L'eucalyptus, un félin assoiffé
© Ida Jarosova
La beauté des eucalyptus, qui figurent parmi les plus hauts arbres du monde, et leur parfaite adaptation dans les forêts méditerranéennes, sont souvent contrebalancées par leur tendance à appauvrir les sols, dont ils puisent l’eau en profondeur.
Ce sont des arbres fascinants et étranges, avec les reflets bleutés de leurs feuilles suintant d’une gomme azurée et les larges squames d’écorces qui les déshabillent lentement. En Tasmanie dont ils sont originaires, ils sont considérés comme des arbres sacrés, purificateurs. Ils ont d’ailleurs contribué à assainir les sols marécageux en Algérie et dans le midi de la France, où ils se sont acclimatés. Leurs gommes aromatiques étaient déjà utilisées par les aborigènes d’Australie. Chaque espèce d’eucalyptus possède ses propriétés spécifiques. Eucalyptus globulus est connu pour ses vertus nettoyantes de l’arbre bronchique. L’huile essentielle extraite de ses feuilles est largement utilisée en pharmacie pour soigner les voies respiratoires et soulager certaines douleurs rhumatismales. Pour les homéopathes, Eucalyptus globulus est utilisé dans les bronchites aux sécrétions abondantes et purulentes, mais aussi pour des affections digestives ou génitales avec les mêmes sécrétions. Il pourrait même aider dans la prise en charge de certains cancers. On le retrouve aussi indiqué dans des rhumatismes inflammatoires touchant préférentiellement les mains ou les doigts.
Le tableau mental qui peut guider les prescriptions des homéopathes dessine un personnage compétitif, agressif. Dans ses caricatures, il s’agit d’un prédateur toxique cherchant la faille chez son concurrent qu’il attaquera plutôt que d’aspirer à la collaboration… Bref, un félin ! Mais ce tableau outré ne fait que figurer des tendances, heureusement compensées par des valeurs sociales protectrices.
Les prédateurs sociaux, dont l’esprit de « gagne » se manifeste jusque dans leurs appétences sexuelles dominatrices et agressives, n’expriment ces défaillances que si l’entourage ne les retient pas, que si les normes reconnues leur laissent accroire une certaine complaisance. Alors, compensant leurs doutes existentiels par une soif de gloire et de victoires, ils lâchent les rênes de leurs animaux intérieurs dans une jungle humaine qui refait régulièrement surface au sein de nos sociétés policées.
J’aime trop cet arbre majestueux pour l’accuser de faciliter de telles dérives, mais sachant que celles-ci préexistent dans l’âme humaine, il est bon de rappeler les garde-fous que nos ancêtres ont patiemment érigés pour nous en protéger : « liberté, égalité, fraternité ». Des valeurs fortes pour assécher les marécages de la prédation.