Un héritage pour les temps modernes
Partout où elle s’exerce, la phytothérapie est indissociable de son héritage historique. Dès le livre chinois Pen-Ts’ao, rédigé autour de 2500 av. J.-C., on mentionne 365 drogues végétales, dont une grande partie sont toujours utilisées, comme la gentiane jaune ou l’éphédra. D’autres textes fondateurs résonnent encore dans les pratiques actuelles. Ainsi, dans les Védas (textes sacrés de l’hindouisme) sont citées des épices comme le poivre ou le giroflier. En Occident, c’est l’œuvre du médecin grec Dioscoride, De materia medica (Ier siècle ap. J.-C.), qui demeure une référence. Selon le Dr Éric Lorrain*, " ce texte est le précurseur de toutes les pharmacopées modernes… exerçant une profonde influence sur le développement de la médecine au Proche-Orient ainsi qu’en Europe. "
Ainsi, les plantes occupent toujours une place centrale dans les principales médecines traditionnelles, auxquelles nous consacrons le dossier de ce numéro. D’abord parce qu’au fil des siècles, les pratiques de phytothérapie ont traversé les frontières et se sont enrichies d’échanges entre cultures. Par exemple, l’ashwagandha, plante adaptogène de la médecine ayurvédique, suscite un engouement grandissant en France. Et c’est au contact des pratiques chinoises que nous avons adopté le ginseng, aux bienfaits largement reconnus. Ce phénomène d’échange et de partage reflète l’adaptabilité des plantes aux défis des sociétés modernes.
De plus, les pharmacopées, autrefois construites empiriquement, ont bénéficié des avancées scientifiques. De nombreuses études ont permis de confirmer et de préciser les vertus des plantes, conférant une crédibilité accrue à la médecine par les plantes. Quand bien même le courant dominant était marqué par l’essor de la pharmacie de synthèse.
Cependant, ne perdons pas de vue l’essence même de la phytothérapie. Si la science moderne permet de valider certaines propriétés des plantes, il est essentiel de ne pas réduire ces trésors de la nature à une simple extraction de molécules isolées. Le totum de la plante, c’est-à-dire son ensemble complexe et synergique, est la clé de son efficacité, gage d’une véritable approche holistique. C’est ainsi que respectueuse des subtilités de la plante et fidèle à ses racines, la phytothérapie doit aller de l’avant. Ancrées dans une tradition qui a toujours su évoluer, les plantes médicinales pourront ainsi continuer à enrichir notre rapport à la santé.
*Grand manuel de phytothérapie du Dr Éric Lorrain (éd. Dunod).