Témoignages. Comment j'ai surmonté la maladie de Lyme
Avec 67 000 nouveaux cas en France en 2018, le nombre de personnes souffrant de la maladie de Lyme a atteint un record. Mais il n'y a toujours pas de consensus médical dans la prise en charge de cette pathologie complexe aussi bien dans son diagnostic que dans sa symptomatologie. Pourtant des malades parviennent à stabiliser leur état de santé. Ils sont accompagnés par des thérapeutes pionniers qui élaborent d'autres protocoles. Témoignages.
SOS piqûre de tique
Le bon geste. La retirer au plus vite avec un tire-tique dans un geste de rotation pour dévisser l’animal sans laisser la tête à l’intérieur de la peau.
Le mauvais réflexe. Attendre pour retirer la tique ou utiliser de l’éther, un corps gras ou toute autre substance pour « l’endormir ». Le parasite risque alors de libérer ses bactéries dans le sang.
Désinfection. Appliquer sur la piqûre de l’eau oxygénée puis pendant trois jours de l’huile essentielle de tea tree. Si des symptômes inhabituels apparaissent : maux de tête, syndrome grippal, douleurs articulaires ou érythème migrant (le prendre alors en photo), consultez un médecin. Ils peuvent se manifester jusqu’à trente jours après la piqûre.
Douleurs articulaires, fortes migraines, problèmes de vision, fièvre… La maladie de Lyme transmise par les tiques est une pathologie lourde aux symptômes multiples. Ces derniers peuvent continuer de s’enchaîner y compris après le traitement de ving-huit jours d’antibiothérapie qui est en général préconisé. Comme si leur pathologie n’était pas assez pénible, les malades doivent aussi faire face à une belle cacophonie sur le plan médical. Les associations et les collectifs attendent depuis longtemps une prise en charge coordonnée et structurée. Certes, cinq centres hospitaliers de référence ont été nommés en juillet dernier (voir adresses à la fin de l’article), mais l’espoir des associations de patients a vite cédé la place à l’inquiétude. Selon elles, ces centres dans lesquels exercent des médecins infectiologues, ne reconnaissent pas le syndrome persistant polymorphe, l’aspect chronique de la maladie de Lyme. Les associations avaient pourtant bien avancé l’an dernier en collaborant avec la Haute autorité de santé pour publier un protocole de soins et de diagnostic sur Lyme, le premier du genre. Mais, en mai, la Société de pathologie infectieuse en langue française (SPILF) contre-attaquait en édictant ses propres recommandations, plus rigides en termes de diagnostic et de traitements antibiotiques.
Par ailleurs, les tests de dépistage sanguins en France ne sont toujours pas fiables. C’est pourquoi Déborah Jublin, naturopathe à Lyon a commencé un tour d’Europe pour une mise à plat de tous les traitements. « La borréliose peut quitter rapidement le sang et se loger ailleurs, dans les muscles, les tendons, le cerveau, s’inquiète-t-elle. Il y a beaucoup de malades qui sont négatifs au test Elisa alors qu’ils sont infectés par une maladie vectorielle à tiques. On leur diagnostique d’autres pathologies et comme ils ne sont pas bien traités, ils basculent dans une forme chronique de la maladie. »
Tour d’Europe sur les traces de la maladie de Lyme
Dresser un état des lieux européen des diagnostics, des traitements conventionnels et naturels de la maladie de Lyme, c’est le projet audacieux de la naturopathe Déborah Jublin, spécialisée dans l’accompagnement de la maladie vectorielle à tiques. Elle fait partie du collectif Lyon Lyme & Co, aux côtés de médecins et de thérapeutes. Financée par ses fonds propres et par un site de crowfunding, elle a organisé un voyage de dix-huit mois en camping-car avec sa famille. Parcourant actuellement l’Europe jusqu’au Danemark. Elle a préparé cinq questionnaires différents destinés aux médecins, thérapeutes, associations et membres de la société civile rencontrés sur sa route.
L’écoute primordiale du patient
« Il est urgent d’avancer », poursuit Déborah Jublin. Car il est clair que ces querelles ne bénéficient pas aux malades. Toutefois, le point positif réside aujourd’hui dans le fait que pour appréhender cette forme chronique très complexe, des réseaux de thérapeutes et de médecins se mettent en place. Conscients qu’il faut sans doute changer de paradigme, ils proposent des traitements naturels personnalisés. « Pour traiter la maladie de Lyme, on doit être à l’aise avec son aspect polymorphe, aux 1 000 visages », explique Dimitri Jacques, naturopathe à Orléans. Une des clés, selon lui, c’est la bonne connaissance du patient : « Il faut prendre le temps pour cerner son histoire, son contexte, sa psychologie. L’étude du terrain biologique est cruciale : deux personnes avec les mêmes symptômes et les mêmes bactéries, je ne les traiterai pas de la même façon ni avec les mêmes dosages de plantes, huiles essentielles ou compléments alimentaires. Il faut regarder si on doit procéder très progressivement pour éviter des réactions violentes ou bien y aller en force. » Dimitri Jacques axe sa pratique sur le microbiote et l’écosystème intestinal : « Bien souvent, les malades infectés par la maladie de Lyme ont un système immunitaire très déprimé qui laisse proliférer les virus et aggrave leur état général. Je pars sur des traitements par phases avec un rendez-vous par mois. Je ne lâche pas mes patients car l’écoute est primordiale. » C’est ainsi qu’il suit le jeune Gabriel Degron depuis un an et demi. Cédric Viaud et Sophie Benarrosh, malades quant à eux depuis plus longtemps, ont pris d’autres chemins thérapeutiques. Ils sont passés notamment par la case antibiothérapie, avant de tester diverses approches alternatives qui leur apportent un peu de répit. Pour tous les trois, ces options thérapeutiques redonnent de l’espoir.
"J’ai eu envie de tester un protocole associant phyto, homéo et aroma", Cédric Viaud
Plusieurs piqûres de tiques entre 2002 et 2004, une très grosse fatigue en 2006, mais Cédric Viaud ne fait pas encore le lien. Il ne connaît pas la maladie de Lyme et il faudra plusieurs années pour qu’un vétérinaire lui en parle.
Le test sanguin est positif, un médecin lui prescrit des antibiotiques : « Sur le moment ça m’a fait du bien, mais j’ai rechuté assez vite ». Son père, médecin, l’emmène au service infectieux de l’hôpital de la Croix-Rousse de Lyon en 2011 : on lui prescrit quatre semaines d’antibiothérapie en intraveineuse puis en intramusculaire. « Ce service m’a traité comme si je venais d’être infecté alors que j’incubais la maladie depuis des années ». Cédric connaît six mois de répit, puis les symptômes reprennent de plus belle. Il tombe en dépression.
En 2015, malgré des antidépresseurs de plus en plus forts, le jeune homme fait une attaque de panique et se retrouve plusieurs jours en hôpital psychiatrique : « J’avais l’impression d’avoir une maladie mentale » ! Sa mère écoute alors une émission de radio sur la maladie de Lyme qui décrit des symptômes similaires à ceux de Cédric. Il rencontre, à ce moment-là, un professeur lyonnais qui « reconnaît enfin la chronicité de la maladie et les symptômes psychiatriques associés ». Il lui prescrit une antibiothérapie de six mois plus longue que les préconisations officielles : « Très rapidement, j’ai eu l’impression de ressusciter. Mais un mois après la fin du traitement la fatigue est revenue. » Des effets secondaires apparaissent comme la candidose. Jusqu’en janvier dernier, Cédric alterne antibiothérapies, compléments alimentaires et aromathérapie. Chaque fois, c’est la déception, et la rechute.
Aujourd’hui, il a arrêté tout antibiotique et suit des traitements non conventionnels et des périodes de jeûnes. Cédric s’est découvert une « intoxication carabinée aux métaux lourds » et suit un protocole pour les éliminer, espérant ainsi que son organisme accepte mieux les traitements. Il consulte aussi régulièrement un naturopathe dans le sud de la France : « Il m’a d’abord fait un test RAC (réflexe auriculo cardiaque) pour identifier, selon lui, la souche de borréliose dont je souffre. J’étais un peu sceptique, mais j’ai eu envie d’essayer son protocole mélangeant homéopathie, phytothérapie et aromathérapie. » Un protocole à base de scutellaire, d’Uncaria tomentosa, de bromélaïne et pour les gélules d’huiles essentielles : origan, romarin à verbénone, tea tree, cannelle, girofle, livèche.
Résultat : plus aucune rechute depuis sept mois : « à 40 ans, Je vais beaucoup mieux, je suis moins fatigué, j’ai plus de vitalité, je peux totalement assumer mon travail. J’ai même arrêté les antidépresseurs. » Cédric le sait, rien n’est acquis, mais l’espoir renaît.
"Les fleurs de Bach m’apaisent au quotidien dans mes phases d’irritabilité", Sophie Benarrosh
Sophie Benarrosh est une guerrière de la maladie de Lyme. Plus de vingt ans déjà qu’elle se bat contre une cinquantaine de symptômes qui la laissent souvent alitée, épuisée.
C’est le professeur Christian Perronne qui a mis un nom sur sa pathologie : « C’est un expert de la maladie de Lyme et je suis son cas le plus compliqué. Nous avions tout tenté en traitement antibiotique et antiparasitaire. Il ne savait plus quoi me proposer pour aller au-delà des micro-améliorations obtenues. » Sophie ne peut quasiment plus rien supporter. Les produits aussi chimiques que naturels provoquent, dans son corps, des fortes réactions d’Herxheimer. Ces aggravations transitoires des symptômes sont dues aux toxines libérées par les bactéries lorsqu’elles meurent. Preuve que les traitements fonctionnent, mais son organisme est trop affaibli.
Elle arrête tout et cherche d’autres pistes : « Je me suis demandé pourquoi mon organisme explosait dès la moindre ingestion de substances et j’ai découvert que j’étais lourdement intoxiquée aux métaux lourds, un vrai nid pour les bactéries comme Borrelia. Une bonne raison pour que les traitements ne fonctionnent pas bien. J’ai entrepris une désintoxication depuis quatre ans et je vois une amélioration sensible. Le professeur Perronne l’a constaté lui aussi. »
La médecine naturelle l’aide. Ses principaux alliés : extrait de pépins de pamplemousse en cures, Fleurs de Bach, cocktail d’huiles essentielles, pollen, guarana pour « avoir du peps » le matin. « Ils sont stimulants et me soulagent. Les fleurs de Bach comme Rescue, Châtaigner, Marronnier, Star of Bethlehem ou Aigremoine, en alternance, m’apaisent au quotidien dans mes phases d’irritabilité et pendant mes insomnies. Mon sommeil n’est toujours pas réparateur, mais je suis moins stressée et c’est déjà énorme pour moi. »
Elle a également supprimé de son alimentation le gluten, le lait de vache et les produits industriels. Une stratégie globale payante : ses douleurs sont un peu moins fréquentes et moins fortes. Cette battante commence à remonter la pente tout doucement. Et pourtant, à certains moments des crises très intenses ressurgissent : « Il y a deux ans, j’ai compris que j’étais électrohypersensible en plus de tout le reste ! L’exposition au wi-fi, à la 4G réactive violemment mes symptômes. Quand je suis loin des ondes, au milieu des arbres et des plantes, je ressens un vrai apaisement. » Sophie a pris une décision radicale : vivre en pleine nature la majeure partie du temps pour se donner une « vraie chance » de canaliser la maladie.
"Grâce à de nombreuses huiles essentielles, nous avons délogé les bactéries", Gabriel Degron
Ses parents sont forestiers de formation et emmènent souvent Gabriel en forêt pour pêcher. « J’ai été piqué par des tiques mais sans remarquer d’érythème migrant. Au lycée, j’ai commencé à être très fatigué, je séchais de plus en plus les cours et j’ai même sauté la moitié de mon année de terminale. » Ses médecins évoquent un surentraînement sportif, le stress des examens et même la crise d’adolescence ! Mais les symptômes sont bizarres : des migraines tout le temps, des douleurs aux yeux, aux articulations, une fatigue extrême et des pertes de mémoire sur le court terme. Sa mère, bien renseignée, pense à la maladie de Lyme. « J’ai fait un test Western Blot positif. Malgré ça, les médecins classiques que je suis allé voir sont restés bloqués sur d’autres diagnostics et m’ont prescrit des traitements inutiles. Moi, ça m’a vraiment soulagé de mettre un nom sur ma maladie, car au moins on sait contre quoi on se bat ! »
Avec sa mère, ils choisissent des traitements naturels. « Pas d’antibiothérapie, car nous avons vu des effets négatifs sur certains de nos amis. » Gabriel est suivi aujourd’hui par un médecin homéopathe, spécialisé dans la maladie de Lyme, et surtout par un naturopathe, Dimitri Jacques. « Il m’a expliqué le lien important pour Lyme, entre l’intestin et le cerveau. Les premières analyses sur mon microbiote étaient catastrophiques. On a commencé par une phase de nettoyage des reins et du foie avec du chardon-marie, du Chrysanthellum et du Desmodium, des poudres à base de plantes (NutriInflam) et des enzymes. On a aussi réensemencé ma flore intestinale. Déjà, j’avais moins de fatigue et de douleurs. Après, il y a eu la phase agressive pour attaquer les bactéries : des gélules d’huiles essentielles de thym borneol et linalol, niaouli, gingembre et pin sylvestre et d’autres à base de cannelle, pamplemousse, origan, tea tree, girofle, thym linalol, basilic et romarin cinéole. C’était très difficile, mes symptômes empiraient. » Son naturopathe lui explique alors que « c’était le signe qu’on dérangeait les bactéries. »
« Du coup, ça m’a motivé pour supporter la douleur, ajoute Gabriel. Là, je termine une phase où je renforce mon système immunitaire avec des compléments, du magnésium, de la vitamine C et des champignons avant de reprendre une séquence d’attaque. Après un an et demi de traitement, c’est le jour et la nuit ! Avant, je ne pouvais même plus me lever de mon lit. J’avais des idées noires, j’avais tout arrêté, même mes études. Là, à 19 ans, je recommence à avoir des perspectives, j’ai repris le sport à un bon niveau. Je peux entreprendre à nouveau des choses. »
Utiliser les propriétés antibiotiques de la cardère
Pour s’attaquer à la borréliose, la bactérie de Lyme, la cardère (Echinacea dipsacus fullonum) possède des atouts indéniables grâce à certains de ses composants : ioganine, cantleyoside, acide chlorogénique, acide caféique. Outre ses propriétés antibiotiques, la cardère a des effets antibactériens et renforce le système immunitaire, selon des découvertes récentes.
De même, elle stimule les organes d’élimination comme le foie et les reins.
Ses racines, en particulier, sont utilisées contre la borréliose. Elles doivent être bio et consommées, les plus fraîches possible, sous forme de tisanes ou de teinture mère. Cette plante est également prescrite en gélules. Elle est contre-indiquée pour les femmes enceintes.
À lire :
- De l’intestin aux maladies psy, par Dimitri Jacques, éditions Quintessence, mars 2017
- Maladie de Lyme, empoisonnement aux métaux lourds… NON ce n’est pas dans ma tête, ni dans la vôtre !, par Sophie Benarrosh, Leduc.s éditions, mai 2017.
Cinq centres de référence Lyme :
- Le CHU de Clermond-Ferrand associé au CHU de Saint-Étienne
- Le CHU de Marseille
- Le CHU de Rennes
- Le CHU de Strasbourg associé au CHU de Nancy
- Le groupe hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges associé au CHU de Créteil