Dossier
Du bon usage des phytohormones (3/4)
Les hormones interviennent dans tous les métabolismes de notre corps, et le moindre déséquilibre entraîne des modifications qui peuvent devenir incommodantes. C’est le cas lorsque survient la ménopause. Et plus encore pour des maladies telles que le diabète ou l’hypothyroïdie. Or les plantes ont la capacité d’agir quand notre système hormonal se dérègle. Il convient toutefois d’utiliser ces possibilités à bon escient.
Stimuler à distance
L’action hormonale que les plantes peuvent avoir sur l’organisme prend parfois une voie détournée. La plante en elle-même ne contient pas de substances mimant les hormones, mais agit en stimulant la glande, directement ou indirectement, par l’axe hypothalamo-hypophysaire. C’est le cas du cassis en macérat glycériné (la forme la plus active). Employé dans le traitement des inflammations comme l’arthrose ou les manifestations allergiques, il stimule la glande surrénale qui produit le cortisol, un corticoïde naturel. Au-delà de l’effet direct sur l’organisme, cela présente l’intérêt de réactiver la glande là où un apport direct de cortisone va la mettre au repos. En effet, lorsqu’on administre des corticoïdes, surtout sur une longue période, un mécanisme de rétrocontrôle se met en place et les cortico-surrénales voient leur activité diminuer. Un arrêt brutal du traitement, et le niveau de la cortisone naturelle descend encore plus bas qu’initialement. Pour limiter ce phénomène on prendra du macérat glycériné de cassis quelques jours avant l’arrêt du médicament, à raison de 10 gouttes le matin et 5 gouttes à midi (si le macérat est dilué au dixième).
Autre mode d’action : la plante va bloquer la fixation des hormones sur les récepteurs présents dans le corps, ce qui les empêche d’agir. Le cas le plus intéressant...
est celui de l’épilobe à petites fleurs (Epilobium parvi orum) qui bloque la fixation de la testostérone sur le tissu de la prostate. Laquelle testostérone est partiellement responsable de l’hypertrophie bénigne de la prostate et des symptômes comme la gêne urinaire ou l’incontinence. Cette action curative pourrait aussi être préventive de certains cancers. Dans cette même indication, la racine d’ortie (Urtica dioica) empêche la liaison entre la testostérone et son transporteur, ce qui lui barre la route de la prostate.
D’autres mécanismes sont encore plus originaux. Le lycope (Lycopus europaeus) utilisé dans le traitement de l’hyperthyroïdie en extrait hydroalcoolique, diminue les symptômes et normalise ou améliore les analyses de sang. Comment ? Il agirait au niveau rénal, la plante stimulant l’élimination des hormones thyroïdiennes, mécanisme qui a l’avantage de respecter la glande en elle-même. Et il semble avoir encore bien des secrets à livrer !
Une contraception naturelle est-elle possible?
Cette question est souvent posée et il est tentant de penser que des plantes à action hormonale pourraient se substituer à la pilule œstroprogestative. Le grémil (Lithospermum of cinale) permet un blocage de la sécrétion des hormones gonadotropes en agissant au niveau hypophysaire. Cette action est si forte qu’une plante proche, Lithospermum ruderale, était employée par des tribus indiennes du Nevada comme contraceptif, en particulier lors des déplacements. Mais le blocage de l’hypophyse n’est pas sans risque, surtout s’il est prolongé. Il est probable que, même si l’on découvrait d’autres plantes pouvant bloquer l’ovulation, elles posséderaient de nombreux effets secondaires. Car, pour interrompre ce phénomène naturel, il faut forcément créer un déséquilibre.
Stimuler ou ralentir les glandes endocrines ?
L’alchémille (Alchemilla vulgaris) ne contient aucune structure semblant correspondre à une hormone du corps. Elle agit pourtant en régulant la quantité de progestérone sécrétée par l’ovaire. Elle est employée en cas de cycles longs, irréguliers avec des premiers jours de règles douloureuses accompagnées d’une congestion pelvienne (hypo-progestéronémie). Cette action était déjà connue avant la compréhension des mécanismes hormonaux. L’alchémille fut considérée comme l’amie des femmes, et même nommée « manteau de Notre-Dame ». Elle était employée à toutes les étapes de la vie d’une femme, lors des premières règles, pour faciliter l’accouchement, la plante étant aussi antihémorragique, puis au moment de la ménopause. Comme la progestérone s’équilibre avec les œstrogènes, l’alchémille peut aussi être employée en cas d’hyper-œstrogénie.