Dossier
Covid long, fibromyalgie, endométriose : Au chevet des syndromes complexes (4/4)
Leurs symptômes sont pluriels, polymorphes, difficiles à classer au niveau clinique et pourtant, des millions de personnes en souffrent. Les syndromes du Covid long, de la fibromyalgie et de l'endométriose déstabilisent la médecine conventionnelle. Et si les soulager passait par une approche plus globale du malade en cherchant à mettre à profit les possibilités multicibles du végétal ?
Détecter tôt l'endométriose
Cette maladie est caractérisée par une localisation anormale du tissu endométrial, la muqueuse utérine. On retrouve ainsi de l’endomètre dans des organes comme les trompes et les ovaires le plus souvent, mais aussi le tube digestif, le pelvis, le péritoine, les voies urinaires, les cicatrices de la paroi abdominale ou même le poumon. Dans l’adénomyose, il infiltre la paroi musculaire de l’utérus. Les symptômes sont essentiellement des règles douloureuses, des douleurs pelviennes et autres chroniques, souvent cycliques. On rencontre également des troubles de la fertilité, des troubles digestifs, des rapports sexuels douloureux. Une femme sur dix serait atteinte d’endométriose, souvent d’une forme légère à modérée. Mais dans les cas sévères, la vie quotidienne et la procréation peuvent être gravement impactées. La recrudescence des cas est due à un meilleur diagnostic, mais aussi à l’augmentation d’exposition précoce aux perturbateurs endocriniens tel le bisphénol A. De plus, la maladie est souvent associée à un syndrome de l’intestin irritable ou à une fibromyalgie.
L’endométriose se caractérise par une inflammation chronique, avec des phases aiguës entraînant des spasmes et des douleurs. Le traitement conventionnel comporte antalgiques, anti-inflammatoires, contraceptifs oraux progestatifs en continu, stérilet à la progestérone et, dans les cas sévères, chirurgie ou castration chimique.
Pour les formes bénignes et modérées et pour limiter ou repousser le recours à des traitements lourds, l’approche complémentaire est fondamentale. On agira sur le système nerveux parasympathique pour réguler spasmes et inflammation en ayant recours à la relaxation, l’hypnose et d’autres thérapies psychocorporelles. Les propriétés des plantes seront mises à profit pour limiter la prolifération cellulaire de l’endomètre. C’est le cas de la réglisse par la glycyrrhizine, du curcuma par la curcumine, mais aussi du kudzu, des extraits d’armoise vulgaire ou du millepertuis. Ce dernier, préparé en macérat huileux associé à de l’huile de pépins d’argousier, a montré une efficacité notable chez l’animal. Le millepertuis est en effet utilisé dans d’autres cultures pour ce type d’indications (inflammation, troubles gynécologiques et intestins). Le mastic de Chios, une résine issue du pistachier lentisque extraite sur l’île grecque de Chios, trouve ici une indication nouvelle, tandis que l’on a pu constater (lors d’une étude réalisée in vitro) que des extraits de ginseng rouge concentrés en saponines ont favorisé le suicide des cellules dérégulées.
Pour contrer le déséquilibre dans la balance des hormones féminines lié à une influence excessive des œstrogènes et à une insuffisance progestative, la médecine conventionnelle utilise la progestérone sous forme de contraceptif ou bloque carrément les sécrétions œstrogéniques. En phytothérapie, on jouera la carte de la modulation, moins radicale, par des plantes antiœstrogéniques et/ou stimulantes progestatives, ce qui est le cas de l’alchémille, de l’achillée millefeuille ou du gattilier.
Zoom sur la balance hormonale
À la fois progestative et anti-œstrogénique, mais aussi hémostatique, cicatrisante, anti-inflammatoire, fortement antispasmodique et digestive, l’achillée millefeuille (Achillea millefolium) est dotée de nombreuses propriétés. On utilise ses sommités fleuries en tisane, en extrait alcoolique ou sec. L’huile essentielle ne présente pas d’intérêt particulier dans cette indication.
Les alchémilles (Alchemilla vulgaris, A. mollis, A. montana), jadis appelées « manteau de Vénus » (ou « patte de lion » du fait de la forme de la feuille), par essence plantes de la femme, sont également progestatives mais aussi astringentes, anti-inflammatoires et antidiarrhéiques. On utilise leurs sommités fleuries en tisane, extrait alcoolique et extrait sec. Ces deux plantes sont très utiles en cas de règles hémorragiques et souvent associées en deuxième partie de cycle, voire sur tout le cycle dans les formes plus sévères.
Gynécologie et gattilier
Le gattilier (Vitex agnus castus) est une sorte de couteau suisse de la phytothérapie en gynécologie. On utilise ses baies et sommités fleuries. Il se prend sous forme d’extrait alcoolique, de poudre (on peut tout simplement moudre 1,5 à 2 g de baies par jour) ou d’extrait sec, souvent en deuxième partie de cycle. Doté de propriétés antiœstrogéniques et progestatives, il augmente la dopamine et la mélatonine et stimule les récepteurs opiacés. Il est également anti-inflammatoire. Un avis médical est le plus souvent souhaitable et on ne le prend pas en continu.
Il ne faut pas s’étonner que l’on puisse aussi recommander des plantes riches en phytœstrogènes, comme la réglisse (également cicatrisante et anti-inflammatoire), l’armoise vulgaire ou le cimifuga (actée à grappes, qui agit sans doute plus en touchant les neuromédiateurs que par ses phytœstrogènes) ou encore le macérat glycériné de bourgeon de framboisier. En effet, de nombreux phytœstrogènes sont régulateurs : ils entrent en compétition avec les œstrogènes endogènes (produits par notre corps) au niveau de leurs récepteurs cellulaires, qu’ils stimulent avec moins d’intensité. On conseillera donc ces plantes souvent en complément dans des synergies, plus que comme base du traitement.
On n’oubliera pas de stimuler le foie qui est l’un des organes clés du cycle d’élimination des œstrogènes. Des cures régulières de plantes actives sur les enzymes hépatiques et/ou facilitant l’évacuation de la bile seront proposées, tels le chardon-marie, le curcuma, le radis noir, les feuilles d’artichaut, le romarin.
Reste la question de l’inflammation, à la fois chronique et aggravée par des pics aigus, au moment des règles en particulier. Bien choisir son alimentation permet déjà de la contenir.
Alimentation et complémentation
Une alimentation anti-inflammatoire végétalisée, pauvre en viande, riche en oméga-3, minéraux et antioxydants sera recommandée en cas d’endométriose. On prendra également soin du microbiote grâce à des aliments fermentés. Certains ajoutent des compléments alimentaires minéraux contenant du zinc, du manganèse, du cuivre (attention au surdosage), du calcium, du magnésium. La N-acétylcystéine est également proposée pour ses vertus antioxydantes.
Mais on pourra aussi s’appuyer sur des anti-inflammatoires antioxydants comme le curcuma, le gingembre, l’açaï ou le pycnogénol (un extrait d’aiguilles de Pinus pinaster, riche en procyanidines). Enfin, le gingembre est également tonique pour des femmes souffrant de fatigue chronique. Citons aussi la mélisse ou le basilic, qui limitent les spasmes, ou l’ortie reminéralisante et hémostatique. Capable également de ralentir les saignements, la bourse à pasteur, consommée fraîche, est de surcroît riche en vitamine C antioxydante.
On le voit, les approches complémentaires ont un rôle important à jouer pour corriger certains déséquilibres induits par cette maladie chronique si répandue. Sans compter qu’on limite ainsi le recours à des thérapies plus agressives.
Un protocole de base à adopter
Si cette maladie nécessite une prise en charge personnalisée, le protocole de base suivant pourra être adopté :
- Prendre 30 gouttes de teinture-mère de gattilier chaque jour, en continu ou en deuxième partie de cycle (pas plus de 3 mois).
- Prendre 2 à 3 tasses par jour de tisane d’alchémille et/ou d’achillée, en deuxième partie de cycle et au long cours, surtout en cas de règles hémorragiques (la teinture-mère est aussi possible).
- Ajouter régulièrement du gingembre en poudre dans l’alimentation.
- En cas de spasmes et de stress, boire également des tisanes de mélisse en deuxième partie de cycle.