Dossier
Les champignons, une médecine à découvrir (2/5)
Anticancéreux, régénérants du système nerveux, protecteurs cardio-vasculaires… Nombre d'études prouvent désormais que les champignons méritent leur réputation d'aliments de longue vie et de protecteurs immunitaires. Voici un état des lieux du champ thérapeutique de ces espèces végétales, dont certaines sont encore peu connues en Occident. Et constituent une médecine à part entière.
Les champignons, véritables cardioprotecteurs
Selon l’American College of Cardiology, l’association médicale américaine de référence dans ce domaine, les champignons font partie des aliments les plus protecteurs de la santé cardio-vasculaire. De nombreuses études ont en effet démontré leurs actions sur différents facteurs de risques, notamment grâce à leurs vertus anti-inflammatoires et antioxydantes.
Citons tout d’abord les propriétés hypocholestérolémiantes de nombre d’entre eux. Les pleurotes (Pleurotus eryngii, cornucopiae et ostreatus), les girolles (Cantharellus cibarius), les « champignons chenille » (Cordyceps sinensis) et les champignons chinois (reishi, maitake et shiitaké) sont riches en glucane, chrysine ou encore en éritadénine, des polysaccharides capables de bloquer la synthèse du cholestérol et d’améliorer le profil lipidique, en abaissant le taux de lipides dans le sang. Jean Pélissier, praticien en médecine traditionnelle chinoise conseille, de son côté, l’oreille de Judas (Auricularia auricula-judae). « Le champignon noir chinois a la particularité d’être riche en fer, il a donc la capacité de tonifier le sang, mais aussi de le purifier en régulant le taux de cholestérol. » Ce champignon est d’autant plus intéressant qu’il peut diminuer le taux de triglycérides, ces graisses stockées par l’organisme et qui nous apportent de l’énergie, mais qui sont néfastes en trop grande quantité. Ses polysaccharides agissent sur la coagulation et l’agrégation plaquettaire. Sa consommation régulière permettrait ainsi d’éviter la formation de thrombose.
Le pleurote du panicaut contre le cholestérol
Champignon poussant dans le sud de la France, le pleurote du Panicaut (Pleurotus eryngii) est l’un des plus savoureux champignons sauvages, mais aussi le plus rare des pleurotes. Il est très intéressant pour la sphère cardio-vasculaire. En effet, selon une étude slovaque, la consommation quotidienne de quatre grammes de pleurote du panicaut en poudre pendant deux mois permettrait de réduire de 40 % le taux de mauvais cholestérol (LDL-cholestérol) dans le sang. Il est également étudié depuis de nombreuses années pour ses propriétés immunostimulantes qui en font un précieux allié contre le cancer.
Certains champignons ont également un effet sur la tension artérielle. Et, dans ce domaine, ce sont les champignons asiatiques qui semblent les plus adaptés. Le niu-chang-chi (Antrodia camphorata), une espèce provenant de Taiwan...
, est utilisé sur cette île pour traiter l’hypertension depuis la découverte de lipopolysaccharides particuliers. Le reishi (Ganoderma lucidum) agit, lui, directement sur l’angiotensine, une hormone ayant une action hypertensive, et sur le système nerveux sympathique, le centre de contrôle de la tension. Ces diverses propriétés font des champignons de bons protecteurs contre l’athérosclérose. D’autant que, les polysaccharides qu’ils contiennent en grande quantité et leur teneur en magnésium protègent les vaisseaux sanguins, favorisant ainsi la circulation sanguine. Le cèpe de Bordeaux (Boletus edulis) est d’ailleurs particulièrement recommandé pour cette action protectrice.
Le cèpe de Bordeaux : de la cueillette à l’assiette
Les cèpes sont les champignons les plus convoités des amateurs, et en particulier l’excellent cèpe de Bordeaux (Boletus edulis). Celui-ci pousse dans les bois de conifères, les clairières, les prairies, sur les talus bordés d’arbres et les bords de chemin au pied des chênes, des châtaigniers, des hêtres et des épicéas. Sa forme particulière fait penser à un bouchon de champagne : son pied blanc est charnu et cylindrique et son chapeau forme un demi-dôme de couleur rouge à noisette. Il se récolte jusqu’à la fin du mois d’octobre. Préférez-le plutôt jeune, lorsque la mousse sous son chapeau est encore blanche.
Pour le cuisiner, faites au plus simple, son goût parfumé permet de le poêler quelques minutes avec du beurre ou de le consommer cru en carpaccio.
Attention à ne pas confondre le cèpe de Bordeaux avec le bolet amer (Boletus felleus), qui est entièrement marron et dont la chair est très amère, et le bolet de Satan (Rubroboletus satanas) qui entraîne des troubles digestifs sérieux dus à une substance appelée bolesatine. Pour ne pas les confondre, fiez-vous à la couleur du pied : celui-ci doit être blanc.
Sylvie Simonnet, naturopathe formée à la mycothérapie auprès du gastro-entérologue et hépatologue Bruno Donatini, rappelle enfin que certains champignons favorisent la perte de poids grâce à leur faible apport en lipides. « Je conseille souvent le champignon frais de Paris. Il est riche en protéines, fibres, vitamines du groupe B, phosphore, sélénium et potassium ; tandis qu’il est dépourvu de graisses et doté d’un index glycémique bas. C’est donc un aliment santé qui participe à la protection cardio-vasculaire en permettant de lutter contre l’obésité. » On peut aussi se tourner vers le maitaké (Grifola frondosa). Une étude a en effet rapporté qu’une consommation de 600 milligrammes par jour de maitaké durant deux mois pouvait conduire à une perte de poids significative (de 3,5 à 13 kg).
Le champignon de Paris, un cardioprotecteur
Une étude visant à évaluer l’activité cardioprotectrice d’un extrait hydroalcoolique de l’Agaricus bisporus sur l’infarctus du myocarde a démontré son action protectrice. Il a en effet fait baisser les taux de cholestérol LDL et de triglycérides dans le sang de souris étudiées et augmenter leur taux de protéines sériques, des substances qui interviennent dans la coagulation, l’immunité ou le maintien de la pression sanguine.
Trois champignons pour vos poumons
L’oreille de Judas (Auricularia auricula-judae) est un champignon utilisé en médecine traditionnelle chinoise (MTC) pour stimuler le méridien du poumon. « Sa consistance visqueuse rappelle celle de l’organe, en concordance avec son action tonifiante », explique Jean Pélissier, praticien en MTC. « Ce champignon permet de lutter contre les terrains allergiques et renforce la résistance des poumons, en évitant rhumes des foins et coups de froid. »
La trémelle en fuseau (Tremella fuciformis) est aussi une espèce utilisée en MTC pour renforcer la résistance des poumons. « Elle ressemble à s’y méprendre à une éponge de mer, évoquant les alvéoles pulmonaires », selon Jean Pélissier. Avis aux fumeurs, par son action humidifiante des poumons, elle pourrait lutter contre le dessèchement provoqué par la fumée de cigarette.
Et, pour les plus aventuriers, la psilocybine, un principe actif présent dans les champignons hallucinogènes, permettrait de favoriser le sevrage tabagique !
Sources :
- https://leblognutrition.com
- “The nontoxic mushroom Auricularia auriculacontains a polysaccharide with anticoagulant activity mediated by antithrombin”, Thrombosis Research, 2003
- “Antihypertensive activities of a solid-state culture of Taiwanofungus camphoratus (Chang-chih) in spontaneously hypertensive rats.”, Biosci Biotechnol Biochem, 2007
- Jin H, Zhang G, et al. Treatment of hypertension by linzhi combined with hypotensor and its effects on arterial, arteriolar and capillary pressure and microcirculation. 1996;131-138.