Plantes et Santé Le magazine de la santé par les plantes

Ils ont donné vie à l’aromathérapie

René-Maurice Gattefossé, chimiste et parfumeur, père de l’aromathérapie moderne.

Spectaculaire. C’est le mot pour qualifier le boom de l’aromathérapie ces dernières années. Pour se mettre au parfum de cette médecine naturelle et la rendre accessible au grand public, six personnalités emblématiques ont recherché, formulé et vulgarisé cette science complexe.

Les débuts de l’aromathérapie remontent aux années 1930. Fondé sur le travail faramineux de plusieurs personnes, l’usage des huiles essentielles à but thérapeutique est désormais largement démocratisé un peu partout dans le monde. Aux États-Unis, ce sont plusieurs milliards de dollars de chiffre d’affaires qui sont engendrés par le secteur chaque année. Derrière cet engouement, on trouve des chercheurs, des médecins, des chimistes, des pharmaciens et des auteurs ayant dédié leur carrière à cette science aussi étonnante que complexe.

Par leurs approches singulières, leur lien avec la nature et leur intuition, ces hommes et ces femmes ont participé – et participent encore – à l’évolution d’une telle médecine alternative, afin de la rendre accessible au grand public et de la voir reconnue par le monde médical. Si l’école anglo-saxonne a réservé son usage des huiles à une pratique « plaisir et bien-être », l’aromathérapie francophone, elle, s’est appliquée à prouver la remarquable efficacité médicale des huiles essentielles. Une mission difficile, car aussi bénéfiques qu’elles soient pour le plus grand nombre, leur puissance et les conséquences d’un manque de vigilance quant à leur utilisation inquiètent.

Suite au décès, le mois dernier, de Danièle Festy, figure importante et marquante du milieu de l’aromathérapie, nous avons souhaité rendre hommage à d’autres maîtres en la matière. Entre découvertes exceptionnelles et combats acharnés, zoom sur l’œuvre de six ambassadeurs ayant su déceler le potentiel des huiles essentielles et marquer, in fine, l’histoire de cette science des plantes.

René-Maurice Gattefossé

En 1918, l’histoire de l’aroma débute par un accident : René-Maurice Gattefossé, alors chimiste et parfumeur, se brûle la main lors d’une explosion dans son laboratoire. Par réflexe, il la plonge dans un récipient d’huile essentielle de lavande vraie. Surpris par le soulagement et la cicatrisation rapide de la plaie, il se met à étudier les propriétés antibactériennes des huiles essentielles.

C’est lui qui, en 1928, est à l’origine du mot « aromathérapie », autrement dit « soigner avec les parfums ». Peu après, il publie un ouvrage du même nom destiné aux scientifiques, dans lequel il décrit la relation entre la structure biochimique de l’huile essentielle et son activité. Nous sommes en 1931 et l’aromathérapie prend son envol.

Jean Valnet

On aime le surnommer « Docteur Nature ». Jean Valnet est de ces hommes ayant consacré leur vie aux soins. Ce diplômé de médecine et chirurgien de guerre utilisa les essences aromatiques sur certains blessés. Dès les années 1950, il dénonce les « dangers du tout chimique, désastreux pour (…) la santé des hommes », en pointant du doigt l’abus de médicaments. Très vite, il s’attache à prouver scientifiquement les vertus cliniques des huiles essentielles.

Il sera d’ailleurs le premier à expliquer leurs propriétés au grand public dans un ouvrage édité pour la première fois en 1964 (lire ci-dessus). Jean Valnet a également cocréé l’« aromatogramme », un outil qui mesure l’action antibactérienne des huiles essentielles. Considéré comme le père de la phyto-aromathérapie moderne, il a toujours cherché à faire valoir cette science. Elle perdure au sein du laboratoire Cosbionat, créé en 1981 par son élève Marie-Thé Tiphaigne, qui met à disposition toutes les préparations du Dr Valnet.

Daniel Pénoël

En 1965, Daniel Pénoël s’intéresse à l’écologie et souhaite devenir ingénieur agronome. Sa fascination pour l’être humain le dirige finalement vers la faculté de médecine. Frustré par les limites des soins accordés aux pathologies infectieuses, il s’intéresse de plus près aux huiles essentielles.

En 1985, sa soif de découverte l’emmène en Australie. C’est là-bas, en 2004, alors qu’il tente en vain de soigner les problèmes respiratoires de son épouse avec des huiles classiques, que son regard sur l’aroma bascule. Son intuition se porte sur Fragonia et Kunzea, deux huiles méconnues appliquées sur sa femme. Le soulagement est immédiat. Curieux, il étudie alors la composition de ces HE et découvre une structure chimique harmonieuse unique au monde.

Apparence, biotope, fragrance, les deux huiles se complètent à la perfection et ont un impact énergétique puissant sur les êtres vivants. Frappé par cette découverte, il se détache du modèle purement pharmacologique des huiles et lance une approche plus large de l’aroma.

Il nomme cette nouvelle manière d’observer la matière et la vie « l’aromathérapie quantique ». « Une HE n’est pas un produit chimique, c’est un être vivant qu’on peut comparer à un génie », affirme-t-il. Une vision intégrative de la santé qu’il vulgarise via son laboratoire Osmobiose, par l’enseignement et par des ouvrages devenus des classiques.

Pierre Franchomme

Fils d’herboristes, Pierre Franchomme est tombé très jeune dans la marmite des potions végétales. Après des études de pharmacie et de naturopathie, c’est finalement dans la recherche que cet homme au bagage scientifique impressionnant fait carrière. Globe-trotter avéré, il explore le monde à la recherche de nouvelles essences qu’il étudie ensuite dans ses laboratoires.

C’est ainsi qu’il met en évidence les vertus d’huiles devenues stars, telles que le ravintsara, le tea tree, l’eucalyptus radié ou encore l’immortelle. En 1975, il participe à l’avancée de la pharmacologie aromatique en introduisant la notion fondamentale de « chémotype ». Ce qui signifie qu’une plante de même variété botanique peut produire des huiles essentielles de compositions chimiques différentes selon son terroir, son climat, son sol.

L’homme ne s’arrête pas là. Estimant que la valeur thérapeutique des HE est prouvée, il milite pour qu’elles « obtiennent un statut officiel en médecine intégrative ». Autrement dit, pour que l’on ait recours simultanément à la médecine conventionnelle et alternative. En plus d’une impressionnante série de publications scientifiques, Pierre Franchomme a écrit des ouvrages fondateurs.

Il s’est également investi dans des projets humanitaires et de la formation. Depuis 2017, il dirige un laboratoire dédié aux actifs aromatiques, le Pierre Franchomme Lab, au sein duquel il prône la rigueur scientifique et la qualité des huiles essentielles.

Dominique Baudoux

Il se souvient des petites fioles chargées de liquide précieux dans l’officine de son grand-père. Après ses études de pharmacien, Dominique Baudoux reprend les officines familiales et se tourne peu à peu vers la phytothérapie. En 1991, il prend la tête d’un laboratoire, Pranarôm.

Il fait ensuite face à une traversée du désert due en partie au déremboursement des huiles essentielles par la Sécurité sociale. Il se consacre alors à l’enseignement de l’aroma auprès de professionnels, et voit défiler des personnalités comme Danièle Festy ou Aude Maillard, qui vulgariseront par la suite son savoir.

Dominique Baudoux est également l’auteur d’une quarantaine de publications scientifiques. Il finalise actuellement une découverte exceptionnelle : un mélange d’huiles essentielles associé à un antibiotique, qui annulerait l’effet de résistance constaté avec ce même antibiotique sur une bactérie de type staphylocoque doré.

« Je pourrai dire que j’ai réussi ma vie si je suis parvenu à ouvrir l’esprit du monde médical sur l’efficacité thérapeutique des huiles essentielles, confie-t-il. L’aroma est aussi une Evidence-Based Medicine, autrement dit, une médecine s’appuyant sur des preuves scientifiques crédibles. » Ce « formulateur », qui aime l’idée d’être un alchimiste, se concentre désormais sur la création d’une maison médicale naturelle.

Michel Faucon

Il se qualifie d’être « double ». Sa sensibilité est autant scientifique que littéraire, et l’on peut dire que la rigueur accompagne ce qu’il entreprend. Enfant, il distillait déjà des plantes pour en sentir les parfums. « J’ai un contact intime avec le végétal », assure-t-il.

Suite à des études pharmaceutiques, il bénéficie d’une triple expérience : hospitalière, officinale et universitaire. Son attirance certaine pour la nature et la chimie thérapeutique ne le quitte pas. Au contraire, il se met à créer des synergies personnalisées pour sa patientèle, qui vient de loin. Face à ce succès, il publie toutes ses recherches dans un ouvrage intitulé Traité d’aromathérapie scientifique et médicale.

Son savoir est désormais au service des professionnels de santé, mais aussi du grand public. Ne cessant jamais de chercher à attribuer à l’aromathérapie la juste place qu’elle mérite dans la médecine, il se met à enseigner à l’université, mais également au sein de son école Aroma Sciences. Mais, à mesure qu’il sent les flacons, il constate que certaines huiles essentielles, de compositions pourtant quasiment identiques, provoquent un impact thérapeutique différent sur ses patients.

Il développe alors une théorie plus « fine, sensorielle et sensible » de l’aroma. Si les apports de l’olfaction longue des huiles dans ses aspects subjectifs le questionnent encore, il s’emploie à y apporter des fondements méthodologiques solides. « Je ne suis ni un sorcier ni un gourou », rappelle-t-il. Avant tout, Michel Faucon est habité par cette rage de guérir. Son projet ? Concevoir des « compléments thérapeutiques aromatiques » destinés à réhumaniser les protocoles hospitaliers.

Danièle Festy

On se souvient de cette pharmacienne comme d’une femme passionnée. Son officine n’avait rien d’un lieu ordinaire. On y trouvait davantage de compléments alimentaires et de plantes que de médicaments. Son ouvrage phare, Ma Bible des huiles essentielles, s’est vendu à plus de 1 million d’exemplaires et l’a propulsée, en 2007, sur le podium des spécialistes en aroma.

Guider les utilisateurs « au bon emploi d’un matériel raffiné et subtil », tel était le credo de cette remarquable vulgarisatrice, disparue le mois dernier. Avec près de 2 millions de livres vendus dans le monde entier, sa mission est remplie.

 

Des spécialistes qui enseignent

Ces personnalités s’emploient à former aussi bien les professionnels de santé que le grand public.

 

À lire

  • L’aromathérapie exactement, P. Franchomme et D. Pénoël, éd. Roger Jollois
  • À la pointe de l’aromathérapie, P. Franchomme, éd. Tredaniel La Maisnie
  • Aromathérapie - Traitement des maladies par les essences des plantes, J. Valnet, éd. Maloine (11e et dernière édition en 1989)
  • L’aromathérapie - Se soigner par huiles essentielles, D. Baudoux, éd. Amyris
  • L’aromathérapie quantique, de D. Pénoël, éd. Guy Trédaniel
  • Traité d’aromathérapie scientifique et médicale, Michel Faucon, éd. Sang de la Terre
  • Ma Bible des huiles essentielles, Danièle Festy, éd. Leduc.s
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