Elisabeth Sigmund, de l’anthroposophie à l’esthétique
Née au début du XXe siècle, Elisabeth Sigmund a étudié la médecine, les plantes et les cosmétiques. Cette exploratrice avant-gardiste et passionnée, pionnière de la cosmétique naturelle, est à l’origine des cosmétiques Dr Hauschka.
Elisabeth Sigmund, née Resch, est née en 1914 au coeur de la bourgeoisie viennoise. Très tôt, la petite Elisabeth se passionne pour les arts, la littérature, le théâtre, mais aussi les beaux paysages. Elle s’intéresse aussi à la beauté humaine et à la manière de la préserver et de la magnifier.
Fascinée par les multiples potions trouvées sur la coiffeuse de sa mère, elle attend chaque jour avec impatience la permission de cette dernière pour tester les Perles de Dostal à faire mousser pour nettoyer son visage, la pâte à l’amande ou la lotion à l’hamamélis. Aussi coquette que rebelle, elle osera même s’enduire les lèvres d’un rouge vif le jour de ses fiançailles à une époque où il était mal vu de se maquiller pour les femmes de la bonne société.
La découverte de l’anthroposophie
C’est sa grand-mère Anastasia qui lui transmet sa passion pour les plantes médicinales. En sa compagnie, elle découvre le monde végétal, lors des balades dans son jardin viennois rempli de fleurs et de plantes. Elle y apprend par exemple les vertus équilibrantes de l’anthyllide vulnéraire, jolie fleur jaune qu’elle utilise très tôt pour fabriquer ses propres cosmétiques pour le visage. C’est aussi Anastasia qui lui transmet la recette secrète de la « crème céleste », à base d’huile d’amande douce et d’eau de rose, dont on dit qu’elle était le secret de beauté de l’impératrice Elisabeth d’Autriche, dite « Sissi ».
En 1929, la jeune Elisabeth, dont le tempérament rebelle fait le désespoir de sa mère, fait une rencontre qui bouleverse sa vie : celle d’un certain Hans Erhard Lauer, ami de son père qui présidait à cette époque la Société anthroposophique de Vienne. Il lui conseille la lecture des livres de Rudolf Steiner, parmi lesquels La Mission cosmique de l’art, ouvrage dans lequel il écrit que « le beau est ce qui révèle son intérieur dans sa forme extérieure ». C’est cette lecture qui la persuade de mettre un terme à ses études de médecine pour devenir esthéticienne. Pour elle, la cosmétique était une façon de réunir ses deux passions : les plantes médicinales et l’esthétique.
Elle n’est guère convaincue par les...
soins qui sont employés à l’époque, notamment les massages peu délicats du visage, et l’utilisation de la vaseline, gras minéral présentant le défaut d’obstruer les pores de la peau. C’est ce qui l’encourage à créer sa propre gamme de cosmétique, uniquement à base de plantes médicinales et de produits naturels. Elle écume les bibliothèques monastiques pour y consulter d’anciens recueils médicaux, puis élabore son premier soin : une lotion pour le visage à base de décoction de pâquerettes et d’alcool pour lutter contre les impuretés. « Tous mes essais cosmétiques étaient motivés par un intérêt médicinal : savoir quelles plantes pourraient apporter leurs bienfaits à la peau », raconte-t-elle.
Elle n’hésitait pas à jouer elle-même les cobayes. Ainsi, en appliquant de l’huile sur une seule partie de son visage pendant la nuit, elle se rend compte que la partie non enduite est plus belle. Comprenant que la peau a besoin de respirer pour se régénérer plus facilement, elle met au point des soins de nuit non gras. Pendant la guerre, elle achète ses plantes médicinales sous le manteau à un droguiste, puis fait tester ses préparations aux femmes d’officiers partis à la guerre.
Une méthode holistique
Après la Seconde Guerre mondiale, le couple Sigmund part vivre en Suède, où Elisabeth ouvre son premier salon de beauté. Elle fabrique elle-même ses produits en très petites quantités, car ils ne contiennent pas de conservateurs. Imprégnée de la pensée de Rudolf Steiner, inspirateur de l’agriculture biodynamique, elle veille à la qualité de ses matières premières : tous les ingrédients de ses préparations sont naturels, et chaque composition est faite autour d’une plante médicinale et de ses propriétés. Elle se procure par exemple de la racine de guimauve déshydratée, régénérante, auprès d’un jardinier suédois et commande des ampoules de complexes médicinaux au laboratoire de phytothérapie du Dr Hauschka, WALA, en Allemagne.
Les soins d’Elisabeth commencent toujours par un bain de pieds à la sauge pour relaxer ses clientes et, surtout, les faire parler ! Elle peut ainsi déceler des problèmes d’intolérance alimentaires ayant des répercussions sur la qualité de la peau. Elle y ajoute ses connaissances du drainage lymphatique pour le visage développé par le Dr Vodder à Copenhague. Cette « gymnastique faciale » a pour but de dissoudre les tensions musculaires du visage, de tonifier les tissus et de mieux irriguer la peau.
Rencontre avec le Dr Hauschka
En 1961, elle part en en Inde et revient armée de nouvelles connaissances sur les plantes médicinales et leurs propriétés cosmétiques. Elle y découvre l’huile de neem, utilisée dans la tradition ayurvédique pour ses vertus purifiantes. C’est à son retour, en 1962, qu’Elisabeth et son mari rencontrent le Dr Rudolf Hauschka, fondateur du laboratoire WALA. Leur collaboration aboutit à la création d’une gamme de cosmétique « curative » à base de plantes médicinales dès 1967. Bien que nombre de soins soient directement issus des recettes d’Elisabeth Sigmund, c’est le nom du Dr Hauschka que prend la marque…
Après avoir pris sa retraite à la fin des années 1970, Elisabeth Sigmund meurt en 2013. À la veille d’être centenaire, elle n’oubliait jamais de se maquiller quand elle recevait de la visite.
Des soins inspirants
Comme pour nombre de petites filles, les premiers soins de visage d’Elisabeth Sigmund étaient ceux de sa mère. C’est sa lotion à l’hamamélis, aux propriétés toniques et purifiantes, qui inspira plus tard la recette de la lotion tonifiante Dr Hauschka. On y retrouve aussi de l’anthyllide, stimulante cellulaire et plante fétiche du jardin de la grand-mère d’Elisabeth. Quant à la « pâte d’amande » dont sa mère s’enduisait le visage, Elisabeth Sigmund en a amélioré la composition en y ajoutant des plantes médicinales. Aujourd’hui, la crème purifiante pour le visage Dr Hauschka contient aussi du calendula, de la camomille et du millepertuis pour assainir la peau tout en douceur.
Un laboratoire anthroposophique
Contemporain de Steiner, le chimiste Rudolf Hauschka a étudié les procédés rythmiques pour mettre au point un processus de fabrication permettant de conserver des extraits de plantes médicinales sans addition d’alcool… Ainsi débute le laboratoire WALA en 1935, le même qui fournit Elisabeth Sigmund en fleurs, feuilles, baies, racines… nécessaires à ses compositions. Le laboratoire WALA possède aujourd’hui des jardins où sont cultivées en biodynamie plus de 150 plantes médicinales entrant dans la composition des cosmétiques Dr Hauschka et des médicaments WALA. Situé en Allemagne, le laboratoire propose neuf médicaments « anthroposophiques » à base de plantes, parmi lesquels un baume au plantain contre la toux, des compresses à l’arnica contre les contusions et un élixir amer à base de gentiane, d’absinthe et de gingembre pour stimuler la digestion.