Gandouch : le rituel ayurvédique pour l’hygiène de la bouche
Pratique traditionnelle de l’ayurveda, le « gandouch », appelé aussi « oil pulling », consiste à garder en bouche pendant quelques minutes le matin une cuillère à soupe d’huile végétale. Cette routine « détox » aurait de nombreuses vertus sur la santé buccale, tout en tonifiant et assainissant l’organisme tout entier.
En ayurveda, médecine indienne millénaire, le « gandouch », appelé aussi « kavala gandoosha » ou « kavala graha », est un rituel d’hygiène buccale incontournable du matin. Sa pratique est simple, bien que déroutante : il s’agit de garder en bouche une cuillerée à soupe d’huile de sésame pendant au minimum 5 minutes, pour les débutants, et jusqu’à 20 minutes, pour les plus habitués. Selon la tradition, il est conseillé de malaxer longuement l’huile en bouche, c’est-à-dire la « mâcher » en la faisant passer énergiquement entre les interstices des dents, d’avant en arrière. Par ce bain de bouche l’huile se charge en toxines. Que l’on évacue en recrachant l’huile, laquelle, au contact de la salive agissant comme un émulsifiant, est devenue trouble et a pris une teinte claire, tendant parfois vers le vert.
Question de praticité, vous éviterez toutefois de recracher le mélange dans l’évier. Afin d’éviter l’encombrement des canalisations, prenez plutôt un mouchoir en papier à jeter dans votre poubelle ... Ensuite, vous procèderez à un rinçage à l’eau tiède puis un brossage des dents traditionnel, avec le recours si besoin à du fil interdentaire et un nettoyage au jet d’eau. Le rituel se pratique traditionnellement à jeun, au saut du lit, avant le petit-déjeuner.
La pratique, qui de préférence est précédée en ayurvéda par un grattage de la langue à l’aide d’un racloir en cuivre, a de quoi interpeller les esprits occidentaux… Et pourtant, aux États-Unis, le gandouch, appelé là-bas « oil pulling » se répand depuis plusieurs années comme une traînée de poudre, suscitant l’enthousiasme de stars comme l’actrice Gwnyneth Paltrow. Celle-ci lui attribue la blancheur légendaire de son sourire ! En France, de nombreux blogueurs de santé naturelle s’y sont essayés, avec plus ou moins d’enthousiasme, et pour une durée variable. La manœuvre sollicite en effet fortement les muscles de la mâchoire, peu habitués à travailler de la sorte, et la sensation de l’huile en bouche est perçue de manière contrastée, soit comme agréable ou au contraire écœurante. Pour cette dernière raison, l’huile de sésame traditionnelle, amère, est souvent remplacée par de l’huile de coco, au goût plus fruité et doux. À noter que celle-ci reste solide en bouche quelques instants avant de se liquéfier.
Aux sources de l’ayurvéda
Les vertus du gandouch sont, selon la tradition ayurvédique, nombreuses. Il favoriserait une meilleure santé buccale, avec des dents plus fortes et blanches, une meilleure haleine et un apaisement des inflammations des gencives, tout en diminuant le risque de caries. Mais l’effet serait profitable à la santé de manière globale. Selon un des textes pilier de la médecine ayurvédique, le Charaka Samhita, « les bains de bouche à l’huile renforcent les os de la mâchoire, la voix, épanouissent le visage, embellissent les lèvres, donnent davantage de goût aux aliments, et purifient la parole » ! Kiran Vyas, fondateur et directeur de Tapovan, premier centre ayurvédique implanté en France, en Normandie, indique que ce rituel « détox » pratiqué par les curistes, « harmonise, tonifie, assainit, et donne de l’énergie ». Le gandouch soutiendrait ainsi l’organisme tout entier en éliminant de la cavité buccale les toxines que l’ayurvéda nomme « ama ». De la racine sanskrite « am » signifiant « affaiblir » ou « faire du mal », ces « déchets » sont, selon la tradition, des résidus toxiques provenant de substances incomplètement digérées, et non assimilées par l’organisme. Elles s’accumulent dans le corps, et en particulier dans la bouche et sur la langue, durant la nuit, et doivent être éliminées pour rester en bonne santé.
Le gandouch pour éliminer les germes nocifs
Mais le gandouch aurait aussi la précieuse propriété d’éliminer bactéries, virus, et autres germes pathogènes présents dans la cavité buccale. Caractéristique précieuse à l’heure où de nombreuses études pointent du doigt le lien entre hygiène bucco-dentaire et santé générale. En effet, la prolifération de germes potentiellement nocifs dans la bouche favoriserait la survenue de pathologies « éloignées » comme l’artériosclérose (durcissement des artères), les AVC (accidents vasculaires cérébraux), le diabète, la polyarthrite rhumatoïde, ou encore la tendinite chronique... Bien qu’encore mal identifié par les spécialistes, le mécanisme purifiant bucco-dentaire du rituel gandouch pourrait s’expliquer de diverses manières. Il proviendrait d’abord de l’effet mécanique nettoyant de l’émulsion créée par le mélange salive-huile en bouche, semblable à celui d’un savon. Celle-ci serait capable d’entraîner les germes et résidus liposolubles et hydrosolubles nichés dans tous les recoins de la bouche, notamment responsables de la formation de la plaque dentaire.
Mais cela serait aussi dû aux propriétés des huiles elles-mêmes. Celle de sésame, présente un effet antioxydant et antibactérien, tandis que celle de coco, riche en acide laurique, un triglycéride à chaîne moyenne, est capable de détruire les virus, bactéries et levures. Autre piste : la pratique de gandouch renforcerait la salivation, protection naturelle contre les caries et les gingivites, en neutralisant l’acidité buccale. Quel que soit son mode d’action exact, une étude menée en 2008 à Chennai, en Inde, révèle que les bains d’huile sont presque aussi efficaces contre la mauvaise haleine, la plaque dentaire, les caries et les inflammations de la gencive que leur équivalent chimique à la chlorhexidine. Avec cependant les effets indésirables en moins, comme l’apparition de tâches sur les dents et un équilibre de la flore buccale mis à mal pouvant, à force d’utilisation répétée, augmenter le risque de cancer de la bouche et de la gorge.
Décrassage général ?
Prudence au pays de l’oil pulling, cependant ! En effet, de nombreux articles vont jusqu’à parler de « miracle » quant aux vertus supposées du rituel gandouch. Asthme, allergies, acné, rhumatismes, troubles de l’appareil reproducteur, troubles digestifs, migraines, problèmes de peau et même cancer sont fréquemment évoqués, et de manière générale les maux « d’encrassage », mais sans évoquer de véritable recherche sérieuse à l’appui. Cependant, il est vrai qu’une étude indienne menée en 1996 par le journal indien Andhra Jyoti, à laquelle plusieurs publications scientifiques sur l’oil pulling se réfèrent, mentionne qu’à 89% les personnes interrogées pratiquant gandouch constatent des effets durables sur l’amélioration de leur santé.
En attendant cependant que plus de lumière soit faite sur les propriétés exactes de gandouch, faites-vous une idée par vous-mêmes en adoptant le rituel. Mais attention, il vous faudra tenir au moins trois semaines pour commencer à sentir ses éventuels effets ! Si vous souffrez d’abcès dentaire ou de gingivite, vous pourrez rajouter avec profit deux gouttes d’huile essentielle de tea tree (Melaleuca alternifolia) dans votre huile de bouche, aux propriétés antibactériennes et antitartre. À noter également que certains préfèrent l’huile de tournesol ou d’olive au sésame et au coco. Enfin, dernière précision, et non des moindres : il va sans dire que gandouch ne remplace pas le brossage de dents traditionnel, étape incontournable de l’hygiène buccale !
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