Dossier
Ôter les maux de la bouche (2/5)
Manger, boire, parler, sourire, embrasser… Notre bouche est essentielle à nos besoins primaires, en plus de constituer l'une des premières barrières de défense de l'organisme. Dans ce dossier, chirurgiens-dentistes et phytothérapeutes nous apprennent à prendre soin de notre santé bucco-dentaire naturellement afin de préserver notre santé générale.
Adopter une bonne hygiène buccale
C’est un fait, certaines personnes ont tendance à développer très tôt des caries et de petites inflammations buccales, alors que d’autres jouissent d’une bonne santé bucco-dentaire sans faire plus d’efforts. Normal, la qualité de nos dents dépend de notre héritage génétique. « Lorsqu’elle se forme, la dent peut avoir une morphologie compacte qui empêche le passage de bactéries à l’intérieur, mais elle peut aussi se montrer poreuse et peu résistante face aux pathogènes », explique Florine Boukhobza, chirurgienne-dentiste et phytothérapeute. Il en va de même pour l’os situé sous la gencive, plus facilement attaquable par les bactéries chez certains, ce qui les prédispose aux maladies parodontales.
Que l’on ait ou non un bon capital de départ, il peut toutefois se dégrader rapidement si l’on ne pratique pas une bonne hygiène buccale quotidienne. Et cette dernière commence par une visite chez le dentiste au minimum une fois par an afin de s’assurer que tout est en ordre, qu’aucune anomalie ne se développe, et d’effectuer un détartrage le cas échéant. Au fil du temps, nous avons en effet tendance à accumuler de la plaque dentaire entre les dents et au niveau de la gencive. Si cet amas de bactéries n’est pas retiré tous les jours grâce à un brossage rigoureux et un nettoyage interdentaire, il se transforme en tartre et nécessite un nettoyage plus profond chez le dentiste. « Pour éviter le détartrage annuel, on brosse ses dents tout en massant la gencive grâce à un mouvement rotatif vertical », détaille Franck Ponsaty, chirurgien-dentiste. Et ce, à l’aide d’une brosse (électrique ou non) à poils souples, deux fois par jour minimum, après le petit déjeuner et le dîner. Le pH de la bouche et la salive devenant très acide au cours du repas, se brosser les dents trente minutes après avoir mangé s’avère plus avantageux pour leur santé. Ce laps de temps permet en effet à la salive de perdre en acidité et de se recharger en minéraux, ce qui la rend protectrice de l’émail car elle y dépose un film reminéralisant. Si vous souhaitez éviter davantage l’amas de plaque dentaire, ajoutez un brossage supplémentaire le matin au réveil. « La quantité de salive diminue pendant la nuit et laisse le champ libre aux bactéries. Cette habitude matinale limite l’accumulation de plaque dentaire et permet aux dents propres d’amorcer leur processus de reminéralisation avant d’être en contact avec les aliments du petit déjeuner », recommande Florine Boukhobza.
Une tisane aromatique assainissante
Plutôt que d’utiliser des bains de bouche du commerce, souvent formulés à base d’un ou plusieurs ingrédients...
polémiques, optez une fois par mois pour cette recette assainissante aux plantes aromatiques et aux épices.
Ingrédients : 2 c. à soupe de menthe fraîche • 2 c. à soupe de persil frais • 5 clous de girofle • ½ c. à café de graines de cardamome.
Méthode 1. Faire infuser le mélange dans 50 cl d’eau chaude pendant 15 minutes 2. Filtrer, laisser refroidir et conserver 3 jours au frigo 3. Se gargariser avec 1 verre de la préparation pendant 3 minutes 1 fois par jour pour assainir la bouche.
Concernant les dentifrices, le plus important réside dans le fait de les diversifier afin de conserver une flore buccale riche et variée. Un tube à la propolis, un autre à la myrrhe le mois suivant, avant de passer à celui enrichi au ratanhia feront de votre bouche une réserve à bonnes bactéries ! Sachez toutefois qu’il ne faudra pas abuser (pas plus de deux fois par semaine) de ceux à l’argile ou au charbon végétal, car si leurs vertus absorbantes permettent d’éclaircir les dents, ils se montrent abrasifs pour l’émail à long terme. Franck Ponsaty recommande également les dentifrices sans substances polémiques telles que le fluor et le triclosan, suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. On évite aussi ceux comportant du dioxyde de titane, soupçonné d’être cancérigène, ou encore des agents irritants comme le sodium lauryl sulfate. Si vous êtes partisan du fait maison, votre formule devra contenir des huiles essentielles anti-infectieuses à large spectre, telles que celles de clou de girofle ou de tea tree (le citron n’est pas suffisant !). Ces dernières empêchent la dégradation du dentifrice en évitant son infestation par des bactéries agressives. Enfin, pour parfaire le brossage, le recours au fil dentaire trois fois par semaine au minimum, retire la plaque dentaire située entre les dents. Attention toutefois à ne pas s’arracher les gencives ! Introduisez-le délicatement par un mouvement de va-et-vient horizontal. Si vos dents sont serrées, un fil dentaire ciré glissera plus facilement. Pour des dents espacées, privilégiez la brossette interdentaire.
Vous avez l’habitude de faire un bain de bouche après vous être brossé les dents ? La praticienne recommande plutôt l’utilisation d’un spray à la propolis afin de renforcer l’immunité de la sphère buccale. « Une fois par semaine, un pschitt le matin dans la bouche prévient les infections et renforce le microbiote ». Sachez qu’un spray indiqué pour la gorge pourra très bien convenir. Cette routine peut s’additionner selon la spécialiste d’une cure, une à deux fois par an, d’échinacée sous forme de teinture-mère ou d’EPS à raison d’une cuillerée à café par jour pendant un mois pour prévenir l’apparition de caries et conserver une bouche saine et forte.
Quant au nettoyage de la langue, il s’agit à l’origine d’un rituel issu de la médecine ayurvédique qui consiste à retirer l’enduit et les dépôts accumulés soit avec la brosse à dents, soit à l’aide d’un gratte-langue en cuivre. S’il présente l’avantage de laisser une sensation de propreté en bouche, son usage quotidien ne fait pas l’unanimité parmi les dentistes, qui pointent le risque d’altération du microbiote présent sur la langue au fil du temps.
La langue selon la médecine traditionnelle chinoise
L’observation de la langue est l’un des outils diagnostiques de la médecine traditionnelle chinoise. Le chirurgien-dentiste Franck Ponsaty, formé à cette discipline, pointe certaines caractéristiques particulièrement révélatrices :
- Sa couleur Une langue en bonne santé est rose. Si elle est pâle, cela indique un vide d’énergie (chi), ou un excès de froid donnant lieu à des selles molles, une frilosité, une voix faible. À l’inverse, une langue rouge dénote la présence de chaleur (fièvre, pression artérielle, selles sèches). Une langue rouge foncé est synonyme de sécheresse (absence de salive) tandis qu’une langue violette révèle une stase de sang (un potentiel trouble circulatoire).
- L’enduit (la pellicule qui la recouvre) Sec, il indique une pathologie de sécheresse ou de chaleur touchant les organes du cœur et/ou du foie. Épais et jaune, il reflète la présence de toxiques (tabac, alcool, aliments gras ou sucrés) ou d’émotions intenses (colère, peur, haine…). S’il est gras (glaires), c’est un signe de pensée excessive ou de fragilité au niveau de la rate.
Gandush, rituel ayurvédique purifiant
Pratique traditionnelle de l’ayurvéda, le gandush, appelé aussi oil pulling, est un rituel d’hygiène buccale incontournable du matin. Il vise à renforcer les dents et les gencives, et à avoir une meilleure haleine tout en diminuant le risque de caries.
Ingrédients : 1 c. à soupe d’huile végétale de sésame.
Méthode : 1. À jeun, avant le petit déjeuner, garder en bouche l’huile de sésame pendant au minimum 5 minutes et malaxer en la faisant passer énergiquement entre les interstices des dents, d’avant en arrière, pour qu’elle se charge en toxines 2. Cracher dans un mouchoir puis jeter celui-ci à la poubelle 3. Rincer la bouche à l’eau tiède avant de passer au brossage des dents.
Bien entendu, ces conseils bucco-dentaires ne dispensent pas d’une hygiène alimentaire spécifique à la santé de la bouche. Car maintenir sa flore et plus largement sa bouche en équilibre passe par l’adoption d’un régime comprenant des ingrédients alcalins tels que les légumes verts, oléagineux, fruits frais non acidifiants. Ces derniers enrichissent la flore et la salive en minéraux et vitamines, renforçant leur rôle protecteur sur la sphère buccale.
Les plantes de la bouche
Le ratanhia
Le ratanhia (Krameria lappacea) est un arbrisseau originaire d’Amérique du Sud, que les Indiens des Andes appelaient « racine pour les dents ». Les populations indigènes l’utilisent depuis toujours pour soigner les inflammations bucco-dentaires. Extrêmement astringente, hémostatique, antibactérienne grâce notamment à sa teneur en acide tannique, la racine de ratanhia s’avère utile en cas de gingivite ou de gencives sensibles, sous forme de bain de bouche désinfectant ou en gargarisme contre l’inflammation des muqueuses buccales. On retrouve encore aujourd’hui la plante dans de nombreux dentifrices qui renforcent les gencives.