ou mauvaise idée ?

« Fausse bonne idée », répond le psychonutritionniste Dimitri Jacques, pour qui les coupe-faim sont des « cache-misère psychologiques et métaboliques » en cas d'accès hyperphagique. De même, certaines personnes prennent du gymnema pendant les repas car cette plante peut aider à se détourner du sucre, or « cela peut masquer un syndrome prédiabétique », prévient l'expert. Ainsi, selon lui, recourir à des compléments alimentaires à base de...

konjac ou d'agar-agar par exemple, qui ont la propriété de gonfler dans l'estomac et trompent en quelque sorte la sensation de faim, maintient la personne dans la pathologie car « le vrai problème est ailleurs. »

Un cercle vicieux entre addiction et détresse

Altérant le circuit de la récompense, les accès d'hyperphagie mettent en jeu les mêmes zones cérébrales qu'une addiction. Les personnes se disent sous emprise, y succombent seules en cachette (en les planifiant parfois), et certains s'avouent même fiers de dissimuler leurs stratagèmes à leur entourage. Loin de combler leur vide intérieur, la crise une fois terminée laisse généralement place à la culpabilité, au dégoût et à la détresse. Quant aux restrictions alimentaires des anorexiques, elles agissent aussi comme une drogue : elles déséquilibrent la sécrétion de ghréline et de leptine, explique Isabelle Le Brun, naturopathe et professeure de yoga ayant vécu une période d'anorexie et de boulimie de dix ans : « Ces hormones qui régulent la faim et la satiété ne sont plus opérantes, l'insuline non plus. Un système de substitution se met alors en place et l'organisme sécrète des opioïdes proches de la morphine, ce qui génère une dépendance au jeûne qui renforce la maladie. »

Déni, honte, refus de soins… Près d'un million de personnes en France souffrent de TCA, en majorité des femmes, et au moins la moitié ne sont pas dépistées, estime la Fédération française anorexie boulimie (FFBA). « Savoir que l'on s'expose à de grosses carences favorise toutefois l'acceptation d'une prise en charge », témoigne Isabelle Le Brun. Chez ces patientes pour qui l'apparence est cruciale, des tisanes reminéralisantes à base d'ortie ou de prêle peuvent être proposées afin de limiter la perte de cheveux ou l'altération des dents, de la peau ou des ongles consécutive à l'acidification de l'organisme. Toutefois, les experts s'accordent à dire que la psychothérapie doit rester le pivot d'une approche multidisciplinaire.

Conseil de pro

"Ma fille pratique une heure de sport chaque jour et s'affame depuis qu'elle suit des mannequins très minces sur les réseaux sociaux. Comment l'aider ?"

Adolescente réseaux sociaux

Isabelle Le Brun conseille l'élixir d'alchémille commune (Alchemilla vulgaris). Particulièrement indiqué quand les troubles alimentaires viennent combler un vide, il aide à renouer avec la dimension maternelle et nourricière de la féminité. La naturopathe tient néanmoins à rappeler que « suivre une psychothérapie avec régularité, une fois par semaine, reste indispensable pour s'en sortir vraiment ».

Quant à vous, évitez de lui parler de « bouffe ». Faites-lui comprendre que vous la soutenez sans la juger. « Valorisez ce qu'elle est pour l'inciter à éviter la comparaison. Encouragez-la dans ce qu'elle fait par ailleurs avec pour objectif de rehausser sa confiance et son estime d'elle-même », ajoute-t-elle.

Réguler les émotions grâce aux élixirs floraux

Stéphanie Vollette, psychologue et florithérapeute, préconise l'élixir d'amarante pour aider ces personnes isolées dans leur détresse à franchir la porte d'un thérapeute. En première intention, elle associe Crab Apple pour être moins exigeant avec son physique, Pine contre la dévalorisation de soi, Cherry Plum (fleur du contrôle de soi) pour les boulimiques ou Rock Water contre le perfectionnisme des anorexiques.

« Mieux vaut réguler le trop-plein émotionnel avant de travailler en profondeur avec des élixirs puissants susceptibles de mettre en lumière ce qui était inconscient, tels Rudbeckia ou Abricotier quand les excès de nourriture cherchent à combler la perte du lien mère-enfant. »

Safran, curcuma et chardon-marie pour accompagner les TCA

En phytothérapie aussi, l'accompagnement par un professionnel est nécessaire. « Compulsion pour le sucré ou globale, problèmes de neurotransmetteurs, associés à une dépression ou autre… C'est du sur-mesure », rappelle Dimitri Jacques, psychonutritionniste, coauteur avec Maud Gabriel de Parle à mon ventre, ma tête est malade (éd. Grancher). En plus de traitements ciblant les impacts physiologiques de la malnutrition (anémie, aménorrhée, symptômes gastro­-intestinaux ou cardiaques et plus globalement réduction significative du métabolisme de base), on peut agir sur le plan neurologique. « Le safran joue sur les deux tableaux. J'utilise aussi le chardon-marie car il soutient l'activité hépatique. Et le curcuma, un correcteur du terrain », indique cet expert pour qui c'est avant tout l'axe cerveau-intestin qu'il convient de réguler. Ajoutons des plantes adaptogènes tel l'ashwagandha, qui agit sur les tremblements et gestes compulsifs (symptôme courant des TCA) en régulant les sécrétions de GABA, neurotransmetteur apaisant l'anxiété.

Restaurer le microbiote intestinal semble également crucial. Une étude récemment publiée met en évidence que l'altération de celui-ci chez les anorexiques contribue à accentuer leur pathologie. Croire en l'efficacité des thérapies et en la guérison est tout aussi important. Malgré les rechutes, chaque petite victoire rapproche du but ! A. R.

Se masser pour renouer avec son corps

Dans le creux de la main ou une cuillerée à soupe d'huile végétale d'amande douce, verser 1 goutte de chacune de ces huiles essentielles, ou 3 d'une seule :

  • Petit grain bigaradier (réconfortante)
  • Ylang-ylang (sensorielle et apaisante)
  • Lavande (relaxante).

« Massez-vous les mains, les pieds – voire toutes les zones – pour ressentir à nouveau ce corps qui n'est plus là », conseille Isabelle Le Brun.

« Anorexie mentaleUn trouble essentiellement féminin, à la frontière de médecine somatique et de la psychiatrie », INSERM, octobre 2020.

« L’anorexie mentale, une addiction ? », Julia Clarke, 2017.

« The gut microbiota contributes to the pathogenesis of anorexia nervosa in humans and mice », Nature Microbiolgy, avril 2023.

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