La valériane : reine de la santé nerveuse
D'après son nom, tiré du latin « être fort, vigoureux », la valériane est le végétal par excellence qui apporte la santé à l'organisme. Fait beaucoup moins connu, c'est aussi une plante comestible, qui ne manque pas d'intérêt.
J’entendais depuis longtemps parler de la valériane – qui d’ailleurs pourrait ignorer son nom et ses vertus tant elle a été célébrée à travers le monde et les âges ? J’avais même eu l’occasion d’utiliser ses racines odorantes, en mélange avec la passiflore incarnate, afin de tenter de calmer un peu mes insomnies nerveuses : quelle odeur puissante, manifestement évocatrice d’urine de chat – au point que certains pharmaciens chez qui je voulais en acheter m’avouaient ne pas vouloir en conserver dans leurs officines. D’ailleurs, l’un des surnoms de notre plante est « herbe-aux-chats », et elle est connue pour exciter ces derniers.
Et un beau jour, voici déjà de nombreuses années, je rencontrai au bord d’un fossé courant le long d’un chemin forestier la plante dans son habitat naturel. Bien que ce fut la première fois, je la reconnus du premier coup d’œil tant je l’avais souvent vue sur des planches et des photos. Son port fièrement dressé, ses feuilles symétriquement disposées les unes en face des autres, ses bouquets terminaux de fleurs très pâles, tout concordait avec les images. Mais la réalité m’offrait davantage avec le toucher et l’odeur. Je sentais sous mes doigts l’impression caoutchouteuse de ses feuilles et dans mes narines le parfum délicat des corolles qui, en dépit de leur suavité, recelaient un petit quelque chose de proprement animal. Je me penchai pour déterrer les parties souterraines de la belle. À côté de minces rhizomes qui rampaient d’une tige à l’autre juste sous la surface du sol imbibé d’eau, chaque pied portait un faisceau de racines brunes et charnues qui forment l’intérêt principal du légendaire végétal. Froissées entre mes doigts, elles exhalaient une curieuse odeur de violette sous laquelle perçaient déjà des relents félins…
Je n’ai jamais trop récolté de racines de valériane pour ma consommation...
personnelle, préférant penser – à tort ou à raison – que celles que j’achète parfois dans le commerce proviennent de cultures intelligemment menées et qui ne mettent pas en péril l’existence de la plante dans son milieu naturel. Il faut en effet être conscient de l’impact que la consommation de médicinales peut avoir sur la flore spontanée : les exemples d’extinction possible ou du moins de diminutions massives des populations sont bien documentés – et ils ne sont malheureusement pas rares.
La valériane est l’une des plantes que j’utilise le plus pour me faire du bien : les principes actifs de ses racines, d’ailleurs mal connus et regroupés sous le nom générique de valépotriates, présentent une action avérée contre l’agitation et les troubles du sommeil d’origine nerveuse. Fraîches, elles renferment également une essence aromatique riche en monoterpènes et en sesquiterpènes, d’où provient la partie agréable de leur odeur. Dans l’état des connaissances actuelles, il semble préférable de les utiliser fraîches, en tisane ou en teinture, car elles perdent au séchage une partie de leurs propriétés. C’est pourquoi on utilise la valériane sous une forme pharmaceutique qui permet de conserver l’intégralité de son action. La valériane est la plante de notre époque stressée : elle contribue à calmer les états de nervosité et d’excitation si courants. Il faut cependant en user avec modération, car de hautes doses ou des durées trop longues peuvent provoquer des troubles digestifs, nerveux et cardiaques. Je savais la valériane cousine de la mâche – comme le souligne le nom latin de cette dernière, Valerianella – et décidai d’en goûter les feuilles. Si leur amertume me parut trop forte lorsque je les mangeai telles quelles, elle s’avéra bienvenue dans les salades composées où elle apportait une note intéressante. Je les récolte pendant la plus grande partie de la vie de la plante, mais elles sont plus tendres lorsqu’elles sont toutes jeunes, avec une texture délicate proche de celle de la « doucette » bien connue. Il serait possible, mais dommage, de les cuire. Les fleurs peuvent être égrenées dans les salades ou les desserts qu’elles décorent.
Les feuilles de deux espèces de nos montagnes, Valeriana montana et V. tripteris, peuvent être grignotées ou ajoutées aux salades, en petites quantités pour ne pas nuire à la plante. Plusieurs autres valérianes ont été consommées par l’homme. La Valeriana phu, native du Caucase à la Sibérie, était jadis cultivée sous le nom de « salade d’hiver ». La grosse racine charnue d’une espèce locale (V. edulis) était consommée par les Indiens d’Amérique du Nord après cuisson dans le four souterrain, on la nommait « tobacco root », racine-tabac…
Herbier
La valériane officinale (Valeriana officinalis) est une plante vivace de 50 centimètres à 1 mètre de haut, glabre, formant souvent des colonies. Elle présente des tiges souterraines développées et des racines brun clair, épaisses et charnues, dégageant une odeur caractéristique. La tige, dressée et sillonnée, porte vers son sommet des rameaux opposés. Les feuilles sont divisées en 5 à 21 segments lancéolés, parfois presque linéaires, entiers ou dentés, d’un vert sombre. Les petites fleurs, à 5 pétales soudés roses ou blancs, dégagent un léger parfum. Elles sont groupées en corymbes denses à l’extrémité de la tige principale et des rameaux. Les fruits sont de petits akènes à aigrette plumeuse. La valériane officinale se plaît au bord de l’eau, le long des fossés et dans les lieux humides, souvent dans les bois, entre ombre et soleil. Elle se rencontre partout en Europe. Plusieurs espèces vivent dans nos régions. Elles sont plus petites et ne sont habituellement pas utilisées en médecine.
Salade de valériane et de céleri-rave aux fleurs de pissenlit
Ingrédients : • 200 g de feuilles de valériane • 1 céleri-rave • 1 c. à soupe de vinaigre de cidre • 1 c. à soupe d’huile de sésame • 10 cl de crème de soja • Sel • Fleurs de pissenlit.
- Hachez les feuilles de valériane et disposez-les au fond d’un saladier.
- Râpez le céleri-rave et ajoutez-le.
- Mixez ensemble le vinaigre, l’huile, la crème de soja et le sel.
- Versez sur les légumes et mélangez.
- Décorez des fleurs de pissenlit (ou d’autres fleurs comestibles).
Plus d'informations sur le site de l'auteur : https://couplan.com/