D'Adanson au baobab
Le baobab, comme de nombreuses autres plantes, porte un nom latin dérivé de l'auteur qui l'a fait connaître, Adanson. Mais ce dernier a aussi joué un rôle dans la diffusion du nom vernaculaire, provenant de l'arabe.
Le baobab, cet arbre dont la silhouette et le gros tronc cylindrique sont si typiques des paysages d'Afrique, de Madagascar et d'Australie, compte huit espèces différentes dont les populations locales font de multiples usages, employant le tronc comme une réserve d'eau, l'écorce comme fibre, les feuilles comme fourrage et les fruits et graines pour l'alimentation. Sans parler des vertus médicinales de toutes ces parties (des fruits contenant de puissants antioxydants et des feuilles aux propriétés antidiabétiques). Le nom « baobab » dérive de l'arabe. C'est le médecin et voyageur italien Prospero Alpini (1553-1617) qui, à son retour d'Égypte, le fit passer dans les langues européennes. Au départ, le terme était rare et ne désignait que le fruit de l'arbre. C'est seulement à partir du milieu du XVIIIe siècle qu'il s'est appliqué à l'arbre entier et, du même coup, a commencé à se populariser en français. L'auteur de ce changement fut un autre voyageur, français quant à lui : Michel Adanson.
Ce naturaliste natif d'Aix-en-Provence avait suivi des cours de botanique au Jardin du Roi (actuel Muséum...
d'histoire naturelle de Paris) auprès d'un des plus grands spécialistes de l'époque, Bernard de Jussieu (1699-1777), avant d'entreprendre un voyage au Sénégal où il séjourna de 1748 à 1754. Il s'y livra à d'intenses études sur la faune et la flore et collecta de nombreux échantillons qu'il fit parvenir à des savants parisiens. De retour en France, il fut salué pour la valeur de ses travaux et élu à l'Académie royale des sciences en 1759. Il entreprit alors un ouvrage de botanique, Les Familles des plantes (1763), qui proposait une nouvelle manière audacieuse de classer les végétaux, mais dont l'originalité ne fut reconnue qu'au XXe siècle. Il consacra le reste de sa carrière à la préparation d'un monumental ouvrage d'histoire naturelle en 27 volumes qu'il ne parvint jamais à publier.
La majeure partie de ses recherches au Sénégal resta donc inédite, à quelques exceptions près, dont un récit de voyage, une description des coquillages du Sénégal et un mémoire paru en 1761, décrivant très précisément le baobab. Mais à cette date, la plante était déjà bien connue des botanistes, précisément grâce à toutes les données que, dès l'époque de son voyage, Adanson avait envoyées à ses collègues parisiens. Ce n'était donc que justice que Bernard de Jussieu honore son élève en donnant à cet arbre le nom de genre latin Adansonia. Jussieu ne publia pas ce nom, mais il le signala dans une lettre à son collègue suédois, Carl von Linné, le fondateur de la nomenclature scientifique officielle encore en vigueur de nos jours. Ce dernier suivit la recommandation de son ami Jussieu et reprit le même nom dans son Species plantarum de 1753, puis dans son Systema naturæ en 1759, avant même la parution du mémoire d'Adanson qui, pour sa part, préférait s'en tenir au nom français, « baobab ».
Par la suite, les relations entre Adanson et Linné se dégradèrent, car les deux naturalistes n'avaient pas du tout la même conception des classifications. Mais Adansonia n'en est pas moins restée la dénomination latine officielle des baobabs.