Dossier
Ôter les maux de la bouche (4/5)
Manger, boire, parler, sourire, embrasser… Notre bouche est essentielle à nos besoins primaires, en plus de constituer l'une des premières barrières de défense de l'organisme. Dans ce dossier, chirurgiens-dentistes et phytothérapeutes nous apprennent à prendre soin de notre santé bucco-dentaire naturellement afin de préserver notre santé générale.
Aphtes, caries, mycoses… Soigner les maux quotidiens
Lorsqu’on évoque les maux de la bouche, le problème qui nous affecte en premier lieu, petits ou grands, c’est la carie. Et là, aucun remède de phytothérapie ne remplacera un brossage biquotidien méticuleux et une alimentation modérée au niveau de l’acidité et du sucre. Rappelons que le sucre en bouche favorise la bactérie Streptococcus mutans qui va le transformer en acide, attaquer l’émail, développer la plaque dentaire puis des caries. Quant à l’acidité causée par l’alimentation et le stress, « elle va déminéraliser la salive, qui ne pourra plus déposer un film protecteur sur l’émail », prévient Catherine Rossi, chirurgienne-dentiste holistique et auteure de Prendre soin de ses dents grâce aux remèdes naturels. Aux personnes sujettes aux polycaries, elle recommande d’augmenter leur apport en calcium, phosphore, magnésium, silicium et en vitamines D3 et K2 pour « accélérer la reminéralisation dentaire et ralentir le processus carieux » en attendant le prochain contrôle. On aura intérêt à faire des cures régulières de bains de bouche d’une semaine avec une solution à la propolis qui réduit d’environ 40 % la bactérie Streptococcus mutans dans la salive, selon des chercheurs israéliens. On peut alterner avec des rinçages à l’huile de pépin de courge pour éviter la décalcification.
Le miel de manuka, un allié
Originaire d’Australie et de Nouvelle-Zélande, le miel de manuka (Leptospermum scoparium) possède une forte concentration en méthylglyoxal (MGO), aux puissantes propriétés antibactériennes. Lors d’essais in vitro, il a montré sa capacité à inhiber la croissance de la bactérie Streptococcus mutans, responsable de la formation des caries. Plusieurs études ont conclu que ses remarquables vertus antiseptiques combattaient efficacement la plaque dentaire ainsi que les inflammations gingivales. Il s’avère aussi performant qu’un bain de bouche à la chlorhexidine, dont les effets secondaires à moyen terme ne sont pas anodins (dégradation de la flore et des tissus buccaux, altération du goût…). Son pH acide en fait un bon anti-infectieux contre les aphtes et lésions buccales. Il faut le choisir avec un indice MGO supérieur à 400 et l’appliquer en fine couche ou en bain de bouche avant de le recracher chargé des toxines.
En présence de carie, on limite l’infection en attendant son rendez-vous chez le dentiste avec du clou de girofle, souverain dans les infections de la bouche : après le brossage, on verse une goutte d’huile essentielle sur une boulette de coton placée dans la cavité ou au plus près de...
l’infection. Une carie non soignée peut évoluer en « rage de dents ». On consulte en urgence et entre-temps, on calme la douleur à l’aide d’une synergie d’huiles essentielles antalgiques et assainissantes.
Un protocole spécial rage de dents
Une rage de dents, appelée aussi pulpite, survient lorsqu’une carie non soignée continue à se creuser jusqu’à atteindre le nerf. Cette douleur irradie souvent de manière lancinante dans toute la cavité buccale. En attendant une consultation indispensable en cabinet dentaire, vous pouvez utiliser du clou de girofle (lire ci-dessus) ou tester ce protocole antalgique proposé par la chirurgienne-dentiste Catherine Rossi.
- Masser aussi l’extérieur de la zone douloureuse avec du macérat huileux de millepertuis, efficace contre les névralgies.
- Si la douleur persiste, ajouter au mélange précédent 1 goutte d’HE de menthe poivrée et de laurier noble, pour un effet anesthésiant.
- Mettre 3 gouttes d’HE de lavande aspic dans 1 c. à c. d’huile de coco. Garder en bouche en propulsant dans toute la cavité buccale, puis recracher.
Garder de bonnes dents passe aussi par la préservation de l’émail le plus longtemps possible. Outre les caries et le vieillissement, divers facteurs peuvent l’attaquer : reflux gastriques, troubles alimentaires (vomissements), maladies parodontales (lire pages suivantes) ou bruxisme. La dent devient plus poreuse en surface et surexpose la dentine qui se situe sous l’émail. On peut alors souffrir d’hypersensibilité dentinaire avec une réaction douloureuse au contact du chaud ou du froid, d’aliments sucrés, acides ou de l’air. Catherine Rossi dispense quelques conseils : limiter l’acidité, se rincer la bouche au bicarbonate de soude après des reflux gastriques, faire un état des lieux des gencives avec le dentiste. Pour réparer l’émail, outre l’apport en vitamines D3 et K2 déjà évoqué, elle conseille de prendre en homéopathie du Mandragora D4, à raison de 15 gouttes à avaler avec un peu d’eau trois fois par jour, durant dix jours. Des cures de minéraux seront aussi bénéfiques. Tout comme la propolis, qui stimule la formation de dentine réparatrice et réduit sa perméabilité et les douleurs associées.
La salive, agent reminéralisant indispensable, doit également susciter l’attention. Ainsi, une sécheresse buccale (xérostomie) ouvre la porte aux inflammations et infections. Le vieillissement, l’anxiété, des traitements anticancéreux ou certaines maladies comme la polyarthrite en sont souvent à l’origine. Il faut s’hydrater au maximum, boire des infusions de plantes à effet sialogène comme la scabieuse (Knautia arvensis), dont les tanins et principes amers stimulent la salive. On assainit ce terrain propice aux mycoses en mélangeant une cuillerée à café de noix de coco, une pincée de feuilles de papayer et trois gouttes d’huile essentielle de menthe verte (Mentha spicata), anti-inflammatoire et cicatrisante. À garder en bouche durant dix minutes après le brossage selon Catherine Rossi. À l’inverse, on peut souffrir d’une hypersalivation (hypersialorrhée) causée par une flore bactérienne déséquilibrée, un dérèglement des glandes salivaires liée à de fortes émotions, un changement hormonal (grossesse) ou encore des troubles de la déglutition. Boire régulièrement par petites gorgées, limiter les aliments riches en amidon et faire des bains de bouche à l’hydrolat de laurier noble astringent aideront à mieux contrôler ce symptôme handicapant.
La muqueuse buccale peut également être sujette à diverses pathologies. Les aphtes en sont l’une des manifestations très courantes. Ils surviennent de manière ponctuelle ou chronique (stomatite aphteuse) pour différentes causes : génétiques, métaboliques, infectieuses, des carences en vitamines B, des allergies alimentaires ou du stress. On apaise ce petit ulcère grâce à l’application locale de miel de manuka anti-inflammatoire, d’une goutte d’huile essentielle de laurier noble ou avec une décoction de fanes de carottes.
Des fanes de carottes contre les aphtes
Petit ulcère rond, superficiel et douloureux, l’aphte affecte la muqueuse buccale ponctuellement ou de manière chronique (stomatite aphteuse). Afin d’apaiser et d’accélérer la cicatrisation des aphtes, on recourt aux bienfaits d’une décoction de fanes de carottes qui contiennent deux fois plus de vitamines C que les racines.
- Prévoir 1 poignée de fanes de carottes pour 2 verres d’eau.
- Faire bouillir les fanes dans l’eau à couvert 10 minutes, laisser infuser 5 minutes.
- Laisser refroidir et utiliser en bain de bouche et gargarisme, 3 fois par jour.
Et aussi Si la douleur reste vive, on complète avec un cataplasme dosé à 3 volumes de bicarbonate de soude pour 1 volume d’eau, en alternance avec 1 goutte d’HE de laurier noble appliquée sur l’aphte 3 fois par jour.
Dans le cas de la mycose buccale (ou muguet) due au champignon Candida albicans, la muqueuse est rouge vif, douloureuse et recouverte d’un dépôt blanchâtre. Elle apparaît suite à un traitement antibiotique, un déséquilibre de la flore, une baisse de l’immunité… La candidose colonisant souvent l’intestin, elle appelle un traitement global avec notamment de l’extrait de pépin de pamplemousse et de l’huile essentielle de sarriette (voir P&S n° 242). En complément, Catherine Rossi préconise un détartrage « pour éviter la surinfection », complété juste après par l’application sur la muqueuse de deux gouttes d’huile essentielle anti-infectieuse d’arbre à thé (pour les adultes). À alchimiser avec la salive durant deux minutes avant d’avaler.
Les plantes de la bouche
Le clou de girofle
La plupart des principes actifs du giroflier (Syzygium aromaticum) se concentrent dans son bouton floral ou clou. Il possède une teneur exceptionnelle en huile essentielle, riche en phénols anti-infectieux. Ses flavonoïdes et tanins lui confèrent des propriétés anti-inflammatoires, anesthésiantes et antalgiques. Il est donc un remède très prisé dans les infections bucco-dentaires. En cas de maux de dents, mettre 1 à 2 gouttes d’HE sur un coton-tige et l’appliquer sur et autour de la dent infectée. Sinon, croquer directement sur la zone douloureuse 1 à 2 clous de girofle pour en extraire un jus anesthésiant. Cette HE est contre-indiquée avant 6 ans, pour les femmes enceintes et allaitantes et en cas de traitement anticoagulant.-