Le vin rouge,
radicalement bon !
L’homme a d’abord été cueilleur, chasseur se nourrissant de produits frais, puis cuisant ses aliments avec le feu. Il a probablement augmenté sa longévité avec l’extraction des polyphénols par la cuisson. En parallèle, il a pu observer que les oiseaux étaient friands de graines et de baies en voie de pourrissement sur le sol. Jusqu’à ce que, il y a quelque 40 000 ans, l’homme éprouve par lui-même l’effet euphorisant des fruits fermentés.
Un saut dans le temps plus tard, il découvre la vigne sauvage (Vitis sylvestris) en Anatolie, aux confins de la mer Caspienne, et le jus de raisin fermenté. Dès lors, il prend goût au vin ! Domestiquée pour donner un meilleur nectar, la vigne (Vitis vinifera) s’implante en Géorgie, en Iran, puis dans le reste du pourtour méditerranéen, pour arriver, vers – 600 av. J.-C., sur les côtes de Provence et, au IIIe siècle, remonter plus au nord, en Bourgogne.
Vin et santé, la polémique
C’est empiriquement que l’homme a découvert les bienfaits du vin sur sa santé, et ce bien avant Hippocrate. Des siècles plus tard, des scientifiques comme Pasteur ou notre contemporain Serge Renaud, père du french paradox, se sont aussi penchés sur la question, quitte à se retrouver au cœur de la polémique « vin contre santé ». Car nombreux sont ceux qui opposaient hier et opposent encore aujourd’hui le vin à la santé : abstinents, pratiquants de certaines religions, membres des ministères de la Santé, des Transports et du Travail, institutions comme l’Institut national du cancer… Pourtant, de grands progrès dans les connaissances sur le vin et la nutrition ont été accomplis ces dernières années.
Ainsi, en étudiant spécifiquement le risque vasculaire, le Pr Serge Renaud, qui a aussi exploré l’importance de la consommation de graisse, a pu donner des explications quant au french paradox : la consommation (raisonnée) de vin (rouge) associé à une alimentation méditerranéenne reposant principalement sur des fruits, des légumes, de l’huile d’olive, du poisson et des aromates est bien un facteur de faible mortalité. Serge Renaud a même montré que la mortalité est diminuée dans le cadre d’une consommation journalière de un à trois verres de vin.
Notons par ailleurs que les mérites du régime méditerranéen, qui peut intégrer des infusions ou des vins riches en polyphénols, ont été bien délimités (des études récentes montrent que ce régime est associé à une diminution des risques coronariens, de cancers du sein ou colorectal). Plus récemment, le Dr Jean-Pierre Rifler, s’appuyant sur la mesure du pouvoir antioxydant dans le sang, a conclu, avec l’étude dite « de Montbard », que la consommation de vin de Bourgogne, à raison de deux verres par jour pendant deux semaines, fait augmenter les défenses antiradicalaires du sang. En outre, cette consommation modérée améliore les paramètres lipidiques du sang chez des patients post-opérés d’un infarctus du myocarde. On voit donc les effets bénéfiques des polyphénols du vin rouge sur la santé.
Aussi, vingt-cinq ans après, plutôt que de parler d’un french paradox, il serait plus juste de parler d’un particularisme français, que de nouvelles connaissances sur le vin et la nutrition confortent. Nous avons bien affaire à un triptyque historique bénéfique associant le vin et la nutrition méditerranéenne à la santé !
À propos de l’auteur : N. Latruffe est l’auteur de Vin, nutrition méditéranéenne et santé (éd. universitaires de Dijon).