Le pissenlit : bien plus qu’une détox
Impossible à confondre avec une autre plante, le pissenlit (Taraxacum officinale) nous éblouit dès le début du printemps avec son étonnante floraison jaune d’or. Il s’offre pourtant à nous une bonne partie de l’année, alliant quantité et qualité, tant sur le plan alimentaire que médicinal. Son nom même est très évocateur d’une de ses propriétés. Il comble les abeilles de son précieux nectar et amuse les enfants qui soufflent sur la fameuse boule plumeuse de ses graines. Autant d’arguments en faveur d’une petite ou grande place dans nos jardins !
Au jardin
Plante vivace surnommée « dent de lion » du fait de la forme très découpée de ses feuilles, le pissenlit pousse partout, car il n’est pas exigeant. Pour l’introduire au jardin, il pourrait suffire de prélever quelques spécimens dans la nature. Mais ce n’est pas chose aisée, car la racine pivotante du pissenlit est généralement profondément enfoncée dans la terre. Le mieux est de repérer les boules plumeuses et ensuite de prélever les graines mûres en coupant le pédoncule.
Séchez les graines à l’ombre puis enlevez les aigrettes avant de les stocker dans du papier kraft jusqu’au moment du semis. À défaut, il existe dans le commerce des graines de variétés améliorées qui présentent l’avantage d’un feuillage plus fourni.
Le semis s’effectue de mars à fin juin directement en place dans un sol ameubli sur quelques centimètres afin de faciliter le cheminement de la future racine pivotante. Le plus simple est de disposer 2 à 3 graines en poquet tous les 12 à 15 cm. Recouvrir légèrement de terre. Surveillez l’arrosage, car le sol doit être maintenu légèrement humide. Éclaircir en gardant le plant le plus vigoureux par emplacement.
Rustique, le pissenlit n’a pas besoin du jardinier pour pousser. Installez-le dans un petit coin tranquille du jardin, pas trop près d’autres légumes-feuilles dont il pourrait ralentir la croissance. En revanche, près des pommes de terre, il permet d’éloigner les doryphores.
Tout est bon dans le pissenlit !
Le moment venu, tout se récolte sur le pissenlit. Les feuilles sont de préférence prélevées au tout début du printemps pour une dégustation crue en salade, car ensuite elles durcissent. Pour un usage médicinal ou alimentaire, on les cuit par exemple dans des soupes, et la récolte peut se faire toute l’année. Si l’amertume des feuilles vous gêne, il suffit de les blanchir. Pour cela, quelques jours avant la récolte, couvrir les pieds de pissenlit avec des pots ou un tas de feuilles mortes. La récolte des racines s’effectue en mars...
ou septembre octobre pour une concentration plus riche en principes actifs, notamment l’inuline, connue pour ses bienfaits sur le microbiote. Après lavage des racines, découpez-les en rondelles fines et procédez au séchage à l’air ou à la chaleur d’un four (déshydrateur). Stockées dans du papier kraft, elles se conserveront des années.
À l'atelier
La décoction de racines de pissenlit
La décoction de racines de pissenlit présente un intérêt thérapeutique certain, car elle permet d’extraire la majorité des principes actifs. Il s’agit notamment de l’inuline et des lactones sesquiterpéniques, pour l’effet diurétique qui est synergisé par la richesse en potassium. Et d’ailleurs, grâce à ce dernier, l’effet diurétique du pissenlit s’exerce sans déperdition de ce minéral dans l’organisme, contrairement à d’autres diurétiques.
1. Dans une casserole en inox, mettre 10 g de racines de pissenlit séchées que vous aurez préalablement réduites de manière à obtenir des morceaux d’environ 2,5 mm. Cette fragmentation supplémentaire favorise une surface de contact majorée entre l’eau et la plante et donc un rendement optimal de la concentration en principes actifs.
2. Ajouter de l’eau froide, à raison d’un demi-litre pour 10 g de plante, soit une concentration de 2 %. Rappelons qu’une tisane se prépare idéalement avec une eau de source peu minéralisée et pure.
3. Monter doucement en température jusqu’à ce que l’eau soit frémissante. Couvrir et maintenir l’ébullition douce durant 10 à 15 minutes.
4. Retirez du feu et laissez refroidir la décoction pour la rendre buvable. Filtrez.
Posologie
Elle varie en fonction des indications. Pour soutenir les fonctions hépato-biliaire et rénales, boire 1 à 3 tasses par jour, de préférence avant les repas. Pour l’action dépurative globale de l’organisme, notamment au sortir de l’hiver, à chaque changement de saison, ou en adjuvant dans les maladies chroniques de la peau (eczéma), il est recommandé de boire entre 75 cl et 1 litre de décoction par jour, en cure de 3 semaines. Pour rappel, la tisane se conserve 24 heures après filtration. Si l’on préfère boire chaud, il faudra réchauffer uniquement la quantité que l’on s’apprête à boire afin de préserver la qualité de la préparation.
Côté cuisine
Les feuilles de pissenlit sont riches en vitamines (A, B1, B2, C, D et K), en minéraux (dont le fameux potassium) et acides aminés. Alors, ne vous privez de la fameuse salade que ses jeunes feuilles fournissent au printemps, servie avec de l’huile d’olive et du vinaigre balsamique pour adoucir l’amertume. Elle arrive à point pour participer à la dépuration du corps au sortir de l’hiver. Quant aux fleurs, riches en caroténoïdes, elles peuvent se consommer à l’état de boutons pour leur goût de noisette.
Autres préparations
Nettoyer tous les émonctoires
Vous pouvez mélanger à parts égales feuilles et racines de pissenlit. Dans ce cas, les feuilles seront incorporées à la fin de la décoction et infusées un temps supplémentaire avec les racines pendant 10 minutes. Cette option délivre une action diurétique supérieure et sera mise à profit en cas de rétention d’eau ou d’engorgements des tissus. Le pissenlit s’associe aussi admirablement avec la bardane (Arctium lappa L.) et la pensée sauvage (Viola tricolor L.), en particulier pour un effet « nettoyant global » de tous les émonctoires de l’organisme, au printemps et à l’automne, là aussi en cures de 3 semaines.
Ce que dit la science
Pas seulement diurétique
Remarquable pour son action diurétique, le pissenlit agit sur l’ensemble du tube digestif. Il ranime l’appétit, augmente la sécrétion et l’écoulement de la bile en stimulant le foie paresseux. En purifiant le sang, il nettoie l’organisme « encrassé » et favorise l’élimination des toxines accumulées dans le corps. Il facilite l’élimination des calculs biliaires et rénaux. Enfin, il soulage les ballonnements douloureux et remédie à la constipation. Tout ceci fait du pissenlit un candidat idéal pour les cures de détoxication des intersaisons ou dans les traitements de certaines maladies chroniques (eczéma, rétention d’eau, terrain arthrosique, cystites chroniques, etc.). La médecine chinoise souligne ses propriétés antioxydantes, antivirales (rhumes, bronchites), anti-inflammatoires et hépatoprotectrices. Tout récemment, les propriétés anticancer d’un extrait aqueux concentré de racines de pissenlit ont été sérieusement évoquées par une équipe canadienne. Et des chercheurs allemands étudient l’action d’un extrait alcoolique de racine de pissenlit sur des cellules cancéreuses du sein.