Déguster les graines douces et tendres du pin pignon
Parmi les graines oléagineuses, les pignons tiennent une place de choix du fait de la finesse de leur texture et de leur saveur. On peut les acheter en magasin, mais ils seront bien meilleurs récoltés sur l’arbre qui les porte, le pin pignon.
Lorsque, dans ma jeunesse, il m’arrivait de manger des pignons – dans les pâtisseries orientales du Quartier latin –, je ne savais pas trop d’où pouvaient provenir ces graines exotiques et savoureuses. J’avais, par ailleurs, eu l’occasion de contempler les majestueux pins parasols bordant les côtes de l’Atlantique et leur silhouette particulière m’avait étonné. Mais je ne pensais pas, à l’époque, à relier les graines aux arbres. Ce n’est qu’à la fin de mon adolescence, en descendant dans le Midi, que je découvris enfin « en vrai » les généreux porteurs de pignons. Je me souviens, entre autres, d’un vaste pin, dans le cap Corse, au nord de Bastia, au pied duquel le sol était jonché de graines allongées d’un brun foncé. Je m’assis à son pied et me mis à casser avec délicatesse les coques dures afin d’en extraire la tendre amande blanche. Quel délice ! On ne consomme généralement les pignons qu’après qu’ils sont restés exposés à l’air pendant plusieurs semaines. Ils ont alors eu le temps de s’oxyder, voire de rancir, et leur goût s’est plus ou moins dégradé. Mais que les pignons sont bons, fraîchement tirés de leur enveloppe protectrice !
Je n’ai pas toujours la chance de pouvoir simplement les ramasser sur le sol, car les graines restent longtemps prisonnières des pommes de pin qui leur ont donné naissance. Ces dernières s’observent fréquemment, grosses boules rougeâtres suspendues aux branches, bien plus imposantes que les...
modestes cônes qui ornent nos autres espèces indigènes. Il se révèle un peu compliqué d’aller les y dénicher, mais un bon grimpeur pourra faire une récolte appréciable – une longue perche fera aussi l’affaire.
Mais comment donc sortir les pignons de leur forteresse ligneuse ? Nombre de ceux qui ont cherché à employer le tournevis ou, pire, le couteau, ont terminé l’expérience avec plus de blessures aux mains que de graines dans leur panier… La technique est franchement dangereuse et peu efficace. Je pratique deux méthodes, l’une lorsque je suis patient, l’autre quand je suis pressé. La première consiste à laisser simplement le temps faire son oeuvre et ouvrir tranquillement les écailles de la pomme, libérant ainsi les pignons. La seconde met en jeu la chaleur du feu : je fais un tas des cônes, dispose autour d’eux des aiguilles de pin en quantité et enflamme ces dernières. En quelques minutes, les écailles s’entrouvrent et le tour est joué. Est-il utile de préciser que je n’emploie cette technique que loin de la pinède, en un lieu totalement sécurisé et où le feu n’est pas interdit ?
J’aime le doux croquant des pignons et leur saveur à la fois résineuse et sucrée. Bien qu’on les emploie généralement en pâtisserie, je préfère les ajouter aux plats salés, en particulier aux légumes sauvages, qu’ils accompagnent agréablement. S’il m’arrive d’en acheter, je prends soin de vérifier leur provenance. En effet, de nombreuses espèces de pins donnent des graines comestibles, et plusieurs variétés sont commercialisées. On rencontre fréquemment des pignons importés de Chine, et ceux d’un pin particulier, le Pinus armandii, peuvent entraîner des réactions très désagréables, telle la persistance pendant plusieurs jours d’un goût amer et métallique en bouche… Le véritable pin pignon est originaire de la région méditerranéenne, où ses graines sont récoltées en quantité importante, mais insuffisante pour alimenter la totalité du marché. Le mieux reste certainement de les cueillir soi-même.
Herbier
Le pin pignon ou pin parasol, Pinus pinea est un arbre de belle allure caractérisé par sa cime étalée et l’écorce rougeâtre de son tronc, qui s’exfolie en grosses plaques. Ses feuilles rigides, groupées deux par deux, mesurent jusqu’à 15 cm. Les branches portent de gros cônes globuleux de plus de 10 cm de diamètre qui y restent longtemps accrochés, car les graines mettent trois ans pour mûrir.
Originaire, semble-t-il, de l’ouest de la région méditerranéenne, ce pin est cultivé depuis l’Antiquité dans tout le bassin de notre mer intérieure. Il est acclimaté dans le Midi de la France et remonte le long de l’Atlantique jusqu’en Bretagne. Il affectionne le climat doux du littoral, où il forme parfois des bois plus ou moins denses.
Recette sauvage
Plantain aux pignons
Ingrédients 1 oignon • 2 cuillerées à soupe d’huile d’olive • jeunes feuilles de plantain majeur ou lancéolé (cueillies au centre de la rosette) • 50 g de pignons, sel aux herbes ou tamari
1. Hachez l’oignon et faites-le revenir dans l’huile d’olive.
2. Coupez les feuilles de plantain en lanières et ajoutez-les à l’oignon.
3. Ajoutez les pignons et faites cuire quelques minutes à feu vif en remuant bien.
4. Ajoutez selon votre choix une pincée de sel aux herbes ou 1 cuillerée à café de tamari (sauce de soja japonaise). Remuez bien.
5. Servez en accompagnement d’un riz nature.