Dossier
Quand santé rime avec sobriété (3/4)
Dans un contexte d'inflation et un environnement où les ressources végétales sont sous pression, il devient délicat de préserver sa santé sans abîmer la planète, ni se ruiner. Dans ce dossier, nous mettons l'accent sur les alternatives de soin abordables et durables afin de préserver sa santé tout en valorisant des filières vertueuses et en faisant des économies.
Des soins efficaces, durables et vertueux
Consommer des plantes sous forme de compléments alimentaires, d’huiles essentielles ou de tisanes pour prendre soin de sa santé part souvent de l’envie de recourir à des ressources naturelles non synthétiques pour se faire du bien et se rapprocher de la nature. Malheureusement, nos choix de produits de santé naturelle sont trop souvent dictés par des campagnes marketing, du green washing et des tendances sur les réseaux sociaux. Résultat, la frénésie consumériste de certaines plantes sauvages ou cultivées contribue à la destruction de certains milieux, voire à l’extinction de végétaux médicinaux.
Dans son ouvrage Manuel de phytothérapie responsable (éd. Terre vivante), l’auteure, médecin et anthropologue de la santé Aline Mercan livre des clés intéressantes pour aider les consommateurs à protéger ces ressources naturelles en proposant des alternatives aux propriétés similaires. Ainsi, elle rappelle que la rhodiole (rhodiola rosea), plante adaptogène utilisées dans des formulations contre le burn-out et l’anxiété, est menacée d’extinction en Eurasie. À la place, elle mentionne « le cassis de nos jardins, dont la tisane des feuilles ou le macérat glycériné des abondants bourgeons en font une adaptogène locale, tonique, renouvelable et bon marché ». Pour détoxifier un foie surchargé, elle recommande les graines moulues du chardon-Marie ou des branches de romarin en tisane plutôt que du desmodium exotique. En cas d’ostéoporose, l’ortie reminéralisante remplace le lithotamne, algue calcifiée qui met des siècles à se développer. Quant aux tendres pâquerettes, ressource abondante de nos régions, leur macération dans l’huile remplace à merveille celle d’arnica, en danger de disparition, pour confectionner un soin cicatrisant. Si vous souffrez d’arthrose, préférez le bugle rampant ou la scrofulaire noueuse à l’harpagophytum, plante d’Afrique du Sud qui disparaît pour cause de récolte trop abondante.
Trois plantes indigènes de nos régions
En France, nous avons la chance d’avoir environ 6 000 espèces de plantes indigènes, près de 900 espèces de mousses et environ 1 700 espèces d’algues. Selon les régions, déterminantes d’un climat et de la richesse des sols, certaines ont développé une composition moléculaire spécifique et des vertus médicinales ou alimentaires utiles. En voici trois à découvrir ou redécouvrir :
- Le pin maritime, emblématique de la Nouvelle-Aquitaine, se trouve principalement dans le massif forestier des Landes (le plus grand d’Europe). On récolte ses pommes de pin en avril à des fins comestibles, cosmétiques et pour récupérer de l’huile de graines, aux vertus hydratantes et apaisantes.
- La lavande de Provence qui colore de mauve le paysage et parfume l’air des champs entre juin et début août...
- . On use de ses propriétés à la fois sédatives et antibactériennes sous forme d’infusion, d’huile essentielle ou en petits sachets pour parfumer le linge dans les armoires.
- Le chou marin des plages de la baie de Somme : présent en abondance sur le littoral, le chou marin, également appelé « crambe maritime », est l’une des premières espèces colonisatrices du cordon des galets. Son parfum attire les pollinisateurs et on le consomme cuit à la vapeur, tandis que les jeunes pousses se cuisinent comme des endives ou des asperges.
Du côté de l’aromathérapie, même constat. « Les HE rares ou qui viennent de l’autre bout de la planète comme le tea tree, le ravintsara, le iary, la rose de Damas sont à la mode, alors que 80 % des pathologies peuvent être soulagées avec quelques HE locales », déplore Françoise Couic-Marinier. Parmi celles à éviter en particulier, citons l’HE de bois de rose figurant sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’encens oliban, résine aromatique précieuse gravement menacée d’extinction, ou encore le nard de l’Himalaya.
Il est important de garder en tête qu’il faut parfois une quantité considérable de plantes pour produire un seul flacon d’HE. Ainsi, quatre tonnes de pétales de rose de Damas sont nécessaires pour produire un litre de son huile essentielle. Une fois le flacon en main, rappelez-vous que chaque goutte qu’il contient est précieuse. Respectez les dilutions et les posologies aromatiques. Il vous durera plus longtemps et vous éviterez tout effet néfaste lié à un surdosage. « Une goutte, ce n’est pas cinq gouttes », rappelle la pharmacienne. D’autant qu’un dosage subtil est largement efficace, selon elle : « Une cuillerée à soupe d’hydrolat de camomille dans un verre d’eau suffit à prévenir les allergies. une goutte d’HE d’ail dans un flacon d’un litre d’huile d’olive sert de vermifuge aux enfants en cuisine, et une goutte d’HE de géranium Bourbon dans un pot de crème en fait un soin antirides ».
Filières et pratiques à suivre
Certains site, plateformes, cartes ou annuaires en ligne permettent de s’informer sur les moyens d’acheter des plantes, de l’alimentation biologique et de se soigner de façon durable et éthique. Voici quelques exemples :
- Via son annuaire en ligne, l’Agence bio permet de trouver les fermes, entreprises et distributeurs certifiés biologiques autour de chez soi. Annuaire.agencebio.org
- Les sites de Tela Botanica (Tela-botanica.org), Flore Alpes (Florealpes.com) et du Conservatoire national des plantes à parfum, médicinales et aromatiques (Cnpmai.net) permettent, lorsque vous partez cueillir des plantes pour vos remèdes ou pour cuisiner, de vous renseigner sur les espèces protégées.
- L’Annuaire des herboristes de Plantes & Santé répertorie en ligne de nombreuses adresses d’herboristes. Plantes- et-sante.fr/herboristes
Ainsi, par nos choix et par une consommation consciente de son impact environnemental, nous avons le pouvoir de valoriser des filières plus éthiques. Mais il n’est pas toujours aisé de s’y retrouver quant à l’aspect responsable et durable de ce que nous achetons. Les labels sont un des repères à notre disposition. « Celui d’Agriculture biologique, c’est la base, un gage de qualité de la plante et de la culture de la terre », assure le pharmacien herboriste Stéphane Rossi. L’occasion de rappeler qu’une étude de l’Inra publiée en 2018 mentionnait que la consommation de produits bio réduit de 25 % les risques de développer un cancer. Le label Simples (Syndicat inter-massifs pour la production et l’économie des simples) garantit quant à lui des produits naturels de qualité supérieure, et le label Fairwild une gestion durable des ressources végétales sauvages. Bio équitable, Écocert, Nature & Progrès ou Phytolia mettent l’accent sur l’origine et la traçabilité des plantes. Et même si tous les herboristes ne sont pas outillés pour estampiller leurs produits d’un label, les étiquettes peuvent aussi apporter des informations sur la provenance des ingrédients.
Il est vrai qu’une tisane dont les plantes cultivées en bio proviennent de petits producteurs locaux vous coûtera généralement plus cher qu’une tisane de supermarché. « C’est normal, étant donné que le rendement du producteur est faible et ses charges plus élevées », justifie Stéphane Rossi. Néanmoins, acheter ce type de produit en herboristerie ou en vente directe auprès de paysans et producteurs contribue à soutenir la filière des plantes médicinales locales et le métier d’herboriste plutôt que des marques ou des laboratoires qui ont plus de moyens.
Ma tisane est-elle de qualité ?
Si les tisanes porteuses d’un label bio garantissent l’absence de pesticides dans votre tasse, d’autres critères importants permettent, selon le pharmacien herboriste Stéphane Rossi, de juger de la qualité d’une tisane. Après avoir vérifié que celle-ci contient 100 % de plantes sans arômes ajoutés, mêmes naturels, le propriétaire de l’herboristerie Au temps des fées à Grenoble conseille dans un premier temps d’observer la tisane. « Elle doit d’abord être colorée, cela garantit sa fraîcheur ! Elle doit aussi être fragmentée en morceaux reconnaissables, et non en tout petits bouts de fond de sachet, cela montre qu’elle a été bien coupée », détaille le spécialiste. Qui invite, en fin de compte, à faire confiance à son odorat : « Votre tisane doit sentir bon ! », conclut-il. À vous de juger !Des séjours nature et santé abordables
Des séjours nature et santé abordables
Depuis que la santé naturelle et le bien-être sont de plus en plus au cœur de nos préoccupations, des offres de séjours santé ou des lieux dédiés à des retraites bien-être fleurissent partout en France. Seulement, peu d’entre eux proposent des tarifs abordables. Voici quatre idées de stages ou d’échappées douces à prix raisonnables.
- Gwenaëlle Héré-Mazé, herbaliste, organise des stages d’herboristerie, de cuisine sauvage ou de santé au naturel durant un week-end ou plus, sur l’île d’Ouessant. À partir de 251 euros par personne, tarif dégressif selon le nombre de participants. Melusmoudez.com
- Le domaine de la Dombes dans l’Ain, entre Lyon et Genève, propose des nuits dans des cabanes perchées, flottantes ou au milieu de parcs animaliers. À partir de 50 euros la nuit pour des logements de 6 personnes. Domainedeladombes.com
- Loin de l’agitation urbaine, au cœur du Trièves en Isère, le centre Terre vivante propose des stages d’environ 4 jours sur différents thèmes allant de la cuisine crue à la conception de potagers bio. À partir de 142 euros. Terrevivante.org
- L’association savoyarde Calenduline, créée en 2002 par des passionnées de plantes sauvages, propose entre autres des séjours ponctués de randonnées, balades nature, yoga, ateliers cuisine avec hébergement en gîte. À partir de 150 euros. Calenduline.jimdo.com