Le jardin suspendu d'èze Un balcon fleuri et piquant sur la Riviera

il faut grimper à ­travers les ruelles de la petite cité médiévale d'Èze, protégée par des murailles du XIIe siècle, pour arriver au jardin. Dès l'entrée, le regard est captif d'une vue panoramique ­époustouflante. « Nous sommes ici à 429 mètres d'altitude et le jardin botanique s'étend sur environ quatre hectares », précise Stéphane ­Cassus, le ­responsable du jardin exotique depuis huit ans. Et de continuer les présentations : l'on doit ce jardin, au rêve un peu fou d'André Gianton, maire du village qui, en 1949, s'est fait aider par Jean Gastaud, créateur du jardin exotique de Monaco. Le site est choisi pour son exposition au sud et bien abrité des vents du nord et une déclivité du sol permettant un drainage efficace. Des sacs de terre et de moellon sont transportés depuis la côte à dos de mulet et parfois à dos d'homme jusqu'au pied du château. Les plantations se sont faites à flancs de rocher.

Des cactus géants et rares

Pour lui redonner vie, le sol a été amendé avec des poches contenant un tiers de pouzzolane, un tiers de terreau et un tiers de terre sableuse. Des plantes exotiques y prennent place : agaves, aloès, yuccas, euphorbes, originaires, pour la plupart, des régions désertiques d'Amérique du Nord, d'Amérique du Sud et d'Afrique du Sud. Bordant le chemin, des cactus dressent leurs silhouettes élancées vers le ciel. « Certains cactés sont extrêmement rares par leur niveau de développement sur la Côte d'Azur, comme ces cactus colonnaires qui peuvent atteindre jusqu'à 13 mètres de haut pour un tronc de 30 à 35 centimètres de diamètre, précise Stéphane ­Cassus. Leur floraison est nocturne et a lieu en été. Ce sont les chauves-souris et des insectes qui en assurent la pollinisation. »

Si la plupart d'entre eux présentent un aspect cireux, d'autres comme le Cephalocereus ­senilis de dix mètres de haut, très rare en France, étonne par son aspect poilu. Des longues soies raides et blanches recouvrent son corps et le protègent du soleil et des variations de ­température d'où son surnom de Tête de vieillard. Sa floraison est printanière et nocturne et forme une hampe spectaculaire en forme de cône ivoire. Parmi d'autres curiosités, on trouve le palmier ­ Dasylirion quadrangulatum au tronc large, solide et brun mais qui nécessite la protection par temps froid des voiles d'hivernage, tout comme le cierge candélabre, une euphorbe que l'on confond souvent avec un cactus. Cette belle succulente, peut atteindre 11 mètres de haut avec un tronc de 6 mètres de large. Ses fleurs jaunes en été, se transforment ensuite en fruits. Pendant les mois de mars et d'avril, les aloès sont en fleurs ainsi que les tapis des ficoïdes, des succulentes très florifères au printemps et celles en été des Aptenia cordifolia variant du rose au pourpre. Ces vivaces furent rapportées d'Afrique du Sud par des marins et grimpent sur les roches et murets de la Riviera depuis une centaine d'années.

Au nord, la flore de la Méditerranée

L'on atteint ensuite le versant nord sous le regard des sculptures de Jean-Philippe Richard, les déesses de la terre. Si le côté sud, privilégie les espèces des régions désertiques, le versant nord, est plus ombragé et humide. C'est ­pourquoi, en 2004, l'idée s'est imposée de réaliser un aménagement complémentaire au jardin exotique, en y installant des plantes méditerranéennes. Le contraste avec l'autre végétation est frappant, tout ici est plus vert, plus odorant. Les santolines aux fleurs jaunes, côtoient les cistes roses ou blancs. Le sentier grimpe vers les arbousiers qu'on appelle aussi arbres aux fraises au pied desquels poussent le myrte et une autre espèce endémique, le lentisque pistachier avec son feuillage décoratif qui donne des fruits, d'abord rouges, puis noirs.

Les plantes autochtones sont complétées par une collection d'espèces exotiques inféodées au milieu tropical humide. L'on emprunte un chemin qui serpente entre les fougères ­arborescentes de Nouvelle-Zélande, les ­longues ­agapanthes bleues d'Afrique du Sud et les hostas de Chine. Certaines euphorbes comme l' Euphorbia ­myrsinites, Euphorbia characias et ­l' Euphorbia Spinosa se sont bien développées. Quant aux fougères et aux ­philodendrons, ils ont pris possession des parois des grottes où coule une cascade. Pour renforcer cette ­sensation de fraîcheur, des brumisateurs ont été installés dans l'espace zen, aménagé en 2014. Il offre une terrasse plantée d'espèces subtropicales, où des chaises longues attendent les visiteurs pour se délecter du paysage avec, en toile de fond, le bleu de la mer à perte de vue.