L'Aloe vera, cette polyvalente d’hier et d’aujourd’hui
Il ne vous aura pas échappé que l’Aloe vera est décliné à toutes les sauces : on l’a d’abord trouvé dans les rayonnages typiques des magasins diététiques, sous forme de gel ou dans des baumes, mousses à raser et dentifrices. Voilà qu’on nous en met dans les lessives, et même des nettoyants sols, preuve que les fibres textiles et les carrelages aussi réclament ses bienfaits...
L’Aloe Vera est devenu une star du marketing. Pour autant, cette plante, aux qualités reconnues depuis l’Antiquité, mérite-t-elle d’être raillée ? Sûrement pas…
De voir dans les linéaires des yaourts, des boissons gazeuses et des cosmétiques à l’Aloe prouve au moins que notre plante fétiche a un réel pouvoir d’attraction sur le consommateur. Ce qui n’est finalement pas si étonnant : l’efficacité de l’Aloe pour soulager les brûlures, cicatriser les plaies, fortifier le système immunitaire et réguler la sphère digestive ne date pas d'hier.
Du soldat blessé au malade du cancer
Les Chinois appelaient l’Aloe "remède d’harmonie" déjà trois millénaires avant J.-C., en référence à sa grande polyvalence. De l'antique Mésopotamie (1 750 avant notre ère) à la Grèce des débuts de l'ère chrétienne, en passant par l'Égypte des pharaons, l’Aloe était réputée pour soigner les blessures des soldats. On connaissait Cléopâtre pour ses fameux bains au lait d’ânesse, mais elle utilisait aussi quotidiennement l’Aloe pour sa peau, tandis que le roi Salomon faisait pousser ses propres plants dans ses jardins. Particulièrement abondant dans tout le bassin méditerranéen, l’Aloe était de tous les voyages de Christophe Colomb, qui le considérait comme le garant de sa santé et de celle de ses équipages.
L’Europe occidentale, elle, n'a été conquise qu'à partir du XIXe siècle. Timidement. Ce n'est que dans les années 1930 que les Européens s'y intéressèrent de près, principalement pour son utilisation dans le traitement des brûlures dues aux premières radiothérapies.En 2014, plusieurs instances médicales recommandent cette utilisation devant les dégâts causés par les radiothérapies sur la peau et les muqueuses.
Un concentré de… presque tout !
C’est vrai, l’Aloe (Aloe barbadensis, la variété la plus utilisée aujourd’hui) renferme une sacrée panoplie d’ingrédients.
Commençons par les vitamines : c’est bien simple, elles y sont presque toutes, de la vitamine A aux vitamines du groupe B et à la choline, en passant par les vitamines C et E. Un vrai cocktail d’antioxydants.
Du côté des sels minéraux, on n’est pas mal non plus, puisque l’Aloe vera en renferme une vingtaine (calcium, phosphore, potassium, magnesium, zinc...), excusez du peu.
Poursuivons avec les acides aminés, dont 18, parmi les 22 existants, y sont aussi représentés.
Et ce n’est pas fini ! L’Aloe vera contient encore une grande diversité de fibres alimentaires aux propriétés antivirales, régulatrices du cholestérol et de la glycémie, anti-tumorales et stimulantes du péristaltisme intestinal.
Nombre d’enzymes de choix aussi, comme l’amylase (qui nous permet de digérer les sucres) et la carboxypeptidase, qui aide à soulager la douleur, à diminuer l’inflammation et à digérer. Et la liste est encore longue...
Quelques pépites en bonus
L’Aloe vera est une plante grasse originaire d’Afrique, qui a cette particularité d’être xérophyte, c’est-à-dire qu’elle est capable de cicatriser ses propres feuilles en cas d'agression.
Depuis plus de 5 000 ans, toutes les grandes civilisations utilisent l'aloès à des fins thérapeutiques et cosmétiques. Même aujourd’hui, cette plante continuer à nous dévoiler de nouveaux actifs, et pas des moindres. Parmi eux :
- L’acemannan, aux propriétés immunostimulantes ;
- l’aloetine, germicide à large spectre ;
- l’aloelucine, qui booste la régénérescence cellulaire ;
- l’aloemicine, très prometteuse pour son action anti-tumorale.
Autant de découvertes qui complètent la compréhension de ses nombreuses vertus, et pourraient ouvrir la voie à de nouvelles applications ciblées.
Ce que l’Aloe peut faire pour vous
J’ai vraiment découvert les pouvoirs de l’Aloe vera, dont je connaissais pourtant l’existence depuis longtemps, à l’occasion d’un petit accident domestique : je me suis entaillé le bras en restant accroché au fil de fer barbelé d'une clôture. L’un des amis qui m’accompagnaient ce jour-là avait l’habitude salutaire de toujours emporter un mini-spray d’Aloe vera dans ses pérégrinations. Il aspergea donc immédiatement ma plaie et me laissa le précieux flacon pour que je puisse continuer à y appliquer la lotion. Ce que je fis pendant cinq jours, si bien qu’au bout du septième, ma blessure avait à ce point cicatrisé qu’on la distinguait à peine !
C’est par sa richesse en polysaccharides et en enzymes protéolytiques que le gel d’Aloe vera stimule la régénération cellulaire en augmentant la quantité de sang et les ressources de cicatrisation. L’Aloe est très utile pour aider à soigner des affections cutanées comme l’eczéma et le psoriasis, ou encore les manifestations sur la peau de la rougeole, de la varicelle ou de la scarlatine. Même l’herpès est sensible à ses actifs antibiotiques et antiviraux. C’est aussi, avec le miel de manuka, la substance naturelle la plus efficace pour faire cicatriser les brûlures et les blessures ouvertes.
Totum, gel ou jus ?
L'Aloe vera est utilisable sous plusieurs formes qu’il ne faut pas confondre.
Le totum est adapté pour les problèmes de transit ; si vous souffrez de constipation, les différentes formes de fibres naturelles de l’Aloe feront un brin de ménage dans vos intestins. Elles relanceront le transit et aideront à rééquilibrer la flore intestinale pour éviter que ça ne se rebouche.
Pour ce type de cure, je vous conseille d'augmenter la part des fibres dans votre alimentation, avec davantage de légumes, des pommes (bio) et de boire beaucoup d’eau. Le totum s’utilise en cure d’une dizaine de jours, et pas davantage.
On se sert aussi de la feuille et du suc qui, concentrés par ébullition, donnent après refroidissement une sorte de masse dure et très amère. Ce produit est également utilisé comme laxatif, ou comme ingrédient de l’élixir du Suédois.
Récemment sont apparues dans le commerce de nouvelles préparations : gel et jus à usage interne. Le jus sert plus spécifiquement à dépurer le foie et la peau (idéal par exemple pour traiter l’eczéma). Le gel est un protecteur et cicatrisant du système digestif. Il offre un effet extraordinaire sur les problèmes d’estomac, les gastrites ou l’inflammation du côlon. Je l’ai conseillé à un ami à qui l’on avait trouvé des tumeurs bénignes suite à une coloscopie. Après trois mois de cure, tout avait disparu et la muqueuse intestinale était de nouveau saine. Attention : laxatifs, tous deux sont proscrits pendant la grossesse.
La pulpe fraîche de la feuille est traditionnellement employée en usage externe contre les brûlures. Mais on peut aussi se servir du gel pur pour cet usage, plutôt qu’un cosmétique à base d’aloès, qui souvent en contient trop peu. Le gel est souverain sur les brûlures, les coups de soleil, les plaies et même les gelures. On rapporte que pendant la Seconde Guerre mondiale, des habitants d’Hiroshima et de Nagasaki ayant survécu aux explosions ont guéri leurs blessures en y appliquant de la pulpe d’aloès.
Une expérience extraordinaire
Qui pourrait concevoir, de nos jours, de ne pas prendre de médicaments adaptés quand on présente un facteur de risque cardiaque ?
Mais quand on prend connaissance de l’expérience présentée au congrès annuel du Collège International d’Angiologie de San Antonio (Texas) en 1984, on se pose quelques questions, forcément.
L'étude avait été menée pendant 5 ans et sur 5 000 patients (dont 3 200 diabétiques) afin de mesurer les bienfaits de l’Aloe vera au niveau du système cardiaque. Il en ressortait une diminution de 85% des crises d’angine de poitrine, en ayant ajouté 100 g de pulpe d’Aloe fraîche et 20 g d’Isabgol (psyllium) au régime des patients souffrant de problèmes cardiaques dus à l’athérosclérose.
L'étude constatait en plus une réduction significative des taux de cholestérol et de triglycérides sanguins, ainsi qu’un rééquilibrage en faveur du cholestérol HDL (dit bon cholestérol). Cerise sur le gâteau, 95% des patients qui présentaient de surcroît un diabète voyaient leur glycémie baisser, et même se normaliser pour la grande majorité ! La totalité des patients ainsi suivis avaient survécu, sans qu’il ne constate aucun effet secondaire négatif.
Bien d’autres études médicales et observations cliniques étayent les multiples vertus de l’Aloe sur tous les continents.
ttention aux packagings trompeurs
Un produit à base d’Aloe vera ne donne pas toujours les résultats attendus. Car il faut savoir choisir la bonne formule, pour le bon usage.
Les raisons pour lesquelles les effets escomptés peuvent ne pas être au rendez-vous vont de l’utilisation d’une espèce autre que l’Aloe Vera barbadensis, à celle d’une plante immature ou d’une feuille dégénérée, en passant par un gel neutralisé par une trop longue exposition au soleil, à l’air ou à la chaleur.
L’engouement récent pour l’aloès a propulsé des centaines de produits sur le marché. Tous ne sont pas irréprochables, loin s’en faut. Les produits élaborés à partir de poudre ou de concentré de la plante contiennent peu d’aloès (de 1 à 4 %) et ne peuvent rivaliser avec ceux à base de gel d’aloès stabilisé naturellement et concentré à près de 100 %. Vérifiez scrupuleusement la composition du produit que vous souhaitez acquérir, la véritable teneur en Aloe – les tromperies sur ce critère sont courantes – et si possible ses excipients et son mode de fabrication.
Mes conseils d’utilisation : 2 à 4 cuillères à soupe, 1 à 2 fois par jour en dehors des repas ou 1/2 verre le matin à jeun en cure de 3 mois (avec 1 semaine de pause toutes les 3 semaines).
Adopter un aloès chez soi
Quinze espèces d’aloès, dont l’Aloe vera, possèdent des propriétés médicinales et cosmétiques. La plante peut atteindre un mètre, mais restera plus petite si vous la cultivez en pot.
Plantez l’Aloe au soleil, dans des rocailles et sols bien drainés. Hors zone méditerranéenne, l’aloès se cultive en pot afin de pouvoir passer l’hiver dans un local hors gel, ou dans un appartement pas trop chauffé. Placez-le dans un mélange de terre de jardin, terreau horticole et sable grossier (important pour le drainage), à parts égales.
Si vous le cultivez en appartement, vous pourrez sortir votre aloès dès que les gelées ne seront plus à craindre. Toutefois, habituez-le progressivement au soleil car un plant cultivé à l’intérieur est plus fragile : le coup de soleil existe aussi pour les végétaux.
Les graines étant difficiles à trouver, achetez plutôt un petit aloès, qui, dans de bonnes conditions, vous donnera vite des rejets. Quand ces jeunes pousses atteindront 5 cm de haut, vous pourrez diviser votre première plante et avoir plusieurs potées. Mettez-les chaque année dans un pot plus grand jusqu’à ce que votre plante atteigne la taille adulte (3 à 5 ans). Arrosez seulement lorsque la terre est sèche sur plusieurs centimètres.
Le tour de main de l’herboriste
Si vous cultivez vous-même, veillez à n’utiliser que le gel transparent contenu dans la feuille de votre aloès : la sève jaune de la partie externe peut être irritante pour la peau et les muqueuses.
Attention : lorsque vous achetez un plant en jardinerie, il est généralement traité avec des pesticides et donc impropre à une utilisation cosmétique ou alimentaire.
Après l’avoir rempoté, attendez un minimum de trois semaines avant toute utilisation.
Enfin, si l’aloès ne présente généralement aucune contre-indication, une petite allergie est toujours possible. Faites un test en appliquant un peu de gel au creux du coude et attendez quelques heures.
De la prison de Gandhi aux déserts américains
Pendant que Gandhi soutenait dans une prison anglaise un jeûne de protestation de trois mois, il confia à un journaliste américain les quatre secrets de sa santé et de sa vigueur : sa foi, ses saines habitudes d’une vie de dénuement, sa pratique quotidienne du yoga, et les secrets médicinaux de l’Aloe vera, qu’il avait appris à l’occasion d’un séjour en Afrique du Sud.
Les temps ont changé : l'Aloe vera est l’un des compléments alimentaires les plus vendus sur la planète. En particulier aux États-Unis où il est numéro 1. Les déserts américains (et les voisins mexicains) fournissent d'excellents produits comme ceux de la marque texane Lily of the Desert.
Le succès de cette pacifique plante ne fait plus mystère. Même s'il est clair que la science n'a pas fini d'explorer les secrets de l'Aloe vera.