Seed Cycling : peut-on réguler son cycle avec des graines ?
Sur les réseaux sociaux, difficile de passer à côté de cette nouvelle méthode appelée seed cycling, le cycle des graines en français. Affirmant atténuer certains désagréments liés au cycle menstruel grâce à la consommation de certaines graines, est-elle aussi prometteuse que cela ? Nous avons demandé son avis à Carole Minker, experte en fertilité.
Ces derniers mois, une méthode destinée à rééquilibrer les hormones chez la femme a été largement relayée sur des blogs et sur Instagram. Le seed cycling, littéralement « cycle des semences », consiste à consommer chaque jour des graines – lin, courge, sésame et tournesol – afin d’augmenter la production de certaines hormones féminines. En particulier, le seed cycling prétend « booster » les œstrogènes du 1er au 14e jour du cycle, puis la progestérone du 15e au 28e jour. La méthode s’adresse au départ aux femmes atteintes du syndrome des ovaires polykystiques, mais elle semble aussi plébiscitée par les femmes confrontées à des règles irrégulières, à de l’acné hormonale, à des symptômes de la ménopause, jusqu’à des problèmes de fertilité...
Le seed cycling en pratique si vous voulez le tester :
- Pendant la première moitié du cycle (préovulatoire, phase « folliculaire »), soit généralement du jour 1 au jour 14 (ou bien de la nouvelle lune à la pleine lune en l’absence de règles ou si elles sont très irrégulières) : mangez au quotidien une à 2 cuillères à soupe d’un mélange de graines de LIN et de COURGE.
- Pendant la seconde moitié du cycle (postovulatoire, « phase lutéale »), soit généralement du jour 15 au jour 28 (ou bien de la pleine lune à la nouvelle lune en l’absence de règles ou si elles sont très irrégulières) : consommez une cuillère à soupe d’un mélange de graines de SÉSAME et de TOURNESOL.
- NB : Ajoutez les graines à vos plats, à un bol de salade de fruits, de salade verte ou encore à votre soupe. Mâchez longuement les graines pour en extraire les bons acides gras.
Des graines riches en oméga-3
Dans quelle mesure ces quatre graines sont-elles susceptibles d’équilibrer le cycle féminin ? Carole Minker, docteure en pharmacie et fondatrice de Fertibébé Conseils, s’est intéressée au seed cycling : « Ces graines apportent de bons acides gras qui ont un effet anti-inflammatoire bénéfique ainsi que des oligoéléments (fer, magnésium, phosphore, zinc...) qui agissent comme cofacteurs des enzymes permettant la biosynthèse des hormones stéroïdiennes », analyse-t-elle. La spécialiste en déduit : « Je vois dans cette méthode une bonne manière, pour les femmes, d’apporter à leur organisme des oméga-3 par une routine quotidienne. » Le recours aux graines de lin se justifie également car « ce végétal renferme des lignanes aux propriétés phytoestrogéniques », précise la pharmacienne. Avec cependant un bémol : l’action des phytoestrogènes est loin d’être complètement comprise aujourd’hui.
Pour ce qui est des trois autres graines, aucune action en rapport avec les hormones féminines n’est connue. D’ailleurs, celles de courge sont plutôt conseillées pour leur rôle sur les hormones masculines en cas de problème de prostate. En outre, Carole Minker estime qu’il serait simpliste de penser que l’on peut résoudre des problèmes féminins en « boostant » certaines hormones – œstrogènes pendant la première phase du cycle puis progestérone pendant la seconde phase – comme le propose le seed cycling. Les œstrogènes sont d’ailleurs présentes pendant tout le cycle, observant même un petit pic de production à la fin, ce que la méthode ne semble pas prendre en compte. Réfléchir à la pertinence du seed cycling est aussi l’occasion de rappeler qu’une durée de 28 jours n’est qu’une moyenne. Le cycle peut varier de 21 à 35 jours sans pour autant que ce soit anormal. De plus, la longueur de chaque phase peut changer énormément chez une même femme d’un mois à l’autre.
Mieux qu’un effet placebo ?
Carole Minker a plusieurs hypothèses pour expliquer l’engouement récent pour le seed cycling : « Dans la mouvance de la thérapeute britannique Miranda Gray qui œuvre pour la reconnaissance de la nature cyclique des femmes, cette méthode est aussi une manière de se réapproprier sa féminité. » Et dans le contexte de la crise sanitaire qui a accentué l’individualisme et l’isolement, cette approche que l’on entreprend seule et chez soi est plus facile à mettre en œuvre que, par exemple, participer à des cercles de femmes.
La spécialiste souligne également un possible effet placebo qui serait lié à la symbolique des graines : « Les semences évoquent la fertilité et d’ailleurs, parmi les élixirs floraux que je recommande à mes clientes pour l’infertilité, on trouve la pastèque et la figue dont les fruits produisent beaucoup de semences. »
Quoi qu’il en soit, manger des graines (à condition qu’elles soient bio) régulièrement, et dans le cadre d’une alimentation saine, constituera à tout le moins une démarche bénéfique pour la santé de la femme. Mais en cas d’infertilité ou autre problématique sévère liée au cycle féminin, rappelons qu’il est important de se tourner vers une prise en charge plus globale afin d’explorer les multiples solutions possibles.
Une méthode difficile à tracer
Sur Instagram, le hashtag #seedcycling est recensé plus de 27 000 fois ! Les publications sont généralement accompagnées d’un joli schéma qui figure le cycle menstruel entouré des quatre graines. Certains posts renvoient même vers des liens commerciaux qui vendent des préparations prêtes à l’emploi... Les témoignages des femmes sont divers : la méthode fonctionnerait pour certaines mais pas pour d’autres. Pour autant, l’origine du seed cycling n’est presque jamais indiquée, sauf dans quelques articles qui mentionnent la naturopathe nord-américaine Lindsey Jesswein. Mais cette dernière, sur son propre site web, ne s’attribue pas la paternité de la méthode, bien qu’elle la détaille, la justifie et la décline même pour l’adapter aux problématiques hormonales masculines.