Traçables
Quand vous achetez un produit de phytothérapie (tisane, gélules, teinture mère, cosmétique naturel), je ne sais pas si vous vous demandez d’où viennent les plantes et si, comme moi, vous êtes toujours un peu déçus du manque d’information à ce sujet ? Nous sommes laissés dans le flou comme si cela n’avait aucune importance. S’agit-il de plantes cultivées ou de plantes sauvages ? C’est a minima l’indication qui devrait figurer.
En effet, une bonne partie des plantes médicinales et aromatiques auxquelles nous avons recours sont des plantes indigènes, c’est-à-dire qu’elles poussent spontanément dans une région sans intervention humaine. Elles proviennent donc de cueillettes in situ et pas de cultures agricoles. Des cueillettes au cours desquelles ce ne sont pas quelques paniers que l’on remplit, mais des tonnes de plantes qui sont ramassées. Dans le monde, entre 60 % et 90 % des plantes médicinales et aromatiques sont prélevées dans la nature, estime la fondation FairWild.
Nous publions, dans ce numéro, un article sur ce sujet car on ne parle pas assez de cet aspect de la filière. Et pour cause. Il existe peu de données sur ce qui se joue dans ces maquis pas forcément faciles d’accès, sur les pentes de collines enherbées ponctuées, quand c’est la saison, de collerettes de couleur, dans ces zones tropicales denses. Comme si ces ressources fournies par la nature, ne nécessitant pas d’investissement mais de la main-d’œuvre, n’avaient pas besoin d’être suivies, comptabilisées et ainsi protégées. D’ailleurs, quand on parle d’érosion de la biodiversité, on ne cite pas la surexploitation des milieux dans les causes principales. Les experts mettent en avant l’urbanisation et l’artificialisation des milieux, ainsi que l’intensification et l’abandon de certaines pratiques agricoles. Sans oublier le réchauffement climatique.
Certes ces plantes (gentiane, rhodiole…), que nous connaissons bien pour leurs propriétés, ne figurent pas (encore) sur la liste rouge française de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Mais alors que leur commerce monte en flèche, sur le terrain on constate les dégâts. En France, à l’initiative des parcs naturels et des conservatoires, avec la participation des cueilleurs et de rares industriels, quelques plans de sauvegarde ont été mis en place. Avec des résultats pas toujours à la hauteur des espérances. Les compromis ne garantissent pas la réparation des sites abimés ni la protection du sauvage et il n’est pas facile de le remplacer par des mises en culture. Et que dire de la traçabilité des plantes venues de loin, qui se perd dans les circuits, rarement durables, du commerce mondial…
En tant que consommateurs, nous nous devons d’être plus exigeants sur les informations concernant la provenance des plantes médicinales. Pas seulement pour nous féliciter des propriétés de la nature et du verdissement de notre société, mais pour nourrir le respect que nous leur devons pour de multiples raisons.
Pour y parvenir des moyens existent et peuvent être mis en œuvre. Saisissons-les, en gardant en tête cette idée de santé commune, celle de l’environnement et la nôtre.