Une phyto bien vivante
Au sujet des plantes, on entend encore trop souvent cet adage : « Puisque c’est naturel, si ça ne fait pas de bien, ça ne fera pas de mal. » Or vous le savez comme moi, rien n’est plus faux.
Et pourtant, on se laisse parfois aller à la facilité, on choisit une huile essentielle sans vérifier le dosage ou le chémotype, on ne s’interroge pas sur les interactions éventuelles avec d’autres de nos habitudes ou traitements… En agissant ainsi à la légère, peut être aussi parce que sommeille au fond de nous ce lien ancien avec les médicinales qui ne nous incite pas à la méfiance, nous ne mettons pas toutes les chances de notre côté. Le principal risque n’étant pas de nous intoxiquer, mais celui de ne pas nous soigner de façon efficace. C’est dans cette optique que nous vous proposons un dossier visant à poser de façon simple, mais pas simpliste, les principes de base de la phytothérapie. Des fondamentaux que l’on devrait toujours avoir en tête.
Ces règles d’or découlent de notre façon d’appréhender les plantes. Ainsi, il est impossible de faire l’impasse sur la grande richesse, mais aussi la grande complexité du monde des médicinales. Imaginez que nous avons étudié quelque 3 000 espèces, et qu’il en existe 250 000 ! Imaginez que chacune contient facilement une centaine de composants actifs sur notre organisme. Cette richesse se double d’une grande sophistication – beaucoup de chercheurs le reconnaissent : le règne végétal va nous demander encore des années d’étude avant d’en percer tous les mystères.
Cette complexité n’est pas très en phase avec notre époque, majoritairement sensible aux messages simplifiés à outrance, avide d’effets immédiats, à la recherche de vérités définitives et standardisées, voire mondialisées. Paradoxalement, le progrès de nos connaissances se double d’un besoin – parce que cela nous rassure – de schématisation à tout crin, trop souvent réducteur.
La médecine par les plantes est aussi concernée par cette façon de concevoir le progrès. Quand la recherche passe au crible l’activité pharmacognosique des plantes, elle se focalise souvent sur l’action d’une molécule vis-à-vis d’un organe ou d’un symptôme précis. Et renvoie ainsi l’usage de la plante médicinale à celui des médicaments allopathiques. Je n’en disconviens pas, cette approche est utile : par exemple, non seulement le taxol permet de traiter des cancers, mais son hémisynthèse évite de dévaster des forêts entières d’ifs.
Mais cela ne doit pas masquer tout un autre pan de la phytothérapie. Celui que l’on qualifie de phytothérapie traditionnelle, et qui, en utilisant la plante entière, vise un effet physiologique plus global. Car de ce côté-ci aussi nos connaissances progressent à grands pas. Elles nous révèlent des phénomènes inattendus. Ainsi, pour certaines plantes, on a constaté que leur activité thérapeutique ne peut être rattachée à un seul ou même à plusieurs de leurs principes actifs. C’est le cas de ces grandes classiques que sont l’artichaut et la valériane. Régulièrement se dévoilent de nouveaux aspects concernant le pouvoir de guérison des plantes. C’est un enjeu auquel Plantes & Santé attache beaucoup d’importance. Cette dynamique qui anime de l’intérieur la phytothérapie illustre sa capacité de renouvellement et de progrès – la marque d’une discipline bien vivante !