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Le cirier, un original des marais

Le cirier, un original des marais
Le cirier, un original des marais

Cette plante n'est pas très courante et elle n'est guère connue, pourtant elle ne manque pas d'intérêt : ses feuilles sont condimentaires et ses fruits résineux ont longtemps servi à confectionner des bougies. Le cirier est une curiosité qui mérite que l'on s'y arrête. Par François Couplan

C'est un drôle de petit arbrisseau au nom bizarre, que l'on ne rencontre pas très souvent, car son habitat est spécifique. J'ai eu l'occasion de l'observer à plusieurs reprises dans son habitat naturel, les marais de la côte atlantique. C'était dans la Grande Brière, cette vaste zone humide qui s'étend au nord-ouest de Nantes. Un ami, Yves, y avait créé il y a plus de quarante ans les « Jardins du marais » où il cultivait avec bonheur toute une variété de plantes, les exotiques se mêlant harmonieusement aux indigènes dans un vivifiant mélange. Toute une parcelle avait été laissée telle quelle « en libre évolution », et c'est là que, parmi les saules, l'aulne et la bourdaine, poussait en groupes denses le cirier (Myrica gale).

La plante n'a rien de très spectaculaire avec ses tiges souples, très rameuses, portant des feuilles allongées bordées au sommet de vagues dents, d'un vert un peu grisâtre. On pourrait facilement la confondre avec un saule, dont de nombreuses espèces partagent son habitat – du moins jusqu'à ce que l'on froisse l'une de ses feuilles. Tout change alors : elle dégage une odeur balsamique mais un peu « verte », qui n'est pas sans rappeler celle des bourgeons de peuplier noir (Populus nigra) ou du laurier noble (Laurus nobilis). Les feuilles ont été utilisées comme condiment, comme celles de ce dernier, pour parfumer des plats. Et elles connurent leur heure de gloire pour aromatiser la bière.

Pour les Anglo-Saxons, le cirier évoquerait plutôt le myrte (Myrtus communis), arbuste méditerranéen typique au feuillage délicieusement odorant, car ils le nomment wax myrtle, ou « myrte de cire ». Et nous parlons du « cirier » : cette référence à la production caractéristique des travailleuses de la ruche a sa raison d'être. En effet, une observation attentive de ses fruits nous apporte la réponse. Ce sont de petites boules d'un vert vaguement bleuté recouvertes d'une couche de cire résineuse. Traditionnellement, on faisait bouillir les fruits dans de l'eau. La cire remontait alors à la surface où elle était récupérée – le processus est long et nécessite l'utilisation d'une grande quantité de fruits. Cette cire était utilisée pour fabriquer des bougies, appréciées car elles produisaient peu de fumée et dégageaient une odeur agréable. On l'employait aussi pour imperméabiliser le cuir et le tissu.

Myrte des marais (myrica gale)

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Cette pratique d'extraction de la cire était particulièrement répandue dans certaines régions, notamment les Landes de Gascogne où la plante abonde dans les zones humides et marécageuses. Contrairement à ce que son nom suggère, le « cirier de Bayonne » ne se réfère pas à notre Myrica gale, mais à une espèce originaire de la côte atlantique nord-américaine, la Myrica cerifera, largement employée depuis les débuts de la période coloniale pour fabriquer des bougies. Ces dernières furent, jusqu'au XIXe siècle, importées en Europe via le port de Bayonne. À cette époque, où la main-d'œuvre n'était pas chère et la ressource végétale importante, les bougies de cirier s'avéraient économiquement rentables par rapport à celles que l'on fabriquait à partir de cire d'abeille, voire de suif de bœuf ou de mouton. Au siècle suivant, cette tradition tomba dans l'oubli et elle n'a plus cours aujourd'hui que dans le cadre de reconstitutions historiques qui tentent de faire revivre le patrimoine ethnobotanique lié à cette plante.

Le genre Myrica comprend environ 50 à 70 espèces réparties dans les régions tempérées et subtropicales du monde entier. Elles sont principalement présentes en Amérique, en Asie et en Afrique, avec une seule espèce sur notre continent.

La faya (Myrica faya) est une espèce endémique de l'archipel des Açores, des Canaries et de Madère, souvent utilisée en médecine ­traditionnelle pour les propriétés anti-inflammatoires et antimicrobiennes de son écorce et de ses feuilles. L'arbuste produit du bois de bonne qualité et il est planté pour maintenir les sols et les enrichir grâce aux bactéries fixatrices d'azote qui vivent en symbiose dans ses racines. C'est, a priori, le cas des différentes espèces du genre.

Myrica Rubra

La Myrica rubra, présente en Asie orientale, est cultivée dans diverses régions au climat tempéré ou subtropical, où elle est appréciée pour ses fruits rouges comestibles consommés frais ou transformés en jus, confitures, sirops ou sauces. Parfois comparées aux mûres, elles possèdent une saveur sucrée et légèrement acide. Ses fruits sont riches en vitamine C et en antioxydants. En Chine, ils sont parfois fermentés pour produire une boisson alcoolisée appelée shao mei ou mei gui ji.

Le contact avec les feuilles des Myrica peut, chez certaines personnes, provoquer des irritations de la peau.

Le nom du genre provient du grec myrikè, qui désignait un tamaris. L'épithète gale est tiré du vieil anglais gagel, qui désignait spécifiquement cette plante aromatique. Le surnom français de « piment royal » associé à Myrica gale ne fait pas référence à un quelconque goût piquant, mais à son utilisation comme épice aromatique. De plus, son odeur appréciée lui valait d'entrer traditionnellement dans la confection des bouquets de mariage royaux.

Cueillette

• Feuilles : toute l'année

• Fruits : en automne

Herbier

Le cirier (Myrica gale) est un arbrisseau touffu de 50 cm à 1 ou 2 mètres de hauteur, à rameaux souples et feuillage résineux, odorant. Ses jeunes pousses anguleuses sont couvertes de poils. Ses feuilles sont alternes et disposées en spirale, oblongues-elliptiques et atténuées en un court pétiole, dentées vers le haut ou entières, uninervées, coriaces, mais caduques, glabres ou pubescentes, d'un vert mat.

Les fleurs, dioïques, sont verdâtres, dépourvues de calice et de corolle, présentant selon le sexe 4 à 6 étamines ou 2 styles courts. Solitaires à la base d'une écaille persistante, sessiles, elles sont disposées en chatons dressés, cylindriques ou ovoïdes, denses. Elles paraissent avant les feuilles, d'avril à mai. Le fruit auquel elles donnent naissance, de juillet à septembre, est une petite polydrupe ovoïde brunâtre, couverte de points résineux, renfermant une seule graine – que ne portent, bien sûr, que les plants femelles.

Le cirier se rencontre sous climat atlantique, sur les landes humides et dans les marais et tourbières de l'ouest de la France, jusque dans le Cher et les Ardennes. Il est également présent dans le nord-ouest de l'Europe, ainsi qu'en Amérique du Nord et en Asie boréale.

Recette sauvage

Légumes au four parfumés au piment royal

Ingrédients : ¼ litre d'huile d'olive • 12 feuilles de cirier • 2 oignons • 1 poivron • 1 fenouil • ½ potimarron • Sel.

1. Verser l'huile d'olive dans un récipient assez large et profond, ciseler les feuilles de cirier et les ajouter à l'huile. Saler légèrement. Mixer et filtrer.
2. Laver et éplucher les légumes, puis les couper dans la longueur, en tranches assez fines.
3. Badigeonner une plaque de cuisson d'huile parfumée, y disposer les légumes, badigeonner ces derniers de la même huile et saler légèrement.
4. Faire cuire une vingtaine de minutes à 180 °C.
5. Servir chaud ou froid.

Notes : Vous pourrez utiliser le reste de l'huile parfumée pour d'autres usages culinaires : sauces, salades, etc. Vous pourriez éventuellement remplacer les feuilles de cirier par des feuilles de laurier-sauce (Laurus nobilis).

Plus d'informations sur le site de l'auteur : https://couplan.com/  

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