La lutte contre le paludisme s’organise autour de l’armoise
L’artémisine est utilisée depuis longtemps pour son rôle antipaludique. Cette molécule est issue de l’armoise annuelle (Artemisia annua) qui peut soigner le paludisme, aussi appelé malaria. Séchée puis consommée en tisane, en poudre ou en gélules, cette plante se répand dans les cliniques africaines. Et pour cela, les locaux peuvent compter sur le soutien de nombreuses associations européennes, à défaut de celui de l’OMS.
La malaria est une des maladies les plus courantes sur le continent africain. Constatant que la maladie est de plus en plus résistante aux traitements contre la malaria, de plus en plus de scientifiques se sont alors tournés vers l’ACT ces dernières années, un composé à base d’un extrait de l’Artemisia : l’artemisine dont la découverte a d’ailleurs valu en 2015 à la chinoise Youyou Tu le prix Nobel de médecine. Cette plante originaire de Chine est connue depuis longtemps, pour ses propriétés antipaludéennes en Asie.
Vers une démocratisation locale
Et aujourd’hui, son utilisation comme traitement contre le paludisme tend à se démocratiser en Afrique. De nombreux hôpitaux utilisent la plante comme outil de prévention chez l’enfant et vantent son pouvoir curatif sur la maladie. Son principal atout est son effet inhibiteur sur le cycle parasitaire. Une nouvelle pratique se répand : consommer l’intégralité de la plante pour éviter ou combattre le palu.
Des chercheurs congolais ont conduit une étude clinique en République démocratique du Congo sur 1 000 malades, pour comparer le traitement classique à la plante. Résultat : les médicaments soignent dans 79 % des cas, contre 99,5 % pour l’Artemisia annua.
Le problème est qu’il est difficile pour ces pays, bien souvent touchés par la famine, de cultiver de l’armoise. De nombreuses associations, convaincues par l’efficacité de ce traitement naturel ont donc décidé de les aider à se soigner avec l’armoise.
Colis humanitaires d’Artemisia
Les pionniers de la sensibilisation aux vertus de cette plante sont les membres de l’association Artemisia contre le paludisme, qui s’est créée en 2002. Cela fait maintenant quinze ans que ses bénévoles œuvrent pour faire connaître et diffuser la plante en matière de paludisme et en favoriser la culture dans les zones à risques.
Aujourd’hui, l’association est bien implantée en République démocratique du Congo, au Togo et au Bénin où elle envoie régulièrement des colis avec les récoltes des bénévoles, implantés en France. Sa mission est également pédagogique puisqu’elle aide les pays africains à cultiver eux-mêmes cette plante médicinale.
Vers une autonomie des cultures
L’association Luebo-sur-Ourthe met en relation les habitants de la vallée d’Ourthe (Belgique) avec ceux de Luebo (République démocratique du Congo). Elle a pris l’initiative depuis quelques années de cultiver l’artemisia annua en Belgique chez de nombreux bénévoles. Et les récoltes sont ensuite envoyées dans les centres de santé et dans la prison de Luebo.
L’association Yeu Mali est quant à elle née en juin 2004 sur l’île d’Yeu avec l’objectif de participer à des actions d’aide humanitaire au Mali. Une de ses missions est de favoriser la culture de plantes médicinales en Afrique pour permettre l’accès à ces remèdes naturels aux populations les plus démunies. Au départ, ils ont donc cultivé la plante sur leur île pour envoyer les récoltes dans les pays africains. Mais leur mission a évolué et aujourd’hui ils œuvrent à la mise en place de Maisons de l’Artemisia aux côtés de l’association Iwerliewen.
Les Maisons de l’Artemisia
La première Maison de l’Artemisia a ouvert il y a un petit peu moins d’un an au Sénégal. Gérée par des associations locales, elle a pour mission de produire ces plantes, les conditionner sous forme de tisane, de gélules ou de crème et de les vendre, à des prix accessibles.
Les associations européennes soutiennent les locaux investis dans le projet d’un point de vue pédagogique. Les médecins locaux travaillant dans ces Maisons sont par exemple formés par leurs confrères sur le bon usage du produit. Mais, les associations assurent aussi un soutien matériel. Nombre de plants qui poussent au Sénégal sont par exemple originaires de l’île d’Yeu.
La Ferme de Providence
Et les pays touchés par la malaria se soutiennent également entre eux. Ainsi, la ferme agroécologique La Providence de Banigbé (Bénin) a publié un tutoriel sur YouTube sur toutes les étapes de la culture de l’Artemisia annua. Un véritable guide pour les autres villages qui voudraient mettre en place une culture de l’armoise.
Cependant, malgré l’enthousiasme populaire autour de cette plante médicinale, l’OMS refuse de la recommander sous sa forme complète dans le traitement du paludisme. Elle demande que de nombreuses études cliniques soient conduites et qu’elles soient publiées dans des revues scientifiques à comité de lecture. Ce qui n’est pour le moment pas le cas. De telles études sont difficiles à mener puisque la rentabilité, faute de dépôt de brevet, n’est pas assurée.