Un système D efficace comme le desmodium
Épisode 2 - Au Cameroun, l’action des plantes médicinales africaines a besoin d’être légitimée. À partir d’études menées en Europe, l’intervention de l’association Solidarité a permis de valoriser deux d’entre elles sur leur terre d’origine. Jusqu’à la fabrication de remèdes avec les moyens du bord.
A l’Ouest du Cameroun, dans la ville de Bagangté, l’Université des Montagnes (UdM) dispense un enseignement en pharmacognosie (étude des plantes médicinales). Les plantes médicinales enseignées se limitent en général, à l’UdM comme ailleurs, à celles qui ont donné lieu à la formulation de médicaments diffusés mondialement. Dans le but d’enrichir les cours en y intégrant l’étude de plantes médicinales camerounaises, Jacqueline Ragot de l’Association Solidarité pour le soutien aux malades, a été invitée à venir présenter les travaux réalisés en France par l’Association sur Desmodium adscendens et Securidaca longipedunculata.
Cette intervention s’est poursuivie par la mise en place d’une petite unité de fabrication de phytomédicaments à base de Desmodium adscendens. L’objectif est de développer l’utilisation de cette plante hépatoprotectrice et de former les quelque 300 étudiants inscrits en pharmacie, ainsi que les pharmaciens installés, afin qu’ils puissent eux aussi se lancer dans la réalisation de phytomédicaments. En Afrique, on parle de remèdes traditionnels améliorés (RTA). La réalisation d’une forme sèche (en gélules) s’avérant impossible par manque de matériel, il a été choisi de préparer un soluté concentré buvable.
Un petit local baptisé laboratoire de fabrication de fortune a alors été réservé pour ces travaux. La décoction concentrée de desmodium y a été préparée en utilisant de grandes bassines et de grosses marmites de ménages en guise de bécher et de fiole Erlenmeyer et en se servant d’un réchaud butane posé à même le sol. Mais celui-ci s’avéra rapide- ment inutilisable par pénurie soudaine de butane dans toute la ville. Un rustique réchaud à pétrole permit alors de terminer toute l’opération. Afin de vérifier la présence de flavones (composés présents dans la décoction de desmodium) sur les chromatographies, un détecteur de faux billets fut installé en lieu et place de lampes ultraviolettes, et les pharmaciens enseignants à l’UdM apportèrent le matériel d’analyses de leur propre laboratoire en ville.
Finalement, le processus de fabrication put être mené à bien, chacun apportant sa contribution, rendant ce processus extrêmement vivant et démontrant par là qu’il est possible d’arriver à une réalisation concrète, même si les conditions matérielles ne correspondent pas toujours au standard occidental des laboratoires de recherche.