Contrôlez votre faim grâce aux huiles essentielles
Trouble alimentaire, la boulimie est une pathologie complexe à comprendre et à soigner. Si l’aromathérapie ne résout pas toutes les difficultés associées aux ingestions excessives et compulsives, recourir aux essences peut toutefois limiter les impérieuses sensations de faim.
Fringales, attirances irrépressibles pour les produits sucrés, ingestions compulsives sans faim… Plus précisément, la boulimie se traduit par l’absorption d’une grande quantité de nourriture sur une courte période. « On pose le diagnostic lorsqu’il y a au minimum deux crises par semaine, sur une durée d’au moins trois mois », explique Agnieszka Smagala, médecin endocrinologue à l’hôpital Pasteur de Colmar.
Cette pathologie s’exprime de différentes manières : « Lorsque l’on mange jusqu’au dégoût, on parle de boulimie hyperphagique. La boulimie vomitive implique, elle, des vomissements liés à la culpabilité ressentie après l’ingurgitation de nourriture. Enfin, il y a la boulimie-anorexie, plus difficile à traiter, car la personne se restreint autant qu’elle avale des aliments. » En général, la boulimie va de pair avec un bouleversement hormonal. « Le sens de l’appétit et de la satiété régi par les hormones telles que la leptine et la ghréline est totalement perturbé », poursuit le docteur Smagala. Un dérèglement qui se traduit par des irrégularités menstruelles, une hypertrophie des glandes salivaires ou encore un taux de cortisol excessif. Bien que cette pathologie soit fréquente, elle reste néanmoins sous-estimée ; on se vante en effet rarement d’être boulimique. En outre, avec la honte et la crainte du jugement, la manière de manger généralement sans excès lors des repas en commun ne donne aucun signe d’alerte à l’entourage.
Une pathologie multifactorielle
La boulimie touche davantage les femmes, mais les mécanismes du cerveau impliqués dans cette maladie restent en partie un mystère. Les tableaux cliniques sont d’ailleurs très différents d’un patient à l’autre. Toutefois, parmi les facteurs en lien avec la pathologie, l’aspect psychologique semble un des plus importants.
« Les boulimiques sont souvent des personnes anxieuses, qui portent un traumatisme du passé et ont besoin de tout contrôler », indique Agnieszka Smagala. S’alimenter leur permettrait de combler un vide, une angoisse ou un stress. « L’histoire familiale de l’alimentation peut aussi nous marquer à vie. Si, à chaque pleur, la maman arrive avec le biberon, l’enfant “apprend” que le stress se calme par la nourriture. » Un autre mécanisme, plus primitif, consiste à ingérer une grande quantité d’aliments afin de reproduire une chaleur maternelle calmante.
Stress et envie de sucre
Une consommation accrue de sucre, notamment durant l’enfance, peut également entraîner une attirance compulsive vers cet ingrédient. En stimulant sans cesse la zone du cerveau responsable du sentiment de plaisir, la dose nécessaire pour obtenir le même niveau de bien-être doit être réhaussée. Par ailleurs, le stress et le manque de sommeil peuvent engendrer une irritabilité, voire une déprime, qui aura tendance à être compensée par une prise alimentaire souvent sucrée en fin d’après-midi.
Plusieurs études ont confirmé que manquer sérieusement de sommeil augmentait la sensation d’appétit, et qu’il serait plus difficile de refréner ses envies. Enfin, le docteur Smagala nous...
apprend qu’ « il n’y a pas de prédisposition génétique à la boulimie, mais une hérédité comportementale. Une obsession pour la nourriture chez la mère ou le père pourra avoir des répercussions sur le rapport à l’alimentation de l’enfant ».
Olfaction et émotions négatives
Les effets des huiles essentielles sur les troubles de l’alimentation n’ont, pour leur part, pas fait l’objet d’un grand nombre d’études. Il est clair cependant que le cerveau limbique, qui gère les émotions, est impliqué dans les crises compulsives : la molécule odorante, quand elle est respirée, entre en contact avec des récepteurs olfactifs, qui transmettent à leur tour une information au cerveau limbique par influx nerveux. Il a ainsi été décidé d’employer l’olfactothérapie à l’hôpital Pasteur de Colmar auprès de personnes souffrant de problèmes alimentaires. « Nous utilisons l’aromathérapie pour calmer les émotions négatives, diminuer les compulsions et l’attirance pour le gout sucré. Les patients en sont très satisfaits. Concrètement, cela diminue la fréquence des crises boulimiques », rapporte l’endocrinologue.
L’aromathérapie à plusieurs niveaux
Les huiles essentielles sont donc en mesure d’apporter un soutien psychologique tout en contribuant à diminuer l’envie impérieuse de manger. Certaines ont montré leur efficacité sur les addictions, en agissant à la fois sur les mécanismes du plaisir au niveau neuronal et de façon mécanique sur la digestion. Par exemple, les huiles essentielles de girofle (Syzygium aromaticum) et de cannelle (Cinnamomum verum) anesthésient les récepteurs olfactifs activateurs de l’appétit. Pour influencer positivement les facteurs stress et sommeil potentiellement impliqués dans les pulsions alimentaires, on pourra faire appel à la camomille romaine (Chamaemelum nobile). Cette dernière contient une grande quantité d’esters qui favorisent le lâcher-prise et calment les désordres psychologiques. La marjolaine à coquilles (Origanum majorana), connue de façon empirique pour réguler l’appétit, agit ici en complément, comme anxiolytique.
D’autres huiles cibleront davantage la régulation de l’envie de sucre. C’est le cas de l’huile essentielle de géranium rosat (Pelargonium roseum), qui pourra être consommée en interne. Le pamplemousse (Citrus x paradisii) aura, quant à lui, une action coupe-faim, tout comme l’huile essentielle de bergamote (Citrus bergamia op. zeste), grâce à sa teneur en bergamottine. Cette HE montre également des effets anxiolytiques significatifs, qu’elle soit inhalée ou ingérée.
Du temps pour soi
L’approche aromatique ne doit toutefois pas oblitérer le recours à une thérapie cognitive et comportementale. « Une telle démarche est même essentielle pour rompre l’engrenage du système de récompense, lâcher l’obsession de contrôle et retrouver du plaisir en mangeant », estime Agnieszka Smagala. On pourra commencer par prendre du temps pour soi : boire une citronnade sur une terrasse au soleil, faire un soin du visage, marcher dans la forêt... Puis progresser doucement, petit pas par petit pas et étape par étape, pour vaincre la compulsion.
Zoom
Pamplemousse anti-fringales
Lorsqu’une envie irrépressible de nourriture se manifeste, misez sur l’huile essentielle de pamplemousse (Citrus x paradisii). Elle va intervenir en profondeur sur le cerveau et couper la sensation de faim. Il suffit d’en déposer deux gouttes sur un mouchoir ou dans un stick inhalateur et de prendre trois grandes inspirations. Attention à ne pas l’utiliser en cutané, car cette huile est photo-sensibilisante.
Ma formule Parer les crises compulsives
Par Françoise Couic-Marinier Docteur en pharmacie
Propriétés
Coupe-faim, régulateur d’envie de sucre, anxiolytique.
Indications
Pulsions alimentaires, excès d’appétit.
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HE de géranium rosat (Pelargonium roseum) 30 gouttes
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HE de girofle (clou) (Syzygium aromaticum) 30 gouttes
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HE de marjolaine à coquille (Origanum majorana) 30 gouttes
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HE de cannelle de ceylan (Cinnamomum verum) 30 gouttes
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HE de camomille romaine (Chamaemelum nobile) 30 gouttes
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HE de bergamote (Citrus bergamia) 30 gouttes
Posologie : Pour réduire les quantités avant de manger ou quand la crise boulimique arrive, respirer trois fois le mélange (réalisé dans un flacon de 10 ml) durant cinq secondes en fermant les yeux.
Précautions d’emploi : Par principe de précaution, cette formule est contre-indiquée aux femmes enceintes (les huiles essentielles de girofle et de cannelle peuvent provoquer des contractions) et allaitantes, aux personnes sensibles au niveau de la muqueuse du nez et à celles ayant des problèmes de sommeil.
1 ml = 25 gouttes.
Une attirance mécanique pour le sucre
Il existe, sur la langue, des capteurs propres au sucre reliés au circuit de la récompense (zone du plaisir dans le cerveau). Lorsqu’ils sont stimulés trop tôt chez l’enfant par des apports importants de produits sucrés, le seuil du plaisir augmente ; au fur et à mesure, de plus grandes quantités de sucre sont nécessaires pour activer la zone. « Le sucre fonctionne comme une béquille émotionnelle faisant resurgir des émotions positives à travers le système de récompense », indique le docteur Smagala. Pour mettre fin à cet engrenage, l’huile essentielle de géranium rosat peut être d’une aide précieuse. De plus, elle régulera une glycémie un peu élevée.
À faire
Déposez une goutte d’huile essentielle de géranium rosat dans une gélule vide (de taille 0 ou 1), à acheter ou à faire réaliser en pharmacie. En fin d’après-midi, lorsque l’envie de sucre se fait pressante, avalez la gélule d’huile essentielle en l’associant avec une autre de L-tryptophane. Ce traitement est à suivre durant une semaine, et à renouveler si les envies persistent.
Précaution d’emploi : Ce traitement est contre-indiqué aux personnes diabétiques sous médicaments, car il peut provoquer des hyperglycémies.
Ces épices qui trompent le cerveau
La cannelle, l’anis étoilé, la muscade ou encore la bardane génèrent une saveur douce en bouche, sans présence de sucre. On retrouve cette même sensation avec les arômes naturels de vanille, d’amande et de fleur d’oranger. Du côté des huiles essentielles, la cannelle de Ceylan (Cinnamomum zeylanicum op. écorce) et le clou de girofle (Syzygium aromticum) diffusent une odeur sucrée qui leurre le cerveau et le détourne des envies de sucre. Par ailleurs, les effets antibactériens de la cannelle pourraient rééquilibrer notre microbiote intestinal et limiter les conséquences du stress sur les pulsions.