Jean-Marie Pelt : une pensée toujours vivante
Il y a un an, Jean-Marie Pelt nous quittait. Conférencier toujours pédagogue et conteur passionné, le chroniqueur de l’émission CO2 mon amour, sur France Inter, usait de sa voix chaleureuse comme le ferait un ami venu à la maison nous parler du monde.
Écrivain environnementaliste extrêmement prolifique – plus de soixante ouvrages au compteur –, Jean-Marie Pelt était un expert en écologie et en botanique reconnu, consulté et apprécié pour sa sagesse. Sa plume alerte courait sur le papier autant que l’homme sur les routes de France et d’Europe.
Homme de foi et de fidélité, il savait, tel un passeur, se retirer dans son jardin de Lorraine comme dans son « jardin de l’âme », aussi fleuri et accueillant qu’il l’était lui-même, lieu d’une bienveillance envers tous et en toute occasion.
De l’associativité…
C’est dans L’évolution vue par un botaniste (éd. Fayard, 2011) qu’il a énoncé son fameux « principe d’associativité » : depuis la naissance de l’univers, on voit des éléments simples s’associer pour donner naissance à des ensembles plus complexes doués de propriétés nouvelles. Générant des symbioses, l’associativité est présentée par Pelt comme la condition incontournable de la perpétuation de la vie.
« Peut-on tout expliquer par la théorie de la sélection naturelle ? » Face à la multiplicité et à la diversité des observations auxquelles il procédait, le botaniste devait pousser plus loin et plus haut, et s’interroger sur la logique des mutations qui réorganisent le vivant. C’est cette démarche qui animé la curiosité insatiable de Jean-Marie Pelt toute sa vie. Il a porté ce principe d’associativité depuis les orchidées à la biodiversité et à l’humain. À l’image des végétaux, notre société humaine dépend de notre capacité à créer un vivre ensemble d’associativités, de pluralité, de diversité.
… à l’écologie…
C’est lorsque le regard est décloisonné, l’esprit libre, la compétence non enclavée, que la transversalité peut naître. Ainsi, la pensée de Jean-Marie Pelt en matière d’écologie est plurielle. Si elle part de la protection de la nature, à ses trois niveaux (les variétés, les espèces, les écosystèmes), elle ne se limite pas chez lui à une approche exclusivement environnementale.
Elle englobe par ailleurs une approche écologique de la santé, ainsi qu’une vision humaniste, dans laquelle l’humain est considéré dans toutes ses expressions : physique, psychique, spirituelle et sociétale. En un temps où l’écologie se cherche parfois un visage et une destinée, la contribution de Jean-Marie Pelt, depuis très longtemps, a été avant-gardiste parce qu’holistique. Une invitation à une « humanité réconciliée avec elle-même et avec la nature, en profonde harmonie avec le Cosmos » (lire La raison du plus faible, éd. Fayard, 2009).
… et à la conscience
Jean-Marie Pelt incarnait lui aussi l’« associativité » du scientifique, du penseur engagé, et de l’homme de foi, animé par un sens de l’émerveillement aussi soudain qu’enfantin. Dans Manifeste pour la beauté du monde (témoignage croisé avec sœur Marie Keyrouz, éd. du Cherche Midi, 2015), il nous montrait ainsi la capacité à « relier le sens de notre vie avec le sens de l’Univers », soulignant ainsi l’impérieuse nécessité d’un éveil des consciences. Une invitation à une « transition des consciences » sans laquelle toutes les autres transitions, écologiques, climatiques ou économiques, resteront inachevées.