Les bienfaits santé des alliacées
© Matej Michelizza
Les alliacées rassemblent une grande variété de végétaux, de l'ail aux poireaux en passant par la ciboulette. Cultivées ou sauvages, elles sont consommées voire vénérées depuis des millénaires pour leurs bienfaits, dus notamment à leur haute teneur en composés soufrés.
Les alliacées, allium en latin, forment une famille de végétaux en apparence assez différents les uns des autres. Pourtant, ils partagent quantité de propriétés et de bénéfices pour la santé des artères, du foie, des os ou encore du cerveau. Leur diversité en termes de saveurs, d'usages culinaires ou de saisonnalité rend possible une consommation quotidienne, indispensable si l'on veut profiter de leurs nombreux atouts pour la santé.
Aujourd'hui largement consommées partout à travers le monde, les alliacées ont aussi fait partie de l'histoire des civilisations passées, à travers de nombreux usages, culinaires et thérapeutiques mais aussi cultuels. De l'Égypte ancienne à la Grèce antique en passant par le Moyen-Orient et l'Europe du Moyen-Âge, cette grande famille de végétaux, tantôt légumes, tantôt aromates ou herbes médicinales, a suscité l'intérêt. De grands noms de la médecine, comme Hippocrate et Hildgarde de Bingen, et la plupart des médecines traditionnelles, chinoise et ayurvédique en particulier, ont aussi loué leurs bienfaits.
Côté pratique
SOS haleine fraîche
Vous craignez d'avoir mauvaise haleine en mangeant de l'ail ou des oignons crus ? C'est pourtant leur forme la plus biodisponible, mais qui peut entraîner des relents au moment de la digestion. Pour y remédier, mâchez dans la foulée quelques brins de ciboulette, de persil ou de menthe, qui aident à prévenir la mauvaise haleine, ou croquez un grain d'anis, de coriandre ou de café.
Une conservation parfaite
Toutes les alliacées ne se conservent pas de la même manière. Leur version primeur doit rester dans le bac à légumes du réfrigérateur, et se consommer rapidement. Seuls les poireaux, qui aiment l'humidité et le froid toute l'année, se gardent plusieurs semaines au réfrigérateur. En revanche, aulx, oignons et échalotes sous leur forme sèche préfèrent rester bien au sec, à température ambiante, à l'abri de la lumière et éventuellement dans un filet ou un sac en papier, jamais en plastique pour éviter la moisissure. Si un germe vert vient à se former, évitez de les consommer. Quant à la ciboulette, mieux vaut la congeler bien fraîche, en petits morceaux placés dans un bac à glaçons rempli d'eau, que de la faire sécher. Pour la décongeler, il suffit de faire fondre le nombre de cubes nécessaire dans une passoire.
Hacher aux ciseaux, c'est mieux
Pour préserver les vitamines, l'arôme et la saveur des feuilles fraîches de cives, hachez-les avec une paire de ciseaux de cuisine ou un hachoir berceuse plutôt qu'un hachoir électrique, qui les broierait. Privilégiez aussi une découpe minute, juste avant de les consommer.
Des primeurs aux fines herbes
Dans nos contrées, la plupart des alliums sont aujourd'hui cultivés, seul l'ail des ours est sauvage. Certains ont un bulbe (ail, oignon, échalote), d'autres présentent des feuilles (aillet, ail des ours, cébette ou feuilles vertes et tendres de l'oignon avant que se forme son bulbe), des tiges (poireaux, cives) ou encore des fleurs (cives). Ces dernières regroupent la ciboule, la ciboulette et sa version chinoise.
Au printemps, les primeurs colorent les étals des marchés, sous la forme de jeunes pousses avant maturité (aillet), de bouquets (ail des ours, cébettes), de fleurs (cives) ou encore de bottes (oignons nouveaux). Quant au poireau, grand résistant au froid (jusqu'à –7 °C), il peut être cultivé et consommé toute l'année. Très fin au printemps et jusqu'au début de l'été, il voit son calibre grossir en hiver, se prêtant à toutes sortes de recettes. En entrant dans la saison froide, les alliums, jusque-là aqueux et doux, sèchent et se concentrent pour se conserver tout l'hiver. Ail, oignon, échalote intègrent alors la catégorie « conservation », tandis que la ciboulette séchée rejoint le cerfeuil, le persil...
et l'estragon pour former ce que l'on appelle les fines herbes.
Une réputation… sulfureuse
Les alliacées doivent leur odeur et leur saveur spécifiques à une haute teneur en composés soufrés qui les rendent aussi, pour certaines personnes, assez peu digestes. Leurs bienfaits sont pourtant innombrables, tant sur la glycémie et la santé du cœur que dans la prévention de la plupart des cancers. En effet, ces molécules participent à la réduction du sucre sanguin, protègent les artères du cholestérol et des triglycérides en excès à l'origine des plaques d'athérome, et sont capables d'inhiber ou d'éliminer des cellules cancéreuses, donc d'empêcher l'apparition de tumeurs.
Le soufre est un oligoélément indispensable à l'organisme dont l'une des fonctions, et non des moindres, est de réguler une grande partie des activités du foie, parmi lesquelles les mécanismes de détoxification et d'élimination des toxines de l'organisme, qui génère de nombreux déchets. Véritable drainant hépatique, le soufre participe aussi au bien-être de la peau et des cartilages. Le sélénium, un oligoélément proche du soufre que l'on trouve dans l'oignon, l'ail et l'ail des ours, a la faculté de chélater (capturer) les métaux lourds qui bloquent l'élimination des mauvaises graisses de l'organisme et participe grandement à sa détoxification. Le sélénium possède, en outre, une action antioxydante lui permettant de lutter contre le stress oxydatif, donc le vieillissement prématuré, en protégeant des radicaux libres générés par toutes sortes d'excès (soleil, médicaments, tabac, sport, polluants divers, etc.).
La plupart des alliacées (ail, ail des ours, poireau, oignon, cives) contiennent aussi de l'allicine, une substance active favorable à une bonne circulation sanguine et microcirculation cérébrale, ainsi qu'à une tension artérielle stable. Elle est aussi préventive de nombreux cancers et protège contre des attaques bactériennes, notamment dans la bouche, où elle neutralise la plupart des organismes pathogènes. C'est l'ail des ours qui en concentre le plus et potentialise, d'une manière générale, les vertus de l'ail cultivé.
Tour de main
En mode antigaspi
Ne jetez pas la partie vert foncé des poireaux d'hiver, saison durant laquelle ils sont le plus riches en inuline, en chlorophylle et en anthocyanes (antioxydants). Finement émincés ou grossièrement mixés en cas d'intestins sensibles, ils pourront compléter une soupe de légumes, garnir une quiche ou servir de bouquet garni pour parfumer un bouillon.
Fini les larmoiements
Éplucher et découper des oignons fait généralement larmoyer. Cette réaction est due à une molécule qui, en s'échappant une fois le bulbe libéré, devient lacrymogène. La bonne nouvelle, c'est qu'elle est soluble dans l'eau. Aussi, en pelant vos oignons sous un filet d'eau et en les rinçant avant de les émincer, vous viendrez à bout de ce désagrément.
Activer l'allicine
Pour être opérante, la puissante molécule d'allicine a besoin de subir une transformation enzymatique. Ainsi, les alliums doivent être dégradés, autrement dit coupés en petits morceaux, écrasés ou réduits en jus afin de libérer leur potentiel.
Un bactéricide naturel
Ajoutez généreusement les aulx et oignons émincés à vos marinades de viande ou de poisson : ils empêcheront toute tentative de prolifération bactérienne, vous évitant ainsi les risques d'intoxication alimentaire.
Un prestigieux tableau nutritionnel
Les polyphénols, antioxydants, anti-inflammatoires et immunostimulants sont nombreux dans les différents alliums, notamment les plus colorés (oignons rouges, échalotes). L'ail des ours, les échalotes et les oignons contiennent en particulier une belle quantité de bêtacarotène qui, dans l'organisme, se transforme en vitamine A aux nombreuses fonctions, parmi lesquelles une bonne vision, un système immunitaire efficient et le renouvellement optimal des épithéliums ou tissus cellulaires.
La quercétine, un flavonoïde facilement métabolisé contenu notamment dans les oignons (davantage dans les rouges que dans les jaunes), protège contre l'oxydation en général et le LDL ou « mauvais cholestérol » en particulier. Il inhibe également certains médiateurs de l'inflammation à l'origine de pathologies inflammatoires et contribue à prévenir l'ostéoporose et la dégradation des os. La quercétine ne disparaît pas à la cuisson, sous réserve que celle-ci soit douce et brève, car l'évaporation de l'eau en concentre au contraire les principes actifs. L'oignon compte, en outre, deux molécules à l'action complémentaire, la quercétine et la silice, un minéral qui participe à la fixation du calcium au niveau osseux.
Science ... Un agent antimicrobien
Une récente conférence a démontré les propriétés antibactériennes majeures de l'ail des ours (Allium ursinum), une plante sauvage comestible qui pousse au printemps. C'est précisément la saison qui invite à une détoxification du foie, salutaire pour se purger des graisses accumulées en hiver, nettoyer et relancer son organisme. Outre la haute valeur micronutritionnelle de cette alliacée, sa consommation saisonnière, en salade ou en pesto, a montré une activité antimicrobienne sur un grand nombre de bactéries, dont beaucoup résistent aux traitements antibiotiques actuels. L'ail des ours (consommé par ces derniers après leur hibernation) possède une action pharmacologique prouvée, en tant qu'antimicrobien mais aussi comme agent de désintoxication de l'organisme permettant de prévenir ou traiter certaines pathologies, notamment cardiovasculaires.
Attention aux intestins fragiles
Toutes les alliacées contiennent des fibres alimentaires, des fructanes de type inuline. En cuisine, on leur doit le fondu caramélisé lorsqu'on fait revenir à la poêle, à basse température de préférence, de l'ail, des oignons ou des échalotes. Ces fibres sont de véritables prébiotiques favorisant un transit de qualité et un bon équilibre du microbiote intestinal, qui régule ainsi sa partie pathogène à l'origine de gaz et de ballonnements. Attention toutefois aux intestins fragiles, qui gagneront à consommer des alliums en petite quantité. Le blanc des poireaux par exemple contient bien moins de fibres que la partie verte, un peu plus difficile à digérer selon les organismes.
Les vitamines et minéraux ne sont pas en reste dans ce prestigieux tableau nutritionnel, notamment celles du groupe B (poireaux, fleurs de cives et cives) et la vitamine C (cives, ail des ours, oignon et vert du poireau). Celles-ci sont hydrosolubles, par conséquent sensibles à la chaleur. Il est ainsi tout indiqué de cuire les alliums à la vapeur douce, et de préférence brièvement. Quant aux minéraux, le potassium alcalinisant, donc favorable à une bonne santé osseuse, est récurrent dans cette grande famille des alliacées.
Parmi les points de vigilance, mentionnons la teneur en sodium du poireau, à prendre en compte en cas de calculs rénaux ou urinaires. Consommer de grandes quantités d'ail, du fait de son fort impact sur la circulation sanguine, est déconseillé en cas de prise de traitement anticoagulant, de grossesse ou d'allaitement et avant une intervention chirurgicale. L'ail, l'ail des ours et l'oignon sont aussi à limiter quand les intestins sont irrités, mais aussi en cas d'hypotension.
Cette famille de végétaux riches en eau se distingue enfin par un faible apport calorique. De plus, les alliums sont diurétiques, participant à combattre la rétention des liquides de l'organisme. Reste, pour profiter de cette source de nutriments hautement protecteurs, à en consommer tous les jours, en petite quantité et crus, dans la mesure du possible, afin de ne pas altérer par la cuisson leurs composants bioactifs. Tout se prête à une consommation quotidienne : la diversité de leurs goûts et accommodements culinaires, leur disponibilité et leur conservation toute l'année, ainsi que leur coût raisonnable.
Comment les associer
En salade avec des haricots blancs
L'ail pilé et la ciboulette hachée minute relèvent à merveille une salade de haricots blancs. Ceux-ci gagnent, en outre, à être cuits avec un oignon coupé en deux piqué de clous de girofle.
Dans une omelette
Un grand classique de la cuisine facile consiste à cuire des œufs battus en omelette, baveuse pour qui l'aime ainsi, associés à une quantité généreuse de ciboulette hachée.
En pissaladière
Aulx et oignons préalablement revenus avec de l'huile d'olive et étalés sur une pâte à pain travaillée en forme de pizza, garnis d'anchois et d'olives, c'est la recette de la pissaladière, originaire du Sud de la France, qui tire son nom du pissalat, une sauce condimentaire préparée à base d'anchois ou de poissons salés.