Compléments alimentaires
contenant des plantes :
quels dangers ?
Un rapport de l’Académie nationale de pharmacie pointe du doigt les compléments alimentaires à base de plantes. En cause : leur banalisation, l’effet laxatif puissant de certains d’entre eux et le manque d’études scientifiques dans certains cas.
L’Académie nationale de pharmacie a publié le 7 février dernier un rapport sur les compléments alimentaires contenant des plantes. Dans celui-ci, elle s’inquiète de leur prise abusive ou détournée. Pierre Champy, professeur en pharmacognosie à l’université de Paris-Sud et membre de l’Académie, veut notamment alerter sur la « banalisation de la consommation de ces produits » du fait de leur disponibilité en grandes surfaces, alors même qu’ils contiennent des plantes ayant « des effets pharmacologiques reconnus ».
Effets indésirables et interactions médicamenteuses
En effet, même si, dans 55 % des cas, les compléments alimentaires sont prescrits par un médecin, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) fait état de 2 389 signalements d’effets indésirables liés à leur consommation entre début 2009 – date de la mise en place de son dispositif de nutrivigilance – et le 31 décembre 2016.
Beaucoup de ces signalements font suite à un mésusage de ces produits – parmi lesquels les comprimés spécial minceur, qui concentrent 15 % des signalements selon l’Anses. Et pour cause, selon l’Agence – citée dans le rapport de l’Académie de pharmacie –, « peuvent être présentes dans les préparations des molécules naturellement présentes dans la plante, responsables à la fois de l’effet physiologique attendu, mais aussi d’un effet pharmacologique potentiellement délétère en dehors d’une prescription médicale adaptée, voire toxique en cas de surconsommation ou de mésusage, ainsi que des molécules naturellement présentes dans la plante, indésirables et sans intérêt physiologique. »
Particulièrement mis en cause pour leur effet laxatif puissant : les produits minceur contenant du suc de l’aloès, de l’écorce de bourdaine ou de cascara, de la racine de rhubarbe ou encore des fruits et folioles du séné.
Autre risque pointé : les interactions médicamenteuses. Le rapport cite à ce propos une étude mentionnant des interactions entre médicaments et préparations contenant du millepertuis, du ginseng, du ginkgo biloba, de l’ail, du kava ou encore de la valériane. Il précise également que « la présence de phytoestrogènes dans le soja, sous forme de complément alimentaire, peut altérer les effets de certains traitements anticancéreux. »
Limiter les compléments alimentaires ?
Les pharmaciens recommandent en conséquence de modifier la liste des plantes pouvant entrer dans la composition des compléments alimentaires – qui en compte 540 depuis l’arrêté de 2014 –, estimant que, pour certaines d’entre elles, « il n’existe pas de données de sécurité suffisantes dans la littérature scientifique. »
Ils précisent qu’environ un sixième des plantes répertoriées dans l’arrêté correspond à des espèces employées dans des pharmacopées traditionnelles étrangères qui ne sont toujours pas reconnues par l’Agence européenne du médicament. Ils préconisent également de réviser la réglementation sur les allégations pour la sécurité d’emploi et pointent divers manquements dans l’étiquetage des compléments alimentaires.