Homéopathie, le patient pris en otage
L’avis émis par la Haute autorité de santé (HAS) sur la soi-disant inefficacité des médicaments homéopathiques a été le prétexte à décider de leur déremboursement. Cette tentative d’évaluation par les experts de la HAS a surtout été une nouvelle illustration du dialogue difficile entre les différents courants de pensée au sein du monde médical.
Le grand dénominateur commun restant l’intérêt de nos patients, c’est la recherche d’un langage commun qui aurait dû être le plus grand défi, dans ce qui restera dans les mémoires comme une occasion ratée.
Car souvent les mêmes mots cachent des interprétations différentes, à l’insu même des interlocuteurs. Qu’entendons-nous par « service médical rendu », qu’est-ce que « rendre service », qu’est-ce que le « service médical » ? Comment l’apprécier à sa juste valeur, sur des données chiffrées ou sur le ressenti de la personne soignée ?
Sommes-nous certains que la demande du patient se limite à son symptôme, ou plutôt ne devons-nous pas chercher en deçà, les enchaînements de circonstances qui ont conduit à cet état de souffrance, ou au-delà les éventuelles complications qui pourraient découler d’une appréciation incomplète de la plainte initiale ? C’est dans ces subtilités que se niche la spécificité de la prise en charge homéopathique et la nécessaire finesse de son appréhension.
Prenons l’exemple d’une gêne respiratoire, sans même préciser s’il s’agit d’un asthme, d’une bronchite ou si son origine est allergique ou infectieuse. Le médecin va s’attacher à mesurer les volumes respiratoires pour évaluer cette gêne, mais on peut y rajouter d’autres considérations telles que les circonstances, l’ancienneté éventuelle des troubles ainsi que les autres plaintes concomitantes qui peuvent être aussi bien une anxiété, parfois mortelle, ou encore des accès d’hyper ou d’hypotension, sans oublier les nausées, éruptions ou les troubles du sommeil.
L’homéopathe aura prescrit Arsenicum album à l’anxieux agité, ou Lobelia inflata à l’épuisé qui ne cherche qu’à s’allonger, pour ne citer que ces deux exemples.
Il va de soi que soulager la gêne respiratoire est nécessaire et mesurable aisément. Mais soulager en même temps l’anxiété, l’insomnie et assurer un bon équilibre tensionnel constitue une véritable prise en charge globale du patient dont la qualité de vie sera améliorée. Voilà un véritable « service médical rendu » qui demeure cependant plus difficilement quantifiable.
De plus, pour chaque personne le tableau et l’enjeu seront différents. La variété des troubles associés rendra la systématisation statistique de l’évaluation compliquée, de l’insomniaque au somnolent, de l’affamé à l’anorexique, de l’excité au découragé… Comment faire entrer tous ces individus dans un seul et même cadre ? Par facilité, les experts de la HAS ont choisi de ne pas prendre en compte ces critères dans leur évaluation, tout en affirmant que seules leurs valeurs d’appréciation étaient valables.
Mais la grandeur et l’humanisme des médecins, quel que soit leur mode de pensée « conventionnel » ou « alternatif » seraient d’aller au-delà de leurs divergences pour se retrouver sur leur vocation de soignants et chercher un langage commun.
C’est ce qu’attendent de nous tous les patients qui ne doivent pas être pris en otage par leurs médecins.
À propos de l’auteure : le Dr Hélène Renoux est médecin généraliste et homéopathe