Élixirs floraux, un champ thérapeutique à défricher
Dans quels cas les élixirs floraux ont-ils montré leur efficacité ? Comment décrypter le message des fleurs ? Depuis que le médecin et homéopathe anglais Edward Bach a mis au point ses remèdes au siècle dernier, la recherche en florithérapie se développe tous azimuts, comme l'a illustré le dernier congrès Therapeuticum.
« Comment l'équipe du docteur Edward Bach a-t-elle prescrit ses élixirs au tout début ? C'est une des premières questions que je me suis posée », se rappelle Ricardo Orozco, docteur en médecine à l'université de Barcelone, présenté comme l'une des plus grandes autorités mondiales en thérapie florale du Dr Bach. À Autrans (Isère), dans les salles d'ateliers et de conférence des rencontres Therapeuticum, près de 250 thérapeutes expérimentés ou débutants partagent l'idée qu'il faut surtout de l'intuition pour trouver le remède le plus efficace. D'aucuns s'aventurent sur le chemin glissant de l'ésotérisme. Il est vrai que le Dr Bach s'inspira de l'homéopathie, mais aussi de la guérisseuse Hildegarde de Bingen et de Paracelse, médecin, alchimiste et théologien suisse du XVIe siècle. Depuis, la recherche fondamentale visant à mettre en place des théories et modèles explicatifs des phénomènes observables « consiste à revenir vers l'âme de la fleur », explique le thérapeute et chercheur en florithérapie Vincent Belbèze, qui élabore les élixirs andins Sylfos.
De nouvelles clés de lecture
Ainsi, il estime nécessaire de se référer aux coutumes, mythologies, sagesses et pratiques populaires ainsi qu'aux rituels spirituels. « Mes clients me disaient : “c'est magique !”. En tant que pharmacienne, ça me faisait un peu peur. Mais si la magie signifie “l'âme-agit”, ça me va », commente pour sa part Pascale Millier, fondatrice des Rencontres Therapeuticum et codirectrice scientifique et pédagogique du laboratoire Deva durant neuf ans. Et de souligner néanmoins qu'il convient de respecter le scepticisme des personnes préférant des thérapies plus concrètes.
Décrypter l'âme de la fleur
Pour apprécier la signification essentielle d'une plante, les créateurs d'élixirs floraux comme Vincent Belbèze retiennent différents critères :
- Sa forme, son geste et sa signature
- Son orientation dans l'espace, ses relations géométriques
- Sa famille botanique
- Son orientation temporelle (cycles)
- Ses relations avec l'environnement, les quatre éléments et les autres règnes de la nature
- Ses couleurs
- Ses utilisations médico-phytothérapeutiques
- Les coutumes, sagesses mythologies, pratiques populaires et rituels spirituels qui lui sont associés
Car comment expliquer l'action des élixirs floraux alors même qu'il n'y a pas de matière végétale dans ces remèdes ? « Aujourd'hui, on va plutôt chercher des réponses du côté de la physique quantique », observe Pascale Millier. L'énergie de la fleur serait véhiculée par l'eau. Mais au détour de sa conférence, le Dr Orozco ouvre une nouvelle piste de réflexion : « Il est possible que la fleur nous apporte un code d'information plutôt que de l'énergie. Comme un programme informatique qu'on remet à jour. Chaque fleur, et par conséquent chaque essence florale, émet une vibration qui active le code. Elle est un catalyseur, un canalisateur et un résonateur des principes de guérison et d'équilibre archétypaux que nous avons. Elle actualise, optimise et même répare notre schéma intérieur ». Il s'appuie sur ce qu'il nomme le schéma transpersonnel (ST) : une clé de lecture pour mettre en évidence l'action des essences florales au-delà de la dimension émotionnelle (ce que je ressens), mentale (ce que je dis que je ressens) et comportementale (ce que je fais). Ce concept, il l'a expérimenté après avoir noté, entre autres, qu'Edward Bach avait prescrit Clematis, fleur de reconnexion, pour « redonner de la vie » à la main d'un homme électrocuté et non parce que celui-ci était d'un tempérament rêveur. Willow pour la rétention, l'irritation, la rigidité et la fermentation, Hornbeam pour l'affaiblissement local, Walnut pour la coupure et l'inadaptation… La liste des ST de Ricardo Orozco invite à raisonner autrement pour traiter l'arthrose, la cellulite ou d'autres troubles physiques. « Cela fait trente ans que je travaille sur ce modèle, qui se veut pragmatique et pas interprétatif. Son utilisation ne constitue en aucun cas une alternative thérapeutique. Elle vient en complément de la florithérapie par voie orale. »
Des rails de fleurs
À la fin des années 1980, le naturopathe allemand Dietmar Krämer élabore un nouveau modèle pour prescrire les Fleurs de Bach. Selon les « rails de Krämer », celles-ci peuvent être classées en cinq fleurs extérieures en lien avec la personnalité (étoile de Bethléem, Orme, Noyer, Ajonc et Tremble), une fleur de base (Mélèze, car elle traite le manque de confiance en soi inhérent à tout déséquilibre émotionnel) et 32 fleurs intérieures organisées en 12 rails comprenant chacun une fleur de communication, une de compensation et une de décompensation. Ces trois dernières renvoient à des stades psychiques différents. Ainsi, une personne incapable de dire non évoque un mode de communication avec l'environnement de type Centaurée. Mais elle peut compenser son attitude par un rejet des autres, reflet d'un état de type Houx qui, s'il persiste, peut générer chez elle un sentiment de culpabilité de type Pin en décompensation. Un outil éclairant qui rappelle qu'une émotion peut en cacher une autre !
Des études cliniques prometteuses
« Les fleurs agissent au niveau local », défend‑il. La preuve ? Une étude publiée en 2015 a été menée à l'hôpital universitaire Arnaldo Milian de Santa Clara (Cuba) sur 43 patients atteints d'un syndrome du canal carpien léger à modéré. Pour vingt-neuf d'entre eux ayant appliqué deux fois par jour durant trois semaines une crème contenant les élixirs Vervain, Elm, Star of Bethlehem et Clematis (versus un placebo), des améliorations significatives ont été constatées à l'examen clinique. Seuls huit patients ont eu besoin d'une intervention chirurgicale. D'autres études sont référencées sur le site espagnol du groupe scientifique GC Bach (Gcbach.com/investigacion).
En France, « l'objectif est de mener des recherches dans des services de soins de support en oncologie », éclaire Pascale Millier. En attendant, une étude clinique réalisée par le laboratoire Deva auprès de 258 résidents de douze Ehpad entre 2015 et 2021 permet déjà d'observer que la prise d'élixir floraux « entraîne une diminution des doses de médicaments allopathiques, des effets indésirables, des interactions médicamenteuses, et un changement de comportement », rapporte Patricia Gautier, aide-soignante à l'Ehpad de Treize-Septiers (Vendée). Les élixirs ont été administrés au cas par cas. 90 % des résidents ont vu leurs émotions négatives diminuer, notamment la tristesse (chez 95 %) et la colère (88 %). Seuls 10 % des traitements floraux n'ont pas montré d'efficacité.
Au-delà des chiffres, les histoires touchantes dont témoignent les soignants finissent de convaincre. Comme celle de cet homme de 78 ans diagnostiqué Parkinson et Alzheimer qui, à l'aide du mélange Assistance puis Courage, put troquer le fauteuil roulant contre un déambulateur et aller visiter seul sa famille vivant à côté. « Une émotion est une réaction d'adaptation à l'environnement, note la psychologue Stéphanie Vollette. Les élixirs ont permis de garder la communication avec les patients. Ils n'ont pas ôté leurs troubles, mais apaisé les émotions auxquelles ceux-ci sont associés. » Une leçon d'humilité qui rappelle au conseiller la nécessité d'adopter une attitude ouverte, non dogmatique, quelles que soient ses attentes sur l'efficacité de la florithérapie.