Le parc botanique de Haute-Bretagne, un jardin monde
En Ille-et-Vilaine, Alain Jouno crée depuis vingt-cinq ans des ambiances très variées dans son domaine de la Foltière qui couvre environ vingt-cinq hectares. La déambulation botanique à la rencontre de près de 8 000 espèces végétales venues du monde entier, est empreinte de poésie et nous étonne alors que se dévoilent ici et là de véritables tableaux végétaux.
A quelques kilomètres de Fougères, au creux d'un bocage vallonné où affleure le granit, le domaine de la Foltière est bien caché. Un corridor écologique de cinquante mètres de large l'isole du monde extérieur pour préserver l'écosystème du lieu. Une fois entré, le visiteur est invité à se laisser inspirer par le parcours proposé d'une vingtaine de jardins thématiques aux noms évocateurs : Jardin secret, Jardin de la source bleue… Celui des Mille et une nuits nous accueille par le chant de trois fontaines et les mots de Guillaume Apollinaire : « Ispahan aux musiques du matin réveille l'odeur des roses de ses jardins… ». Jasmins, daphnés, roses de Damas et cyprès de Florence nous transportent dans l'univers des « jardins des délices » islamiques. Après l'Orient, autre ambiance avec la « Cité antique » et son architecture végétale conçue selon les vers d'Homère : « Aux côtés de la cour, on voit un grand jardin, avec ses quatre arpents enclos dans une enceinte… ». À chaque jardin est relié un poème, aux frontières de la mythologie et de l'Histoire. C'est la signature d'Alain Jouno, créateur de ce lieu : « J'associe toujours la poésie aux jardins, c'est une recherche méditative d'épanouissement de l'humain au milieu de la nature. Je crée des ambiances et libre à chacun de sentir là où il est bien ».
Un apaisement pour l'âme et le corps
Son lieu préféré dans le parc, c'est le Jardin du soleil levant, d'inspiration japonaise. Un pont suspendu « symbolisant le passage du monde des humains à celui de la nature » emmène le visiteur vers ce jardin pour y découvrir une douce combinaison entre le végétal, le minéral et l'aquatique. S'y promener est un vrai bain thérapeutique selon les traditions japonaises qui conçoivent leurs jardins pour apaiser l'âme et le corps. La magie opère en particulier en période automnale où les feuillages des niwakis, ces arbres taillés en nuages par Alain Jouno en personne, offrent une palette de couleurs somptueuses. Son œil de photographe éclairé l'incite à façonner des paysages qui flattent le regard quelle que soit la saison et selon diverses perspectives.
Difficile d'imaginer qu'il y a vingt-cinq ans, se tenait ici un grand marais qu'il a fallu entièrement drainer et remodeler. Lorsqu'Alain Jouno, ingénieur agronome et globe-trotter, a acheté ce lieu en 1994 pour y créer son jardin monde, les vingt-cinq hectares du domaine étaient une immense friche. En à peine dix-huit mois, sous le couperet d'une dette abyssale, il réussit à dessiner une dizaine de jardins avec des essences du monde entier pour pouvoir ouvrir rapidement aux visiteurs. Un exploit d'autant plus que son éthique consiste à n'utiliser aucun pesticide.
« Hortus botanica »
Aujourd'hui, le parc botanique de Haute-Bretagne mérite amplement son label « Jardin remarquable » tant il réserve de jolies surprises au détour de ses bassins et cascades, enjambées par de bucoliques passerelles invitant à la méditation. Octobre est la période de floraison des camélias sasanqua, grevillea rosmarinifolia, franklinia alatamaha et gordlinia grandiflora… On admirera la collection rare de kalmias, des lauriers d'Amérique du Nord au beau feuillage persistant dont on guettera la floraison dès juin. Petits et grands découvriront le jardin des carnivores et celui des plantes préhistoriques, se perdront dans le labyrinthe menant au minotaure avant de chercher le fantôme du parc.
Les amateurs de plantes médicinales s'amuseront à repérer les classiques comme les guimauves, valérianes, sauges, origans, menthes… Certaines moins habituelles comme le Sophora du Japon et des plus exotiques comme le Toxicodendron vernicifluum, le Glochidion puberum ou le Xanthoceras sorbifolium. Pour vous aider à les reconnaître, Alain Jouno a développé une application numérique « Hortus botanica » qui, une fois téléchargée, géolocalise les différentes espèces du parc.
Sophora du Japon, Styphnolobium japonicum
Le sophora du Japon, est aussi appelé « l'arbre des pagodes » car il est souvent planté en Asie près des lieux de culte. De la famille des Fabaceae, il a été introduit en France en 1747 par un missionnaire jésuite de retour de Chine. Ses fleurs, grandes panicules couleur crème, n'apparaissent qu'au bout de sa trentième année d'existence ! Le sophora du Japon est très mellifère et sa floraison l'été en fait un atout pour les pollinisateurs. Ses bourgeons sont riches en rutoside et en quercétine aux propriétés vasculotrope, antioxydante et anti-inflammatoire. En médecine chinoise, il est utilisé pour les affections respiratoires et en cosmétique pour son effet antivieillissement.
S'adresser à tous et sensibiliser à l'importance de conserver la biodiversité végétale, c'est aussi une priorité d'Alain Jouno et de ses trois jardiniers. Ils cultivent en pépinière environ cent cinquante plantes qui figurent sur la liste rouge des espèces rares et vulnérables comme le Gymnocladus dioica ou Chicot du Canada.
Chicot du Canada, Gymnocladus dioica
(Ci-dessus) Pendant votre visite, ne passez pas à côté du Gymnoclus dioica ou Chicot du Canada, classé sur la liste rouge des plantes rares et menacées. Son feuillage bronze au printemps, devient vert à pétioles rouges l'été avant de se parer de jaune vif en automne. Après la floraison, des cosses gris bleu se développent en grappes et perdurent l'hiver. Il est appelé aussi caféier du Kentucky car ses graines torréfiées servaient jadis de substitut de café aux pionniers américains. Les Amérindiens l'utilisaient aussi en médecine traditionnelle pour soigner fièvres ou hémorragies,et pour les cérémonies sacrées.
Ils font naître de nouvelles espèces comme le « Cornus hongkongensis », baptisé « Parc de Haute-Bretagne » qui va bientôt être commercialisé. Après avoir parcouru la planète, Alain Jouno a créé ici un véritable sanctuaire pour les végétaux du monde entier, comme un leg aux générations futures.
Infos pratiques
Comment y aller : En voiture, prendre l'autoroute A84, sortir à Saint-Étienne-en-Coglès. Le parc botanique se trouve à 8 kilomètres. La gare routière de Fougères est à 9 kilomètres du parc.
Horaires et adresse : Parc botanique au château de la Foltière, 35 133 Le Châtellier. Ouvert tous les jours du 1er mars au 15 novembre. Tél. : 02 99 95 48 32 www.jardinbretagne.com
Tarifs : Selon la saison, comptez entre 8,90 € et 10,90 € pour un adulte, et de 6,90 € à 7,90 € pour les enfants de moins de 12 ans. Tarif famille : 29 €
Activités : Hanami, la fête japonaise des cerisiers en fleurs aura lieu les 23 et 24 avril 2022 et Les botanistes voyageurs (avec conférences, ateliers), les 11 et 12 juin 2022.
Y dormir : Chambres d'hôtes au château du parc botanique à partir de 140 € la nuit.