Allons cueillir la rose...

Début juin débutent les floraisons de nos 10 000 rosiers, un spectacle exceptionnel dans ce site encore très sauvage. Avec mon amie Lucille et mes parents, nous nous levons avant l'aube pour cueillir à la main nos roses, à peine écloses, et capter ainsi tout leur parfum. Durant un mois et demi, nous enchaînons récolte et distillation douce des pétales afin de ne pas perdre leurs vertus médicinales et leur odeur enivrante. Je me souviens d'une aromathérapeute australienne, venue visiter notre ferme, qui a pleuré d'émotion en respirant la puissance de nos distillats de roses.

Si ce parfum est si magique, c'est grâce à la foi de mes parents qui ont mis toute leur ardeur à planter des rosiers, dans ce lieu préservé mais rude qui donne d'ailleurs aux fleurs une vibration singulière. À l'époque, en 2006, on les a pris pour des fous : même à Grasse ça ne se pratiquait presque plus. Il faut reconnaître que la culture des roses en bio et en montagne est très difficile car il faut désherber manuellement à la pioche… Sans compter le changement climatique et les gels tardifs qui causent beaucoup de pertes, comme cette année.

On essaie de parer aux coups de froid et aux sécheresses en traitant les plantations avec des infusions de plantes et des purins pour stimuler leurs défenses naturelles. Pouvoir soigner le végétal comme l'humain grâce à l'efficacité thérapeutique des plantes, c'est vraiment ma contribution au monde et ce qui donne du sens à mon activité de paysan-herboriste.

Mes parents m'ont enseigné la récolte à l'ancienne, à la main ou à la faucille, des plantes sauvages locales (thym, lavande vraie, sarriette, genévrier, carotte sauvage, lotier corniculé…) et le savoir-faire pour concentrer leurs propriétés dans nos hydrolats, alcoolatures, huiles essentielles, cosmétiques ainsi que dans nos cures rééquilibrantes, spécialement élaborées par Lucille et ma mère herboriste.