Qui veut détruire l’agriculture bio ?
L’agriculture biologique est un concept à la fois pratique et philosophique qui est né au début du XXe siècle. Ses fondateurs, Albert Howard, Hans et Maria Müller, Rudolf Steiner et Masanobu Fukuoka, ont toujours plaidé pour l’émergence d’une agriculture respectueuse de la nature et des êtres vivants, par opposition à l’agriculture industrielle et chimique.
L’agriculture biologique va ainsi devenir en France à partir des années 1950 un véritable mouvement agricole populaire avec notamment le travail de Raoul Lemaire, Jean Boucher, puis de Nature & Progrès. Dès les années 1970, les fondateurs et fondatrices du syndicat Simples ont aussi revendiqué l’agrobiologie comme un corpus de pratiques claires et engagées.
• La mise en œuvre de techniques culturales respectueuses du vivant et des écosystèmes qui puissent garantir notre bien-être et celui des générations futures.
• La prohibition de tout produit chimique de synthèse (plus tard de nanoparticules ou d’OGM) qui pourrait mettre en danger les équilibres de la biosphère.
• Le refus de l’industrialisation et de la financiarisation de l’agriculture.
• Le refus de la perte de l’autonomie et des libertés paysannes.
• La défense et la transmission des savoirs traditionnels locaux.
Or à l’heure actuelle, le système de labellisation officiel retient uniquement l’interdiction d’utiliser des produits chimiques de synthèse et la revendication de produire des aliments plus sains. En fait, l’agriculture biologique a été peu à peu vidée de sa substance politique et éthique, ce qu’elle défendait pourtant à l’origine. Est-ce pour poursuivre dans cette voie que les pouvoirs publics ont entrepris de « dépoussiérer » la bio de ses éléments éthiques et politiques ? En effet au cours de l’année 2015, le syndicat Simples, mais également Nature & Progrès, Déméter et bon nombre d’Amap, ont été contrôlées par la SNE, organe national du service des Fraudes, sous prétexte de « protéger » le consommateur d’éventuelles ambiguïtés ou confusions que pourraient générer ces structures.
Ainsi, à l’issue de la visite au syndicat Simples, la SNE nous a demandé d’ôter la mention de l’homologation qui nous avait été attribuée en 1988 par le ministère de l’Agriculture. Par ailleurs, ils nous ont particulièrement mis en garde sur l’interdiction d’utiliser le terme, « agriculture biologique », mais aussi les préfixes et suffixes éco et bio, réservés selon la réglementation à la certification AB.
Ainsi, à l’heure du tout bio, des «cotons-tiges bio », du « papier toilette éco », en passant par des stages « d’éco-conduite », les acteurs historiques du mouvement sont en train d’en être éjectés. Pourtant notre cahier des charges est suffisamment concret, clair et précis pour que le consommateur ne soit jamais victime de tromperie lorsqu’il choisit nos produits.
Plus que jamais nous pensons que le syndicat Simples, Nature & Progrès, Démeter et certaines Amap sont des composantes essentielles à l’avenir de la bio. Celle-ci n’a pas seulement besoin de critères techniques, elle doit aussi véhiculer des capacités créatives et une exigence éthique... dont nous manquons aujourd’hui.