Le jiaogulan, protecteur tous azimuts
Pour récolter une racine de ginseng asiatique, il faut en général attendre sept ans. Heureusement, il y a le jiaogulan, petite cucurbitacée à croissance rapide dont les feuilles pourraient bien nous fournir une alternative. Je vous invite à découvrir cette plante fascinante.
Vous avez dit médicinal ?
Le jiaogulan (Gynostemma pentaphyllum) apparaît comme plante-aliment au xve siècle dans les ouvrages classiques de la médecine chinoise. Ce n’est que vers les années 1800 qu’il est utilisé comme médicinale dans le sud de la Chine. Au début des années 1960, les chercheurs chinois et japonais découvrent dans ses feuilles des substances similaires à celles contenues dans la racine de ginseng. Depuis, les études ont attesté son effet protecteur cardiovasculaire avec réduction du « mauvais cholestérol », des triglycérides, de la pression artérielle et de l’agrégation plaquettaire. Le jiaogulan calme l’agitation et l’anxiété, améliore le sommeil, atténue les maux de tête et régule l’hypertension lorsque le stress est un déclencheur. Les études montrent aussi qu’il renforce le système immunitaire. Inhibiteur des tumeurs, il est utilisé pour stimuler les défenses des personnes atteintes de cancer ainsi que pour prévenir les effets secondaires de la chimiothérapie et de la radiothérapie. Il active en effet la production de superoxyde dismutase, un antioxydant qui agit au coeur de nos cellules. Il est aussi utilisé pour accompagner les maladies générant un fort stress oxydatif, comme le diabète.
Au jardin
J’ai cultivé le jiaogulan dès 2010. À l’époque, peu d’informations étaient disponibles. J’ai donc appris par moi-même. La plante est difficilement trouvable en jardinerie, il faut donc la démarrer de graines. Elles sont grosses et très fragiles, et il est donc possible que vous les receviez à moitié brisées. Pas de souci, plantez-les tout de même. Au printemps, lorsque le risque de gel est dissipé, préparez un godet de taille 9 x 9 x 20 cm pour chaque graine. Faites un petit trou d’à peine 1 cm de profondeur, placez la graine, recouvrez de terre et tassez délicatement. Gardez humide jusqu’à la germination, qui peut prendre plusieurs semaines. J’obtiens des taux de germination proches de 100 % avec mes propres graines, mais avec celles du commerce, ne vous attendez pas à de tels taux.
Attention au froid !
Une fois germées, gardez vos plantules dans un endroit avec soleil et chaleur douce. Méfiez-vous des jours trop chauds qui peuvent assécher les godets. Laissez la plante se développer en godet, puis transplantez-la dans des pots de plus en plus gros. Gardez la plante en pot, car elle ne supportera pas un hiver froid...
. Je garde mes pots dans ma serre et la plante adore cette chaleur humide. Je la laisse en revanche dans un endroit protégé du soleil direct, car la serre devient une vraie fournaise aux mois de juillet et août. Au jardin, vous pouvez placer votre pot en pleine terre dans un endroit bien ensoleillé. Arrosez régulièrement si vous voulez une belle production de feuilles (c’est la partie intéressante d’un point de vue médicinal). La plante va ramper, s’accrocher, grimper et s’étendre avec ardeur. C’est très bien ! Ne la taillez pas, sauf pour récolter les feuilles. En fin de saison, laissez sécher les feuilles et vous verrez apparaître les belles graines vertes qu’il faudra récolter avec soin. Ensuite, une bonne taille et la plante est prête à être hivernée devant une fenêtre bien ensoleillée.
Ramasser et sécher
On utilise la feuille, dans les préparations thérapeutiques. Si votre plante est heureuse au jardin, elle vous en fournira une grande quantité. Vous pouvez soit utiliser la feuille fraîche, soit la faire sécher. Pour ce faire, vous pouvez couper les longues tiges avec les feuilles et suspendre ces guirlandes végétales à une poutre. Placez ensuite délicatement ces feuilles sèches dans des sacs en papier pour faire vos préparations. Même si les feuilles se cassent sans vos sacs, vous pouvez utiliser les débris.
À l’atelier
Deux teintures-mères de jiaogulan
Si la teinture de feuilles fraîches est, selon mon expérience, la meilleure préparation, ce n’est pas la seule. Voici quelques idées qui vous permettront aussi d’utiliser le jiaogulan en fonction des ingrédients dont vous disposez.
Teinture de feuilles fraîches
Placez les feuilles fraîches dans un bocal. Pour chaque 100 g de feuilles, utilisez 200 ml d’alcool à 80° non dénaturé. Lestez les feuilles à l’aide d’un galet ou utilisez ma méthode en ayant recours à une presse à café (vidéo : http://bit.ly/2wEpA77). Laissez macérer deux semaines, puis pressez, filtrez et stockez.
Teinture de feuilles sèches
Si vos feuilles ont été séchées récemment, cette préparation sera très satisfaisante aussi. Suivez la même méthode que précédemment, mais utilisez 500 ml d’alcool à 45° pour 100 g de feuilles sèches.
Posologie Pour ces deux formes de teintures, prendre entre 80 et 120 gouttes 3 fois par jour en fonction du contexte et de l’effet recherché.
Autres préparations
Infusions de feuilles
L’infusion, à partir de feuilles fraîches ou sèches, est très agréable à boire, avec un goût riche rappelant la racine de réglisse ou celle de ginseng, et une petite amertume en arrièreplan. Utilisez une pincée de feuilles par tasse et buvez 2 à 3 tasses par jour.
Feuilles à croquer au jardin
C’est ma forme favorite. En période de stress, je mâche deux belles feuilles deux fois par jour. Le goût est très prononcé, mais pas désagréable. Ceci vous permettra de bénéficier pleinement de la présence de votre plante au jardin. On ne peut pas faire plus frais !
À savoir
Le jiaogulan est considéré comme une plante adaptogène et doit être pris sur une période d’au moins 4 à 6 semaines, voire plus en cas de pathologie chronique à gérer.
Des associations judicieuses
Utiliser une plante seule n’est pas forcément optimal face à un problème de santé. Il peut se révéler utile de procéder à de bonnes combinaisons. Voici quelques idées d’associations : • Pour un effet antioxydant et protecteur puissant, associez jiaogulan et romarin (Rosmarinus officinalis). • Pour un effet protecteur cardiovasculaire, associez jiaogulan et aubépine (Crataegus monogyna, ou C. laevigata). • Pour un problème d’hypertension qui varie en fonction du niveau de stress, combinez jiaogulan et passiflore (Passiflora incarnata).
Almanach de novembre : récolter les racines
Novembre est un excellent mois pour récolter les racines. Pour les vivaces, il faut attendre que la plante ait 2 à 3 ans afin de pouvoir récolter une masse racinaire conséquente. Pour les annuelles, vous n’avez pas le choix : la récolte se fait en fin de première année. Pour les bisannuelles, récoltez à l’automne de la première année. Faites le tour du jardin et repérez les plantes les plus vaillantes que vous désirez récolter. Si le temps a été sec ces derniers jours, versez la veille de la récolte un ou deux arrosoirs d’eau sur votre plante. Ceci permettra d’assouplir le sol pour une récolte facile le jour suivant. Le lendemain, à l’aide d’une fourche bêche, soulevez délicatement la motte entière contenant la masse racinaire. Ensuite, à vous de voir comment procéder pour les vivaces. Vous pouvez ne récolter qu’une partie des racines puis replacer le reste de la motte, et votre plante repartira au printemps prochain. Pour les annuelles et bisannuelles, récoltez la masse entière en secouant la motte pour enlever le gros de la terre. Ensuite, faites tremper vos racines dans une bassine d’eau pendant une trentaine de minutes, puis enlevez les morceaux de terre coincés. Vous pouvez casser la masse racinaire en plusieurs morceaux. Ensuite, utilisez une brosse en chiendent pour brosser vos racines et enlever la terre qui est restée collée. Rincez puis essuyez vos racines à l’aide d’un torchon. Coupez les plus grosses dans le sens de la longueur, puis coupez-les en tronçons de 2 à 3 cm pour les faire sécher.