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Le charme discret de l'alchémille

Alchémille

C'est une humble plante des prés, perdue au milieu de l'herbe qui souvent la dépasse. Pourtant, ses vertus antioxydantes et cicatrisantes méritent que l'on s'y arrête et qu'on apprenne à l'accommoder. 

J’ai bien conscience en parlant de ­l’alchémille de ne pas être tout à fait juste : il faudrait dire les ­alchémilles, tellement il en existe d’espèces différentes. Certes, à l’œil nu, la plupart se ressemblent : ce sont des plantes basses des prairies, que l’on reconnaît aisément en tant que groupe à leurs larges feuilles arrondies et lobées, d’un vert glauque, ornées en leur centre d’un intrigant ­diamant liquide.

Depuis aussi loin que je me souvienne, j’ai côtoyé les alchémilles, mais, je l’avoue, sans vraiment m’y intéresser beaucoup. Il faut dire qu’à part la goutte d’eau qui la décore, née des exsudations du végétal, elle n’a rien de spectaculaire. Même sa floraison est discrète : de minuscules étoiles d’un jaune verdâtre, portées en petits groupes juste au-dessus des feuilles… En revanche, lorsque je montais dans les alpages, j’avais l’occasion de rencontrer l’alchémille des Alpes. Ce n’est pas que sa taille soit plus impressionnante – elle est au diapason des autres membres de la flore alpine, tous bas sur tige –, mais ses feuilles sont profondément découpées en segments irradiant du sommet du pétiole, comme une étoile verte, et elles sont recouvertes sur leur face inférieure d’un joli duvet clair qui leur donne un aspect soyeux très élégant. Si le vent les retourne, les pelouses se transforment en un tapis d’argent.

Alchémille des Alpes

Une particularité, l’autofécondation

On distingue les alchémilles vulgaires de celles des Alpes, qui comprennent chacune de nombreuses espèces. À l’intérieur du premier groupe c’est un peu la foire d’empoigne… Tela botanica en dénombre plusieurs dizaines d’espèces que seuls les ­spécialistes munis de loupes binoculaires et de flores adéquates sont capables de ­déterminer. Pour la plupart d’entre nous, les différences sont trop subtiles. La raison de cette complexité tient à ce que chez ces plantes, un individu a la faculté de produire ses graines sans qu’il y ait fécondation : c’est ce que l’on nomme parthénogenèse. De ce fait, on...

observe des lignées parallèles de types très légèrement différents les unes des autres.

À mon goût, les alchémilles ne font pas partie des meilleurs légumes sauvages. Je les récolte pour compléter mes cueillettes, car elles abondent dans les prés. J’en cueille les feuilles le plus jeunes possible, lorsqu’elles sont tendres et un peu fripées. En effet, leur texture s’affermit rapidement et réclame alors une mastication prolongée. Quelques-unes dans les salades en augmentent le volume sans y apporter grand-chose de plus… Les feuilles d’alchémille n’ont pas beaucoup de saveur et présentent une ­astringence qui n’est pas fort agréable. Il est donc préférable de les ­accommoder avec des ingrédients qui les relèvent – par exemple, de les cuire à l’eau pour les ramollir et de les mélanger avec une sauce blanche aromatique. Le résultat peut être convaincant. L’alchémille doit son astringence à ses tannins, de grosses molécules de polyphénols qui possèdent d’utiles propriétés. Certains sont antioxydants et tous coagulent les protéines : ce sont eux qui donnent l’impression que la bouche se rétrécit lorsqu’on croque une prunelle au détour d’une haie. Les tannins se trouvent dans de

nombreux végétaux – les glands par exemple – et en ­particulier chez toutes les espèces herbacées de la famille des rosacées, à laquelle appartiennent les alchémilles. C’est à leur action cicatrisante que les pimprenelles doivent leurs noms latins : ­ Sanguisorba officinalis et Poterium sanguisorba, de sanguis, sang, et sorbeo, absorber, car elles agissent comme hémostatiques et aident les blessures à se refermer rapidement. Elles se montrent aussi efficaces contre les diarrhées. Les alchémilles possèdent aussi ces vertus. Elles ont, par ailleurs, une action sur les règles trop abondantes ou les saignements suivant l’accouchement, ainsi que comme tonique utérin.

Herbier

L’alchémille (Alchemilla ­xanthochlora), parfois ­surnommée « manteau de Notre-Dame », est une plante vivace de 10 à 30 cm, glabre ou poilue. Les feuilles basales, assez grandes, d’un vert mat, sont munies d’un long pétiole. De forme générale arrondie et Alchémilleprofondément échancrées à la base, elles sont découpées en sept à onze lobes peu profonds, dentés en scie sur tout leur pourtour. Les feuilles que porte la tige, bien plus petites, présentent de larges stipules foliacées, dentées ou incisées. Les fleurs lilliputiennes, d’un vert jaunâtre, sont réduites à un calicule à quatre lobes aigus et à un calice à dents aiguës plus larges : la corolle est absente. Groupées en petits corymbes vers le ­sommet de la plante, elles sont présentes de mai à ­septembre. Il existe de très nombreuses autres espèces, ­généralement difficiles à ­distinguer. La plupart poussent dans les prés des plaines aux montagnes. Les espèces du groupe de l’alchémille des Alpes se rencontrent en altitude, dans les pâturages, les pelouses ou les endroits rocheux.

Recette sauvage : Velours d’alchémille et de pissenlit

Ingrédients :

  • 300 g de feuilles d’alchémille
  • 200 g de jeunes feuilles de pissenlit
  • 40 g de farine, 50 g de beurre
  • Trois quarts de litre de lait
  • Sel • Poivre • Paprika
  • Estragon frais
  • 200 ml de vin blanc
  • 2 cuillerées à soupe d’huile d’olive
  • 1 échalote.
  1. Faites bouillir les feuilles dans un grand volume d’eau salée, puis versez-les dans un récipient rempli d’eau froide. Égouttez-les et hachez-les.

  2. Préparez une béchamel épaisse avec la farine, 40 g de beurre et le lait. Salez.

  3. Mélangez la sauce aux légumes hachés avec du paprika et de l’estragon coupé. Versez dans un plat creux.
  4. Dans une casserole, faites bouillir le vin et l’huile d’olive jusqu’à réduction du tiers.
  5. Ajoutez un hachis fin d’échalote. Faites cuire quelques minutes, salez et versez la sauce sur les légumes.
  6. Mettez à réchauffer au four, placez sur le dessus le reste du beurre et ne remuez plus. Lorsque le beurre a fondu, elle est chaude.
  7. Mélangez.

Plus d'informations sur le site de l'auteur : https://couplan.com/  

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