La brunelle panse vos plaies
Les Anglais l’appellent « heal all », celle qui guérit tout. Un nom qui vous paraîtra peut être un peu prétentieux. Mais apprenez à la connaître, et vous verrez que cette discrète lamiacée aux fleurs violettes excelle pour soulager les petites coupures et blessures de tous les jours. De plus, elle est largement sous-utilisée au jardin, où elle y a pourtant toute sa place en tant que plante couvre-sol. Christophe Bernard, naturopathe herbaliste, à retrouver sur son blog www.altheaprovence.com
Un puissant antioxydant
Le jardin médicinal doit avant tout être utile et pratique au quotidien. La brunelle est la plante idéale à avoir à portée de main car elle calme rapidement l’inflammation des plaies, coupures, griffures ou érythèmes. Elle s’utilise principalement en cataplasme. Les parties aériennes fraîches et écrasées fournissent un substrat mucilagineux, adoucissant, désinfectant et astringent, permettant une résolution rapide du problème.
Il en est de même pour les problèmes buccaux. En bain de bouche, la brunelle calme l’inflammation des gencives. Ses propriétés anti-Herpes simplex sont d’ailleurs aujourd’hui bien établies. Prise en infusion ou en gargarisme, elle soulage aussi les maux de gorge. Contrairement à certaines médicinales, son infusion est douce, agréable à boire, et sera donc tolérée par les palais les plus difficiles.
Grâce à sa teneur en acide rosmarinique (elle en contient 5 %, une forte concentration), la brunelle est l’un des antioxydants les plus puissants dans le monde des plantes. Les antioxydants permettent de protéger nos cellules contre le stress oxydatif accentué par la vie moderne (pollution, cigarette, pesticides...), qui entraîne un vieillissement prématuré de nos cellules. Une simple infusion journalière agira comme bouclier protecteur contre les radicaux libres destructeurs.
Au jardin
La brunelle se trouve rarement en jardinerie. Il faut donc la faire pousser de graines. Celles-ci ont besoin d’une période de stratification à froid. En d’autres termes, c’est le passage du froid qui va permettre à la graine de se réveiller. Plantez-la à l’automne en bac de plantation que vous laisserez dehors, à l’abri des intempéries. Plus simplement, au printemps, placez les graines dans un peu de sable tamisé très finement et humidifié, puis placez le tout dans un sac en plastique au réfrigérateur et attendez deux semaines. Extrayez les graines du sable et plantez-les en bac en les recouvrant à peine de terre et en tassant bien. Gardez humide jusqu’à germination.
Mi-ombre mi-soleil
Repiquez les plantules en godet individuel. En parallèle, commencez à travailler un endroit du jardin en exposition mi-ombre mi-soleil avec une terre riche. Si comme moi, vous êtes un adepte du paillage, vous...
aurez recouvert l’endroit de 30 cm de paillis ou de broyat végétal à l’automne a n d’enrichir la terre sans avoir besoin de la retourner. Positionnez les plants à distance de 20 cm les uns des autres. Lorsque les plantes grandiront, elles se rejoindront pour former un couvre-sol. Attention, la brunelle ne supporte pas la concurrence du chiendent ou d’autres herbes dites « mauvaises ». Assurez-vous donc que la zone qu’elle va coloniser est relativement propre: un désherbage manuel sera obligatoire avant de commencer à planter. Toute la partie aérienne est médicinale, mais c’est surtout la fleur qui nous intéresse. Afin de maximiser la production sans pour autant diminuer la richesse en constituants, soyez généreux en compost. Placez-en une bonne couche autour de chaque plante : il sera intégré au sol tout en douceur avec les pluies et les arrosages successifs. Ne soyez pas non plus avare en eau: la brunelle apprécie des arrosages fréquents et une terre humide.
Ramasse et séchage
• À l’ouest, nous cueillons la fleur fraîche pendant sa oraison et nous la faisons sécher entière a n d’en faire des infusions pour les problèmes de peau (en compresse) ou les problèmes buccaux (gargarisme, bain de bouche).
• À l’est, en médecine chinoise, on l’appelle «xia ku cao» et on utilise ses fleurs sèches. On les cueille brunies à l’automne. Les études nous disent que ce séchage « sur pied » permet d’optimiser la quantité de polysaccharides de la plante, qui ont des propriétés adoucissantes, réparatrices et stimulantes du système immunitaire. Des millénaires de tradition, ça a du bon !
À l’atelier
Cataplasme de brunelle fraîche
Un cataplasme est tout simplement une préparation de plante assez pâteuse pour être appliquée sur la peau dans un but thérapeutique. L’avantage de la brunelle fraîche est qu’elle est mucilagineuse et pourra donc se travailler en pâte assez facilement. Pour faire ce cataplasme, vous aurez besoin d’un petit pilon.
1.Cueillir une poignée de feuilles et de fleurs de brunelle (ou que les feuilles, selon la période). Les placer dans votre pilon.
2.Pilonner a n de faire une pâte. Si la pâte est trop sèche, ne pas hésiter à rajouter un tout petit peu d’eau chaude a n de bien faire ressortir le jus de la plante. Ne pas la tremper, ou le liquide qui reste au fond du pilon sera perdu.
3.Prendre une grosse pincée de cette pâte et la placer directement sur la peau à l’endroit enflammé (griffures, brûlures et égratignures du quotidien). Recouvrir d’une gaze et envelopper d’une bande pour maintenir en place, ou mieux, placer la pâte et recouvrir de deux ou trois tours de lm plastique de cuisine. Pas très écologique, certes, mais très pratique pour les enfants qui auront vite fait d’envoyer balader gaze et bandage.
4.Renouveler l’application une fois que la pâte est sèche, idéalement deux à trois fois par jour. En général, un jour ou deux suffisent à régler le problème.
Efficace contre l’herpès
Si vous avez un herpès buccal (bouton de fièvre) qui commence à démanger juste avant son apparition, écrasez les feuilles dans un pilon et trempez simplement votre doigt dans le liquide vert obtenu. Appliquez sur la zone dès les premières démangeaisons plusieurs fois par jour. Prenez aussi une infusion de brunelle deux à trois fois par jour pour stimuler le système immunitaire.
Almanach de mai
Le paillis, ou mulching, est une méthode que j’emploie sans retenue dans mon jardin car il remplit de nombreuses fonctions :
• Il empêche certaines herbes (chiendent en particulier) d’envahir les plantations.
• Il stoppe l’évaporation de l’eau.
• Il nourrit la terre d’une manière respectueuse sans perturber l’écosystème de bactéries et d’insectes.
Soyez généreux, épandez 30 cm de feuilles, branchettes et autre broyat végétal autour de vos plantes. Les tontes de gazon sont aussi bénéfiques mais réduisent rapidement en volume alors que les broyats de branches tiennent beaucoup plus longtemps. Sachez que les d’échetteries vertes donnent un broyat de bonne qualité. Certains disent qu’il peut propager les maladies, mais je n’ai jamais eu de problèmes de ce côté-là. Chaque printemps, appliquez une nouvelle couche pour nourrir la terre depuis la surface. Ce broyat se décompose lentement, surtout en automne et en hiver, et devient l’abri de multitudes d’insectes, bactéries et champignons qui vont contribuer à la richesse de votre sol. Plusbesoin de retourner la terre. Vous pouvez aussi amener des branches en décomposition de la forêt a n d’introduire des bonnes bactéries dans votre terre qui feront of ce de probiotiques pour le jardin !
À la sortie de l’hiver, allez gratter sous le broyat en décomposition et observez un sol noir, riche et vivant. Au printemps, vous pouvez tout simplement faire un petit trou au travers du broyat afin d’atteindre la terre compostée et planter vos nouvelles médicinales. Je vous garantis qu’elles vous le rendront bien !