Dossier
Le remède à la mélancolie (3/4)
Elle peut se manifester sous différentes formes, avoir de multiples sources et autant de conséquences différentes. La dépression, que l’on appela un temps mélancolie, est un fléau dévastateur pour la santé physique et psychique. Avec, comme corollaire, un fléau tout aussi inquiétant : les antidépresseurs. Pourtant, la phytothérapie peut se révéler un succédané idéal aux traitements conventionnels lourds.
La dépression : les autres promesses naturelles
Vaincre la dépression passe souvent par une approche plurielle, par un recours à d’autres méthodes douces. On choisira en fonction de son ressenti, de ce qui nous parle, et en privilégiant les solutions qui permettent à notre moi d’être mis sur pause.
Nous pensons tout d’abord aux élixirs floraux du Docteur Bach. Ce ne sont pas à proprement parler des produits de phytothérapie puisque leur composition et leur méthode de préparation les rapprochent plus de l’homéopathie. Mais leur action s’adresse à notre domaine émotionnel, ils trouvent donc logiquement une place dans une prise en charge globale des troubles de l’humeur, pour soulager les émotions induites ou responsables de la dépression.
Le plus connu d’entre eux est le remède de secours, ou «rescue remedy», très utilisé pour les chocs émotionnels ou les états de stress. Comme son nom l’indique, c’est un remède d’urgence, et non de fond, qui devra rapidement être remplacé par des élixirs mieux adaptés et mieux ciblés. On pourra avoir recours à Gentian en cas de cause initiale identifiée (échec, deuil), ou à Oak pour redonner du courage et de la force. Gorse semble adapté en cas de désespoir profond, ou encore White Chestnut en cas de pensées obsessionnelles épuisantes. De nombreux ouvrages existent pour vous guider, les conseillers de magasins spécialisés peuvent aussi être utiles, et bien sûr, les thérapeutes spécialisés en élixirs floraux. Le plus souvent, ils ont été formés aux élixirs du Docteur Bach, mais ils pourront aussi vous proposer des élixirs provenant de plantes australiennes. Dès que les beaux jours reviennent, vous pouvez vous tourner vers une solution unique en réalisant vous-même votre élixir floral. Comme un premier pas volontaire et personnel vers la guérison. Parcourir les jardins, la nature, en ressentant son émotion dominante et chercher la plante qui nous attire, c’était l’objectif du Docteur Bach pour ses patients.
Autre approche complémentaire, les huiles essentielles peuvent également être d’un grand secours. Leur action va agir sur l’état émotionnel, en particulier via l’olfactothérapie. Cette technique était déjà employée au XIXe siècle car on avait observé le pouvoir des odeurs sur l’état émotionnel, ce sens permettant une action directe sur les émotions, sans traitement par le conscient. Parmi les huiles essentielles employées, on peut considérer celles qui tonifient l’organisme et rétablissent l’équilibre du système nerveux comme le ravintsare, le romarin à verbénone ou le pin sylvestre (plus tonique que les deux premières). On peut penser aussi aux huiles essentielles plus calmantes et apaisantes comme le...
petit grain bigaradier, la lavande, la mandarine, le néroli, la marjolaine des jardins ou la verveine citronnée.
Notons que l’aspect olfactif est prépondérant dans le choix des huiles essentielles et que le choix intuitif du patient est un élément important. Un très mauvais souvenir associé à une odeur peut provoquer un sérieux dégoût. Mais cela reste rare. On constate toutefois qu’en choisissant certains parfums évoquant d’agréables souvenirs, l’activité bienfaitrice est fortement augmentée. Enfin, signalons que les huiles essentielles sont intéressantes aussi pour leur rapidité d’action, quasi immédiate, dans les accès d’angoisse par exemple (cf. Plantes & Santé n° 151).
Les pharmacopées traditionnelles sont aussi des sources importantes de plantes d’avenir pour la prise en charge des troubles de l’humeur. Bien souvent, cela demande une relecture des usages car la dépression est perçue différemment selon les cultures et elle n’est pas nommée en tant que telle. Dans la médecine chinoise, la mélancolie ou la dépression sont associées soit à une stagnation du qi de la rate, dominée alors par un excès de soucis, de pensées négatives, de rumination et d’inquiétude, soit à un vide de qi dans le poumon avec une dominante de tristesse, de fatigue et de pleurs. Mais la vision est plus globale, car on considère que l’émotion, trop intense ou trop longue, blesse l’organe, entretenant alors l’émotion. On parle alors de «blessure endogène causée par l’émotion », la dépression étant ainsi considérée simultanément dans son aspect émotionnel et physique.
Dans le cas d’une mélancolie durable, le cœur vient à être blessé lui aussi, entraînant des troubles de l’esprit, des palpitations et un excès de rêves. Le traitement consistera à rétablir l’équilibre du qi dans ces organes par la diététique, l’acupuncture et certaines plantes. C’est le cas de l’écorce de magnolia (Magnolia officinalis), connu comme décontracturant et anxiolytique, qui pourrait être employé dans la dépression. Quelle que soit l’approche choisie, il est clair que les solutions thérapeutiques visent à s’adapter à chacun, en fonction de son terrain, de l’intensité et de l’évolution de l’épisode dépressif.
Lutter contre l’anxiété
En externe, les HE vont cibler des symptômes autres que la dépression. Ci-dessous, l’anxiété.
À faire
• HE de mandarine verte (1 ml)
• HE de lavande vraie (1 ml)
• HE d’encens oliban (1 ml)
• HE de camomille romaine (0,5 ml)
• HE de néroli (0,3 ml)
• Compléter un flacon de 10 ml avec une HV de noisette.
Cinq respirations jusqu’à dix fois par jour, ou en roll-on jusqu’à cinq applications par jour sur les poignets. 
Lutter contre la fatigue
L’atonie est souvent associée à la dépression. Cette formule d’HE complète le traitement de fond.
À faire
• HE de petit grain bigaradier (1 ml)
• HE de marjolaine à coquilles (1 ml)
• HE de ravintsare (1 ml)
• HE de lavande vraie (1 ml)
• Compléter un flacon de 10 ml avec une HV de noisette.
Cinq respirations jusqu’à dix fois par jour, ou en roll-on jusqu’à cinq applications par jour sur les poignets.
Des promesses pour l’avenir
La meilleure compréhension de la chimie du cerveau et de l’implication des différents neuromédiateurs ouvre de nouvelles pistes. On étudie dorénavant comment les principes actifs se lient aux différents récepteurs du cerveau, ce qui permet d’explorer de nouvelles thérapeutiques naturelles. On a ainsi découvert que la grande gentiane (Gentiana lutea),en plus de son action tonique connue de longue date, agit elle aussi sur la concentration de sérotonine dans le système nerveux central. D’autres plantes connaissent des changements d’usage, comme le kudzu, ou arrow-root (Pueraria montana). Cette plante fournie une fécule utilisée comme liant et épaississant mais on lui a découvert de nouvelles vertus. Employé empiriquement pour arrêter de fumer,le kudzu s’est révélé décontractant et anxiolytique tout en luttant contre la fatigue et l’abattement. N’est-ce pas là, l’action d’un antidépresseur ?
Autoriser ou pas le kawa-kawa
Le kawa-kawa (Piper methysticum), plante originaire des îles du pacifique occidental, a démontré depuis longtemps des propriétés anxiolytique et euphorisante. Cette plante était connue dans la pharmacopée traditionnelle locale mais utilisée en dosage régulé et restreint. Malheureusement, elle a été interdite en France en 2002. En effet, son usage, très à la mode en complément alimentaire, est devenu immodéré et les premiers cas de toxicité sont apparus, avec de graves atteintes hépatiques. Bien que plusieurs spécialistes aient contesté ces résultats – les patients prenaient aussi des médicaments mauvais pour le foie –, le mal était fait. Aujourd’hui, les Polynésiens réclament de pouvoir à nouveau l’utiliser, en particulier lors de leurs fêtes traditionnelles. Comme toujours, il s’agit de déterminer le bon usage avant de montrer du doigt la toxicité de la plante.