Le konjac : coupe-faim venu d'Orient
Connu depuis 2 000 ans en Chine et 1 400 ans au Japon, le konjac a fait son entrée en Occident dans nos menus. Mais pourquoi réduire ce curieux aliment, dont la teneur en calories est nulle, à un ingrédient minceur ?
D’étonnants bâtons brun verdâtre qui se dressent hors de terre, couronnés d’un extravagant capuchon tacheté et pointu. C’est ainsi que se présente la future fleur du konjac, énorme cornet rougeâtre, pouvant atteindre 55 cm de long, transpercé d’un immense appendice qui sort de son centre. Dans le courant des mois de mai et de juin, le paysage sera devenu méconnaissable : le champ se trouvera transformé en une forêt d’immenses feuilles découpées en larges folioles, formant d’amples gobelets verts portés par d’épaisses tiges mouchetées de noir. Étrange…
Mais ce qui nous importe ici n’est pas la partie visible : tout se passe sous terre où la plante développe patiemment de gros tubercules circulaires, aplatis, portant un épais bourgeon. Pour les récolter en vue de leur utilisation, il faut attendre qu’ils aient atteint une taille optimale, ce qui prend généralement entre trois et quatre ans. Craignant les froids trop intenses, les tubercules du konjac qui peuvent atteindre jusqu’à 30 cm de diamètre, doivent être déterrés en automne, alors que les feuilles ont complètement fané. Puis on les garde à l’abri pendant l’hiver pour ensuite les replanter au printemps.
Une pâte à nouilles
Le produit commercialisé se prépare de façon industrielle ou artisanale. Le tubercule est finement râpé, puis mélangé avec de l’eau tiède. Il faut faire attention à mettre des gants, car le contact avec la plante provoque des irritations dues à la présence de petits cristaux d’oxalate de calcium, comme c’est le cas chez tous les membres de la famille des aracées. On laisse reposer une heure, puis on malaxe fortement la masse, qui devient collante. On ajoute ensuite une solution alcaline d’hydroxyde de calcium ou chaux éteinte. Il reste à pétrir rapidement jusqu’à ce que l’on puisse former progressivement une grosse boule. On laisse encore reposer une vingtaine de...
minutes dans un récipient, puis on coupe en morceaux que l’on fait cuire entre trente à quarante minutes. La pâte peut ensuite être extrudée pour donner des nouilles. Un kilo de konjac cru permet d’obtenir environ quatre kilos de pâte. Il est fréquent d’ajouter, pendant la fabrication, des algues hijiki, ce qui lui confère une odeur de mer.
Le konjac fait partie intégrante de la cuisine japonaise. Il est présent sur les rayons de tous les supermarchés du pays et, çà et là, surtout à la campagne, de petits fabricants vendent leur production dans de minuscules échoppes, blotties au bord des rues. Le konnyaku, de son nom nippon, se présente le plus souvent comme des blocs rectangulaires blancs ou bruns d’environ 250 grammes, soigneusement emballés dans du plastique. On le rencontre aussi sous forme de nouilles de calibre divers, connues sous la dénomination de shirataki.
Alors que la plupart des tubercules alimentaires renferment de l’amidon, source essentielle d’énergie, le konjac, lui, est constitué principalement de glucomannane. Cette molécule particulière, composée de mannose et de glucose peut absorber jusqu’à cent fois son volume d’eau en donnant un gel compact. Le konjac n’est pas digéré par notre organisme : il remplit l’estomac et coupe la sensation de faim sans apporter de calories. C’est pourquoi, il est considéré comme un aliment miracle en Occident, où manger sans prendre de poids est le rêve de toutes les femmes et de beaucoup d’hommes.
Texture molle et croquante
Au Japon, où la majorité de la population est mince, le konnyaku est consommé pour se nettoyer l’intestin. Il est censé capturer les toxines et permettre de les éliminer. C’est une source extrêmement riche de fibres solubles qui contribuent à réguler le transit. Il agit, par ailleurs, comme un probiotique en alimentant la flore bactérienne intestinale. On lui prête également la vertu d’aider à normaliser la glycémie et le taux de cholestérol sanguin.
Le goût du konjac est assez neutre et sa texture particulière : à la fois molle et croquante. Les premières bouchées surprennent… Pour l’apprécier, les Japonais l’accommodent avec d’autres ingrédients. C’est d’ailleurs indispensable pour équilibrer son régime, puisqu’il n’apporte ni vitamines ni minéraux. Les blocs de konjac sont coupés en morceaux de la taille souhaitée et les shirataki sont cuisinés comme des pâtes. On les mélange avec des légumes verts − épinards, brocolis, plantes sauvages − et on les saute à la poêle, on les prépare en gratin ou on les accompagne d’une sauce. Et bien sûr, de nombreuses recettes japonaises permettent d’accommoder de façon « authentique » ce curieux produit. Parmi d’autres préparations, on le mange avec une sauce à base de miso (pâte de soja fermentée) et c’est un ingrédient de base de l’ oden, le « pot-au-feu » japonais. À découvrir sans préjugé !
Répandu en Asie
Le konjac (Amorphophallus konjac) est un cousin des Arum. Originaire d’Asie du Sud-Est, il est cultivé en Chine, au Japon et en Indonésie. En Corée, ce dernier est consommé à la comme le taro (Colocasia esculenta). Dans les pharmacopées asiatiques, le konjac préparé est crédité de propriétés médicinales contre la toux, les brûlures et les troubles intestinaux.
Des éponges exfoliantes
Le konjac est à la mode pour ses vertus alimentaires, mais aussi pour les curieuses éponges que l’on en obtient en congelant un bloc de konjac pendant la nuit, puis en l’exposant au soleil toute la journée et en répétant ce processus pendant une dizaine de jours. Ces demi-sphères creusées d’une multitude de petits trous ressemblent à des blocs de lave. Telles quelles, elles sont dures et rugueuses et l’on doit les faire tremper dans l’eau chaude, puis légèrement les essorer, avant de les utiliser. Les éponges de konjac sont réputées nettoyer en profondeur la peau, quelle qu’en soit la nature. Elles retireraient l’excès de sébum des peaux grasses, hydrateraient celles qui sont sèches, élimineraient les bactéries responsables de l’acné et soulageraient les inflammations.
Plus d'informations sur le site de l'auteur : https://couplan.com/