Le henné, une poudre éclatante
Le henné est extrait d'une plante originaire d'Inde et d'Arabie. Il désigne communément une poudre utilisée pour les teintures capillaires, les tatouages semi-permanents, mais aussi comme remède depuis des milliers d'années en Orient. Un produit qui peut vous en faire voir de toutes les couleurs…
J’ai eu l’adolescence capillaire quelque peu romanesque. Je crois avoir essayé toutes les couleurs de cheveux. Ils étaient si abîmés par les produits chimiques que la mère d’une amie m’avait conseillé un henné. Le résultat ne fut malheureusement pas celui que j’attendais. Je sais pourquoi aujourd’hui.
Le henné naturel, aussi appelé henné colorant, provient d’un arbuste épineux, Lawsonia inermis, qui pousse dans les régions tropicales et subtropicales (Asie du Sud, Afrique, Australie…). Ses jeunes pousses, longues de 20 à 25 cm, sont cueillies, séchées et réduites en une poudre qui, par synecdoque, est aussi appelée henné. Cette dernière est communément employée pour colorer les cheveux, dans des tons plus ou moins cuivrés. Quand la plante provient d’Égypte ou du Yémen, elle donne à la chevelure un blond vénitien à orangé ; du Pakistan (henné Jamila) et du Sahara, un orange plus intense ; du Rajasthan, un rouge orangé tirant sur le marron ; du Maroc, un auburn…
Gare aux mélanges
Le henné rouge, issu d’une espèce voisine – Lawsonia alba – donne quant à lui un rouge franc. Mais ces nuances ne sont qu’indicatives : elles dépendent aussi de la couleur des cheveux et de leur état. « Sans colorant ni parfum de synthèse, sans conservateur ni peroxyde, sans ammoniaque, le henné naturel renforce et fait briller les cheveux car il les enveloppe sans les pénétrer. Il aide également à équilibrer le pH du cuir chevelu, évite les desquamations, lutte contre les cheveux gras tout en donnant du volume, et permet même d’éloigner les parasites… Mais il faut prendre ses précautions lorsqu’on arrête les colorations ou décolorations chimiques afin d’éviter les mauvaises surprises », m’explique Alexandra Perrogon.
Outre ces précautions, Sylvie Hampikian, pharmacotoxicologue depuis trente ans spécialisée dans les actifs naturels, met en garde contre les mélanges de produits : « Le mélange de diverses espèces végétales (rhapontic, indigo et amla par exemple) avec le henné est courant pour apporter de belles nuances aux teintures. Mais attention aux produits colorants chimiques vendus avec un packaging faisant penser au henné, ainsi qu’aux marques exotiques pouvant contenir du picramate de sodium et autres...
sels métalliques, potentiellement toxiques ou allergisants. A proscrire aussi : le henné vendu sous forme de crème, en partie chimique. » J’apprends qu’il existe deux autres types de hennés, non issus de la même plante, mais bénéfiques pour les cheveux : le henné dit « neutre », pas ou peu colorant, provenant d’une plante indienne appelée Cassia obovata, et le henné noir, issu d’Indigofera tinctoria, qui produit une coloration corbeau aux cheveux et bleue à la peau des Touaregs et à leur foulard. Malheureusement, dans le commerce, il est souvent coupé avec des produits chimiques comme le paraphénylènediamine (PPD).
C’est aussi un remède
Le henné naturel est aussi un remède en médecine traditionnelle orientale et ayurvédique, car la plante contient une gamme de substances actives : les coumarines, naphtaquinones, flavonoïdes, stérols et tanins. Sylvie Hampikian développe : « En Orient, il existe un bain de bouche antibactérien à base d’infusion de feuilles de henné, mélangée avec du tabac et du sel. L’écorce de la tige est même parfois mâchée pour combattre les maux de dents. En décoction d’écorce, il est également réputé comme régulateur hépatique et du flux menstruel, comme antimigraineux, antidiarrhéique, mais aussi en tant que tonique du système sanguin et nerveux. Pourtant, malgré les nombreux travaux de recherche, aucun usage en interne n’est reconnu officiellement et autorisé en Europe ».
On en restera donc à une utilisation externe, capillaire et cosmétique… L’huile de henné (macération de feuilles de henné) se révélant astringente, certaines personnes l’utilisent pour réduire les signes du vieillissement ainsi que les imperfections cutanées. Ses propriétés anti-inflammatoires et antibactériennes la rendent également assez efficace sur les plaies, les ulcères, l’herpès ainsi que sur les coups de soleil. à tester bientôt, donc… puisque le soleil revient.
Faire peau neuve
Ferudgia utilise le henné sur sa peau. Son savoir lui vient de son enfance en Kabylie : « Au moment de la fête de l’Aïd, maman nous mettait une pâte à base de henné, de vinaigre blanc et d’huile d’olive dans la paume de la main, et nous devions garder ainsi les poings fermés toute la nuit, enveloppés dans du papier journal et dans de vieilles chaussettes. C’est un rituel de purification de l’esprit, des actes, et de la peau. Nos mains en ressortaient colorées, mais toutes propres et douces ! ». Sa sœur, en pleine chimiothérapie, s’en servait contre les fendillons qu’elle avait aux talons, asséchés par les traitements. Le tatouage au henné, pour nous, c’est venu après, pour la beauté du geste ! », conclut-elle.
Des soins capillaires maison, par Alexandra Perrogon
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Soin détox avant une coloration
Que vous réalisiez votre première coloration au henné chez le coiffeur ou chez vous, il est conseillé de faire un soin détoxifiant quelques jours auparavant afin d’éliminer les impuretés et résidus résultant des précédentes colorations ou décolorations chimiques. Le trio gagnant d’Alexandra ? Un mélange à parts égales de poudre de reetha, de sidr et de tulsi avec de l’eau à 50 °C pour former une pâte onctueuse que vous laisserez poser 20 à 30 minutes sur votre chevelure enveloppée dans une charlotte. Rincez ensuite à grande eau. On peut utiliser ce soin végétal pour entretenir sa couleur, et même en remplacement des shampoings traditionnels.
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Coloration au henné
Mettez une paire de gants en plastique et mélangez dans un grand bol 60 à 70 g de poudre de henné (à adapter selon l’épaisseur et la longueur de vos cheveux) avec une tasse d’eau tiède (50 à 60 °C) et un peu d’eau de fleur d’oranger si vous en appréciez l’odeur. En cas de cheveux secs, ajoutez-y une cuillerée à soupe d’huile de sésame. La pâte obtenue doit avoir une consistance de crème, suffisamment ferme pour accrocher aux cheveux. Avant application, posez une texture grasse (huile ou crème) sur le visage en bordure des cheveux afin d’éviter la coloration de votre peau. Appliquez ensuite le henné par petites mèches, en partant du cuir chevelu vers la pointe. Laissez reposer 2 heures maximum (seulement 15 à 20 minutes pour de légers reflets) avec la charlotte sur la tête pour maintenir la pâte humide (une fois que le henné sèche, il n’agit plus). Rincez à grande eau.
Pour des reflets plus marron, réchauffez le mélange et appliquez-le chaud sur le cuir chevelu. Le henné tient 4 à 6 semaines avant de s’estomper. Renouvelez aussi souvent que vous le souhaitez.
Astuce : Le henné peut changer la texture du cheveu. En général, il le rend plus sec d’apparence. Utilisez de l’huile végétale en soin – coco ou jojoba – à une fréquence adaptée au rendu souhaité.
Soin antichute de cheveux : Vous pouvez opter pour un soin d’entretien maison constitué à parts égales de poudre d’amla, de brahmi et de bhringaraj. Même procédé d’application que pour la coloration. Vous aurez ainsi des cheveux fortifiés, et une couleur lumineuse !
À Lire
- J’embellis mes cheveux, de Sylvie Hampikian et Alexandra Perrogon, éd. Terre vivante, 2014.
- Créez vos cosmétiques bio, de Sylvie Hampikian, éd. Terre vivante, 2020.