Dossier
L’olfactothérapie pour se sentir mieux (3/3)
Forte des avancées de la recherche, les odeurs sont de plus en plus utilisées comme support de soin. Mémoire ravivée, humeur stabilisée, nausées soulagées... En milieu médicalisé ou dans le cadre d’une démarche de travail sur soi, elles contribuent à soulager en douceur les maux du corps et de l’âme.
L’olfactothérapie, un coaching par le bout du nez
Expertes en bien-être, les odeurs des huiles essentielles peuvent aussi être utilisées dans un but de travail sur soi. Développer une meilleure confiance en soi, affronter une difficulté émotionnelle, se remettre en douceur d’une période dépressive, vaincre une phobie ou une addiction, ou encore identifier et surmonter un traumatisme du passé figurent dans le champ d’action de l’olfactothérapie. Le terme a été inventé en 1992 par le thérapeute Gilles Fournil, considéré comme la référence dans le domaine. Son approche se veut psychologique et énergétique, basée sur le principe que « chacun recèle en lui les clés de la guérison ». Les huiles essentielles sont mises en relation avec différents chakras, ces roues d’énergie subtiles dispersées dans le corps, issues de la tradition ayurvédique indienne et choisies pour leur « caractère archétypal, constituant une sorte de patrimoine olfactif commun de l’humanité », rappelle Alain Faniel, disciple de Gilles Fournil, dans son livre L’olfactothérapie. Ayant identifié l’origine d’un trouble, le patient peut ainsi exprimer son traumatisme par la catharsis.
En parallèle à cette approche, d’autres techniques basées sur la recherche de développement personnel et de bien-être se multiplient. «Je différencie le travail avec les odeurs de l’approche psychologique. Je me situe dans la relation d’aide et je ne fais pas de diagnostic médical», précise de son côté Guillaume Gérault, aromatologue à Boulogne-Billancourt et coauteur du Guide de l’olfactothérapie. « Je cherche à trouver la bonne huile essentielle pour la personne, je l’associe à un travail d’ancrage par le biais de la visualisation et de la relaxation. La personne repart avec un stick imprégné et pourra s’en servir chaque fois que le besoin se fera ressentir par rapport à sa problématique.» Pour aider une femme d’affaires débordée qui n’arrivait pas à s’occuper de ses enfants, l’expert explique avoir travaillé avec l’huile essentielle de basilic, ce qui lui a redonné de l’allant. «Un autre a aussi pu gérer le stress lié à une course grâce à une synergie pin, ylang-ylang et curcuma », précise l’aromatologue qui reçoit une clientèle hétéroclite de sportifs, d’artistes et de chefs d’entreprise.
À Bruxelles, Catherine Cianci, aromathérapeute, fondatrice de Terre d’Aroma, pratique de son côté de «l’aroma-coaching». Formée en aromathérapie et certifiée en coaching, elle associe ses deux passions en une approche très pragmatique. Elle détermine avec son client un objectif orienté vers le futur, les huiles essentielles servant de support pour dissoudre les blocages et les croyances négatives que la personne entretient sur elle et qui l’empêchent d’y arriver. « En séance, le but est de débrancher le mental. La personne est invitée à sentir plusieurs...
odeurs, en aveugle. Je privilégie toujours le travail avec une odeur aimée, ce qui met la personne en confiance et la situe dans un cadre plaisant», détaille-t-elle.
Les olfactothérapeutes accordent une grande importance à la dimension subtile et symbolique des essences, indissociable selon eux de leurs vertus psycho-émotionnelles et biochimiques. « Avec les huiles essentielles, on travaille dans une dimension fine. On se situe sur le plan de l’esprit. Elles sont issues d’un processus alchimique de transformation, sous l’action du feu et de l’eau. », précise Elske Miles, aromathérapeute et formatrice, coauteur de La Phyto-énergétique. «On retrouve cette dimension dans l’approche anglaise de l’aromathérapie, mais aussi germanique, avec l’apport de Goethe notamment », explique-t-elle. Ainsi, suivant les principes des connaissances traditionnelles en lien avec la loi des Signatures, chaque plante peut entrer en résonance avec la problématique particulière de la personne, l’intuition et l’expérience de l’olfacothérapeute devant guider pour identifier la bonne correspondance. Thérapie douce encore expérimentale, l’olfactothérapie demeure confidentielle, bien qu’attirant un public curieux, en quête de solution alternative de bien-être. Capable de véhiculer un vrai changement positif, et ce, en seulement quelques séances, elle demande bienveillance et références sérieuses de la part du thérapeute, le travail en olfactothérapie pouvant réveiller des souffrances émotionnelles enfouies. «L’odeur agit sur nous sans limites, autrement dit, nous plongeons en elle », rappelle le psychiatre allemand Hubertus Tellenbach. Malgré de meilleures connaissances scientifiques, l’odorat demeure mystérieux à bien des égards. L’action des odeurs sur le corps et l’âme n’a pas encore livré tous ses secrets... Une seule certitude cependant, elles nous mènent par le bout du nez !
Huile essentielle précieuse
Romarin à cinéole (Rosmarinus officinalis CT cinéole).
Stimulant la mémoire, l’attention, la vigilance, il aide à se concentrer et est indiqué en cas de surmenage intellectuel. D’un point de vue énergétique, il donne de l’élan et de la force. Il s’associe bien avec le citron (Citrus limonum).
La science progresse
Nous, la lavande et les autres
Les effets en olfaction de l’huile essentielle de lavande ne cessent d’étonner les chercheurs. Si on sait que l’un de ses composants, l’acétate de linalyle, peut apaiser et réguler le rythme cardiaque et favoriser le sommeil, une étude menée au Japon auprès de résidents de maisons de retraite a montré qu’elle pouvait aussi faire diminuer le nombre de chutes et l’agitation. Plus surprenant, elle aurait la capacité d’améliorer la vitesse et la performance des calculs mathématiques, ainsi que la concentration au travail. Des psychologues néerlandais ont montré qu’elle pouvait par ailleurs nous pousser à accorder plus facilement notre confiance aux autres. Des participants à un jeu soumis à son odeur ont ainsi été plus enclins à prêter de l’argent à leurs camarades.
À faire
Séance d’auto-olfactothérapie maison
1. Commencez par déterminer un objectif de mieux-être : être plus calme, mieux dormir, être plus concentré, plus créatif, d’humeur plus légère...
2. Choisissez ensuite une huile essentielle qui vous inspire en fonction de cet objectif. Sélectionnez- la de préférence issue d’une distillerie artisanale, à la qualité olfactive supérieure.
3. Asseyez-vous ou allongez-vous confortablement, fermez les yeux, puis approchez le flacon – ou un mouchoir imprégné de 2 gouttes d’huile essentielle – de vos narines. Inspirez en conscience, lentement, en comptant jusqu’à 5. Restez poumons pleins un instant, puis expirez en comptant jusqu’à 5. Faites cela 5 fois de suite.
4. Puis, pendant les minutes qui suivent, tout en gardant le flacon à portée de nez en respirant tranquillement, portez attention à vos ressentis : est-ce une odeur qui monte, qui descend ? Se pose-t-elle dans votre nez, dans vos poumons ? Provoque-t-elle des chatouillements, des picotements dans votre corps, et où ? Vous vient-il des évocations de couleur, de souvenir ?
5. Vous pouvez ensuite visualiser intérieure- ment une scène symbolisant votre objectif de mieux-être tout en continuant de respirer tranquillement au flacon.
6. Une fois votre huile essentielle ainsi investie, vous pourrez l’utiliser au moment voulu, en rapport avec votre objectif initial, en la respirant directement au flacon ou en versant quelques gouttes sur un mouchoir.
La science progresse
Des diffusions aromatiques pour les malades d’Alzheimer
La maladie d’Alzeihmer est un champ de recherche important pour l’aromathérapie olfactive. Déjà une dizaine d’études montrent l’apport des huiles essentielles pour cette pathologie. Ainsi, au Japon, des chercheurs ont observé que la diffusion d’huile essentielle de romarin et de citron le matin ainsi que d’une synergie lavande et orange le soir dans les chambres améliorait au bout de 28 jours la capacité de formuler des idées abstraites et le sens de l’orientation des patients. En France, une première étude à grande échelle a démarré dans trois hôpitaux de l’Assistance publique, visant à mesurer l’impact de diffusions aromatiques sur les troubles du comportement et du sommeil de ces personnes. Une autre étude à Nice, le projet SafEE, menée au sein du centre mémoire de ressources et de recherches (CMRR) du CHU vise, entre autres, à évaluer l’impact de la diffusion d’huiles essentielles sur le comportement, la cognition et la motricité des malades d’Alzheimer.
Stimuler son odorat
Non entretenu ou trop sollicité, l’odorat peut, comme les autres sens, s’amenuiser. On en prend soin en évitant de multiplier les ambiances odorantes autour de soi et sur soi et en utilisant de temps à autre des produits de ménage et de soin neutres. Attention aux parfums de synthèse : leurs molécules chimiques lourdes ont tendance à saturer le nez. Pour développer son odorat, il faut faire des promenades odorantes, en campagne ou en ville. Laissez-vous guider par votre nez et analysez les fragrances senties. On peut mettre les odeurs rencontrées en mots et en images dans un carnet. Attention à ne rien avoir en bouche quand vous humez une odeur. En raison du phénomène de rétro olfaction et du lien goût odorat, la perception pourrait en être modifiée.