Dossier
Les huiles essentielles face à la douleur (2/4)
« Sois sage, ô ma douleur », écrivait Baudelaire. Physique ou psychique, celle-ci ne s’efface toutefois pas à coup de poésie, même si les sens et les émotions sont aussi vivement sollicités. Restons dans la douceur en misant sur l’aromathérapie, dont l’efficacité s’illustre même en milieu hospitalier.
S’attaquer aux inflammations
La douleur s’enracine souvent dans l’inflammation des tissus, sa réponse normale aux blessures ou aux infections. Inflammation aiguë et douleur apparaissent très peu de temps après la blessure, durant de quelques heures à quelques jours, le temps pour le système immunitaire de prévenir l’infection puis de participer à la réparation des tissus. Là où le bât blesse, c’est lorsque cette inflammation devient chronique et que, pendant plusieurs semaines, voire années, la sirène d’alarme que constitue la douleur devient un bruit de fond quotidien.
Cette douleur a plusieurs causes : un effet mécanique lié à la pression des tissus enflammés sur les nerfs d’une part, et un effet proprement chimique d’autre part. L’inflammation qu’on retrouve dans les cas d’arthrites ou d’arthroses génère des médiateurs (prostaglandines, cytokines...) qui vont avoir un effet d’hypersensibilisation des nerfs périphériques et des cellules en charge de la douleur au niveau du système nerveux central. Répondre aux douleurs inflammatoires implique donc de travailler à la fois, et indissociablement, sur la douleur et sur l’inflammation. La réponse du corps à cette situation consiste normalement dans la production de cortisol, une hormone anti-inflammatoire et antidouleur...
. Mais, après une inflammation de plus de deux semaines, le corps épuise ses réserves endogènes de cortisol. Ici, l’aromathérapie peut compenser en partie cette insuffisance endocrinienne par des terpènes cortisollike. On appliquera en massage biquotidien de la zone lombaire (là où se trouvent nos glandes surrénales) un mélange de trois gouttes d’HE d’aiguilles de pin sylvestre (Pinus sylvestris), de trois gouttes d’HE d’épinette noire (Picea mariana) et de six gouttes d’huile végétale. Une fois ce travail de rééquilibrage hormonal engagé, on s’attaquera plus localement aux articulations concernées en effectuant des mélanges associant des HE à la fois anti-inflammatoires et antalgiques, comme l’eucalyptus citronné (Eucalyptus citriodora), la gaulthérie couchée (Gaultheria procumbens), la camomille noble (Chamaemelum nobile) ou le gingembre (Zinziber officinale).
En cas de douleur résistante, on pourra y ajouter des antalgiques spécifiques avec différents mécanismes d’action comme la menthe poivrée ou l’ylang-ylang, mais également le clou de girofle (Syzygium aromaticum) jouant sur nos récepteurs à GABA, la noix de muscade (Myristica fragrans) particulièrement utile pour l’arthrite et les rhumatismes ou le poivre noir (Piper nigrum) jouant sur nos récepteurs aux cannabinoïdes.
Soulager le mal de dos
Celui qu’on a longtemps appelé le « mal du siècle » peut avoir des origines posturales, mécaniques ou alimentaires qui méritent d’être explorées quand la douleur est chronique. Toutefois, en appui symptomatique, une synergie aromatique antalgique et décontracturante musculaire peut soulager. Le camphre est ici souverain, associé à des antispasmodiques et antalgiques (à éviter sur le long terme ou chez les enfants de moins de 10 ans). À raison d’une dizaine de gouttes en massage local.
Formule
• HE de romarin à camphre (3 ml)
(Rosmarinus officinalis CT camphre)
• HE de marjolaine à coquille (3ml)
(Origanum majorana)
• HE de sarriette des montagnes (2ml)
(Satureja montana)
• HE de gaulthérie couchée (2ml)
(Gaultheria procumbens)
• Macérat huileux demillepertuis (20ml)
À chaque douleur le bon dosage
La proportion respective d’huiles essentielles et d’huile végétale des mélanges utilisés en massage antalgique varie selon les besoins et les conseils d’aromathérapeutes. Voici toutefois le baromètre proposé par Dominique Baudoux, correspondant aux trois paliers de la douleur proposés par la médecine allopathique.
Mode d’emploi
• Douleurs légères : 20 % d’HE pour 80 % d’HV.
• Douleurs modérées : 30 % d’HE pour 70 % d’HV.
• Douleurs puissantes : 50 % d’HE pour 50 % d’HV.