Stévia : une herbe sacrément sucrée
Face au fléau mondial que représente le sucre, la stévia est une solution mal connue. Dépourvu de saccharose, de fructose et de glucose, utilisés massivement dans l'industrie agroalimentaire, cet édulcorant acalorique est un allié de notre santé. Sa forme la plus naturelle, en poudre verte, recèle des pouvoirs venus de la forêt atlantique paraguayenne…
Si l’été n’invite pas au gras dans l’assiette, le sucré s’y impose facilement : fruits, desserts, glaces… autant de promesses caloriques qui nous gâchent parfois le plaisir. Mais les alternatives naturelles existent. En Occident, les adeptes des édulcorants et certains diabétiques profitent déjà des qualités ultra-sucrantes et hypoglycémiantes du rébaudioside A et du stévioside, commercialisés sous forme de sucrettes et autres sirops bon marché, répondant également à l’appellation « stévia ». En réalité, ce ne sont que des extraits de la plante du même nom, Stevia Rebaudiana Bertoni, dont les feuilles fraîches ou séchées puis réduites en poudre sont traditionnellement consommées par les Guaranis et les Indiens du Mato Grosso. Au nord-est du Paraguay, on l’appelle « herbe douce » car elle pousse en sol sablonneux, au milieu des plateaux fleuris, et recèle d’exquises vertus allant bien au-delà de son goût…
La poudre, le totum de la plante
Fondée il y a 32 ans, la société Guayapi a pour objet la reconnaissance, la valorisation et la distribution de plantes d’Amazonie et du Sri Lanka. Claudie Ravel, sa fondatrice et dirigeante, nous raconte l’arrivée de la stévia en France : « Nous nous y intéressions déjà depuis dix ans quand la stévia a été “libérée” en 1999, après des années de batailles administratives. Nous avons finalement été autorisés à la commercialiser sous forme de poudre verte naturelle, à condition de la vendre également en comprimés et en macérations liquides, des transformations plus stables donc contrôlables ». Ces deux dernières formes, très appréciées car environ 300 fois plus sucrantes qu’un sucre de canne à sucre ou de betterave, ne peuvent cependant prétendre à la mention « édulcorant naturel » car elles sont obtenues par transformation : macération aqueuse ou alcoolisée des feuilles de stévia, filtration et cristallisation, jusqu’à ce que se libèrent les substances vitaminiques et minérales et ne restent de la plante que les molécules sucrantes, à savoir le rébaudioside A et/ou le stévioside, autorisé plus récemment. Aussi, pour profiter réellement du totum de la stévia, c’est-à-dire de l’intégralité de ses substances, il faudra la consommer sous la forme de poudre ou de feuilles seules.
Au goût ? Elle a le charme de la...
réglisse douce et est en moyenne 15 fois plus sucrante que le sucre raffiné. Et pour la santé ? Elle se prévaut de 10 à 20 % de protéines appréciables, d’huiles essentielles, des vitamines C et B, de tannins et de minéraux (calcium, fluor, zinc…). Aussi, elle est réputée, chez les Amérindiens ainsi que dans certains pays ayant mené des essais (incomplets) comme en Chine ou au Brésil, pour sa capacité à augmenter la tolérance au glucose et à abaisser la glycémie, ainsi que pour ses vertus stimulantes du système nerveux et des cellules de l’épiderme, et antibactériennes… Malgré les différentes études produites en France, la poudre de feuille reste avant tout une « denrée alimentaire à pouvoir sucrant » et n’est pas considérée comme un complément alimentaire.
Et l’aspartame alors ?
Au même titre que la stévia, l’aspartame est un édulcorant, c’est-à-dire un produit qui présente une saveur sucrée. Découvert dans les années 70 par une société pharmaceutique dans le nord de l’Amérique, il n’est, au contraire de la stévia, constitué que de produits chimiques, l’acide aspartique (40 %), la phénylalanine (40 %) et le méthanol (10 %). De nombreuses études ont montré leur dangerosité à forte dose. Présent dans plus de 5 000 produits sous le code E951, l’aspartame est pourtant autorisé par l’Union européenne et souvent consommé sans précaution, y compris par des personnes à la santé fragile, ou en plein régime.
Un produit slow food
La stévia étant une plante très adaptable, la Chine, la Malaisie et l’Inde se sont lancées dans sa culture pour développer un marché à prix plus bas. Ces pays représentent désormais 90 % de la production mondiale de stévia et de ses dérivés en sucrettes et autres liquides. Mais Claudie Ravel veut défendre les origines de la plante, et son histoire : « L’Amérique du Sud aurait pu délaisser la stévia si nous ne nous y étions pas intéressés. Aujourd’hui, cette plante a besoin d’être valorisée dans le cadre d’un commerce équitable, sans pour autant que sa production soit poussée à outrance. Nous travaillons avec sept petits producteurs partenaires au Paraguay pour 800 kg de stévia par an cultivés en bio en forêts analogues ». Cette dernière approche associe la restauration d’écosystèmes forestiers et le maintien d’une part alimentaire pour les populations autochtones, profitant ainsi de la stévia pour leur consommation propre et des revenus générés par son exploitation. D’autant que, une fois récoltée et séchée doucement, la stévia est réduite en poudre selon des méthodes traditionnelles paraguayennes.
Bonne pour la santé, produite selon des méthodes propres et non polluantes, vendue au prix juste pour le producteur, l’exploitant et le consommateur, la stévia en feuille et en poudre répond aux exigences du mouvement slow food, qui l’a élue « Arche du goût ».
Recettes de mère Nature
Boissons gourmandes à la poudre de stévia
L’eau de stévia
Sur les tables de restaurant au Japon, il n’est pas rare de trouver de la poudre de stévia à disposition, pour assaisonner les plats et sucrer les boissons. C’est en effet son plus simple emploi, que vous pouvez expérimenter chez vous aussi, en veillant à rester parcimonieux avec les doses car la stévia est 15 fois plus sucrante que le sucre raffiné. En outre, si vous souhaitez contrôler votre consommation, vous pouvez en mélanger 1 cuillerée à soupe dans 1 litre d’eau que vous conserverez au frigo. Il vous suffira d’agiter la bouteille avant d’en verser la quantité souhaitée, en la filtrant à la sortie du goulot, dans vos préparations (pas de couleur verte à craindre). Ne pas consommer cette eau au-delà de 2 semaines.
Le cocktail avec ou sans alcool
Dans un mixeur ou au fouet, mélangez ½ banane, ½ orange, quelques pépins de fruit de la passion, 5 cacahuètes non salées, 1 cuillerée à café d’avoine, 1 cuillerée à café de stévia, ½ litre de lait de vache ou végétal, et un peu d’eau pour obtenir la fluidité voulue. Facultatif : ajoutez 1 cuillerée à café de camu-camu pour plus d’apport en vitamine C, 1 cuillerée à soupe de sirop de warana pour la stimulation intellectuelle, et 1 bouchon de rhum pour une version alcoolisée. à déguster aussitôt !
La tisane chaude ou froide
S’il est difficile de trouver des feuilles fraîches de stévia en France, à moins de la cultiver chez soi (cf. Plantes & Santé n° 158), vous les trouverez facilement à l’achat en version séchée et pourrez ainsi tester la tisane de stévia. Attention, pour bénéficier des vertus médicinales de la plante, incorporez ses feuilles dans une eau qui commence à refroidir, juste après avoir bouilli, puis laissez infuser à couvert une dizaine de minutes. Buvez la tisane tiède ou refroidie.
Astuce apaisante : Mélangez quelques cuillerées de tisane de stévia à de l’argile verte afin d’obtenir une pâte suffisamment compacte pour l’étaler sur vos boutons de moustiques les plus irritants.
À savoir : D’après l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), le stévioside possède des propriétés antihypertensives à la dose de 250 mg, 3 fois par jour et sur une durée d’un an.