Les fleurs de Bach ont-elles perdu leur âme?
L'engouement pour les fleurs de Bach a conduit à la multiplication des produits dérivés des élixirs floraux, avec la promesse de réponses généralistes, rapides et clefs en main. Pourtant la simplicité apparente des remèdes conçus par le docteur Bach ne devrait pas faire oublier que, sur les questions émotionnelles complexes, des formes d'accompagnement sont souvent nécessaires.
[Mis à jour le 18/06/2018]
Dans les années trente, Edward Bach, médecin homéopathe britannique, invente une thérapie à base d’élixirs de fleurs. Utilisant son intuition hors commun, il teste au cours de sa vie des de fleurs pour en sélectionner trente-huit à partir desquelles il élabore ses élixirs. Leur préparation minutieuse repose, comme l’homéopathie, sur la mémoire de l’eau qui s’imprègne de l’énergie vibratoire de la fleur.
Produits dérivés et dérive commerciale
Le succès est aujourd'hui mondial. Des dizaines de millions de bouteilles de fleurs de Bach sont vendues chaque année dans plus de soixante-dix pays. De quoi stimuler l’imagination commerciale. Le laboratoire pharmaceutique britannique Nelsons, propriétaire exclusif de la signature Bach, surfe ainsi à fond sur le succès du Rescue.
Ce fameux mélange de cinq élixirs, très efficace après un choc émotionnel, est désormais décliné sous toutes ses formes, du spray à la crème en passant par le « Spécial nuit calme » ou la pastille zen. Quant aux sociétés productrices d’élixirs floraux et autres produits dérivés, elles poussent comme des champignons ! Certaines proposent de très bons produits alors que d’autres exploitent sans aucun complexe le nom de Bach. La société Fleurs, Essences et Harmonie, par exemple, propose un parfum, « Vivacités de Bach », dont les fragrances sont censées exhaler «de précieux bienfaits qui réactivent des sensations de joie, de lucidité, atténuent les inhibitions, canalisent les énergies et appellent au dépassement de soi». Tout un programme ! Ces produits gadgets concourent à donner une fausse image des fleurs de Bach, même si elles correspondent d’une certaine façon aux attentes de consommateurs, ravis de soigner toutes leurs névroses à coup de parfum ou de bonbons.
Vers une«fast-therapy »?
Le Rescue remedy, qui a conquis par son efficacité les plus dubitatifs, répond parfaitement à ces exigences consuméristes. De là à conclure que les autres élixirs fonctionnent de façon similaire, il n’y a qu’un pas… que le néophyte souvent franchit. Accessible dans n’importe quelle boutique diététique, l’élixir salvateur est identifié rapidement, au mieux sur les conseils d’un vendeur, au pire sur sa propre intuition : si je suis égocentrique, accaparant et bavard à l’excès, je choisis la bruyère... Mais qui est assez lucide pour analyser avec justesse ses propres comportements pathologiques ? Et qui est assez naïf pour penser que des fonctionnements aussi profondément ancrés vont disparaître d’un coup de baguette magique ? Jean-Paul Piget, naturopathe spécialiste des élixirs floraux, s’indigne de cette approche simpliste : «L’être humain est fait d’une superposition de couches émotionnelles très complexes. Les élixirs floraux s’attaquent aux couches les plus profondes et souvent, un suivi thérapeutique ou un accompagnement s’imposent».
Les fleurs de Bach un chemin vers soi
Edward Bach rêvait d’inventer une méthode où chacun serait son propre médecin : «La maladie est, dans son essence, le résultat d’un conflit entre l’âme et l’esprit et ne sera jamais extirpée sans un effort spirituel et mental.». Bach était conscient de la difficulté de l’entreprise mais il accordait une grande confiance au genre humain quant à « l’effort » à fournir. Une confiance qu'on pourrait considérer sans doute comme excessive.
Les spécialistes s’accordent en tout cas sur ce point : les fleurs de Bach sont efficaces lorsqu’elles sont prises comme complément thérapeutique, notamment dans le cadre de thérapies énergétiques et vibratoires comme la kinésiologie ou l’acupuncture. «Les fleurs de Bach ne remplacent pas la thérapie mais permettent d’accélérer le processus de transformation du patient induit par un travail thérapeutique», conclut Jean-Paul Piget.