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Le parc du château de Sassenage, la romance des grands arbres aux portes du Vercors

Sassenage

Classé monument historique, le parc du château de Sassenage, dans l'Isère, a fait l'objet d'une opération récente de restauration. Si vous aimez les arbres monumentaux, bicentenaires pour nombre d'entre eux, et les paysages somptueux de montagne, faites le détour.

A peine arrivée devant le portail, on lève les yeux, impressionnés. Pas à cause du château lui-même : construit au XVIIe siècle par une grande famille ­seigneuriale du Dauphiné dont l'origine remonte au XIe siècle dans le but de recevoir, celui-ci paraît classique aux yeux d'une novice. C'est le cadre qui saisit. Nous sommes au pied du massif du Vercors, à quelques kilomètres de Grenoble, et le château semble serti dans un écrin rocheux ­spectaculaire et immuable.

Jardins en Dauphiné

Pratiques horticoles spécifiques, présence d'architectes paysagers innovants comme Curten Aîné, émulation entre grandes familles locales… le parc du château de Sassenage s'inscrit dans la mémoire locale. Une histoire qui fait l'objet d'un livre, signé par l'architecte du patrimoine Jérémy Dupanloup et Jérémie Curt, historien et jardinier spécialisé dans les jardins historiques. À partir de l'étude d'archives, l'ouvrage décortique et replace l'histoire du lieu dans celle de l'art des jardins en Dauphiné. Facile d'accès, c'est aussi une mine d'informations sur un contexte régional très original.

Le parc du Château de Sassenage, éd. PUG, 2020, 112 p., 13 euros.

Monument historique classé en 1942, le domaine appartient depuis 1971 à la Fondation de France, qui lance entre 2015 et 2019 un programme de restauration du parc de 7 hectares. Le but est de retrouver les trois styles majeurs l'ayant imprégné au cours des siècles derniers : le jardin à la française du XVIIe siècle, anglo-chinois du XVIIIe siècle et le parc paysager du XIXe siècle. Dans cette optique, il a fallu se résoudre à abattre beaucoup d'arbres, trop vieillissants ou malades, et planter 5 500 autres végétaux, tout en tenant compte de l'excavation surprise de vestiges gallo-romains ! Si les plus vieux et les plus beaux arbres ont été épargnés, ces travaux récents expliquent ce sentiment d'inachevé par endroits, avec de jeunes arbres et arbustes filiformes semblant à peine sortis de leur pépinière.

Pachydermes végétaux

Après un passage dans la cuisine, nous nous dirigeons vers le jardin anglo-chinois qui semble filer sous la montagne. Sur la gauche, dans la partie paysagère, le cèdre du Liban nous fait de l'œil. Avec son port imposant, sans autre géant à proximité, cet arbre ­magnifique de 170 ans domine le site, comme un ­éléphant dans le désert. Nous rencontrons quatre platanes vigoureux au tronc pansu, des platanes d'Orient et communs de 30 à plus de 40 mètres. Plantés en 1780 donc bicentenaires, ils restent droits et en pleine santé. « Ils ne sont pas loin de devenir des arbres remarquables », souligne Alain Jam, conservateur des collections du domaine. Aujourd'hui banals, les platanes étaient à l'époque exotiques. Plus loin, l'écorce ambrée et graphique d'un cerisier de Mandchourie rappelle les jambes d'un okapi. Là, tilleuls et marronniers cachent le mur d'enceinte, dont la fonction initiale était de faire continuité avec le « grand paysage », et de s'épargner la vue du village alentour, un souhait du comte de l'époque !

Platanes exotiques

Plantés en 1780, les platanes de la partie anglo-chinoise sont la plus grande richesse du parc. Le platane d'Orient (Platanus orientalis) fut introduit par les Romains tandis que celui d'Occident (Platanus occidentalis), est arrivé d'Amérique au XVIIe siècle. Le platane commun (Platanus x acerifolia) est un hybride, produit en France au XVIIe siècle.

Le voyage se poursuit le long d'allées courbes où les arbustes tendent des branches couvertes de fruits. Les mésanges font de la voltige entre l'arbre aux faisans et ses baies pourpres, l'argousier aux fruits orange vif et les bonbons roses du fusain d'Europe. En cette saison froide, le parc dégage une impression de profondeur et de netteté. Sur fond de roc monumental, la palette végétale prend des airs psychédéliques. Un lespedeza de Thunberg penche sous le poids de ses fleurs violettes, et les feuilles du sumac de Virginie dessinent sur le ciel des peignes enflammés à grosses dents.

Au fait, pourquoi « anglo-chinois » ? C'est qu'un pavillon dit chinois fut ici bâti en 1799, époque des expéditions nourrissant la quête d'exotisme à laquelle les « fabriques », souvent des pagodes ou petits temples, ­répondaient en partie. Au même moment, le jardin à la française aux formes rectilignes traduisant la mise au pas de la nature, est délaissé pour celui à l'anglaise, qui donne l'impression d'une nature indomptée par des mises en scène pittoresques. Démoli au bout de trente ans, le pavillon n'est plus et le jardin n'a plus rien de chinois, ce que confirme Alain Jam, ­conservateur des collections du domaine.

Exotiques et indigènes

Au fur et à mesure que l'on approche du parc paysager, on a la sensation de rapetisser : cette partie date des années 1850, c'est le royaume des arbres. En se retournant vers l'est, on note la symétrie créée par les deux platanes encadrant le château, avec au nord la Chartreuse et plus loin au sud, les neiges de Belledonne. Dans la rivière dite anglaise dérivée du Furon, torrent prenant sa source dans le Vercors, un cincle plongeur pêche. Le lit, bétonné sur quelques mètres, jure avec le reste. « Parti pris historique » nous dit-on, le matériau a vraiment été utilisé au XIXe siècle. Frênes élancés, érables champêtres, tulipier de Virginie, pins noirs ­d'Autriche, orme de Sibérie, cèdres de l'Atlas et de l'Himalaya côtoient ici les puissants noyers noirs d'Amérique alignés le long de l'allée. Du coin de l'œil, le grand cèdre du Liban veille.

La balade se termine près d'une île où ­rougit un copalme d'Amérique avec à son pied, des cornouillers sanguins qui lancent leurs tiges en l'air. Penché sur des canards, un saule pleureur mélancolique. En quittant la cour d'honneur et ses alignements de jeunes tilleuls, témoins de l'ancien jardin à la française, une envie : ­revenir, pour voir comment évolue la cohabitation entre une montagne, des ­végétaux vénérables et des plus jeunes aux longues années devant eux.

Infos pratiques

Comment y aller :

  • En voiture, De Lyon : 1re sortie après le péage de l'A 48, suivre Villard-de-Lans, Sassenage.
  • En train, TGV jusqu'à Grenoble Tram ligne A, arrêt Fontaine La Poya, puis bus ligne Proximo 20.

Horaires et infos :

  • Accès libre toute l'année du lundi au vendredi de 8 h à 17 h.
  • Visite guidée du château chaque 1er dimanche du mois, sur réservation.

Contact : 

Tél. : 04 38 02 12 04. Site : www.chateau-de-sassenage.com

Où dormir Hôtel Le Relais de Sassenage, tél. : 04 76 27 20 21, chambre dès 68 € la nuit.https://relais-sassenage.com

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Plantes & Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.
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