Dossier
Maladies auto-immunes, mieux les dompter (2/4)
La polyarthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques, la maladie de Crohn ont la même origine : un dysfonctionnement du système immunitaire qui signe leur appartenance à la catégorie des maladies auto-immunes. Des maladies difficiles pour lesquelles la phytothérapie et la nutrition peuvent contribuer à stabiliser l’évolution. Pour vous en convaincre, trois médecins vous donnent leurs conseils.
Adoucir les symptômes de la sclérose en plaques
Touchant près de 100 000 personnes en France, la sclérose en plaques (SEP), est une maladie inflammatoire chronique du système nerveux central qui affecte surtout l'adulte jeune, avec une prédominance féminine.
Dans la sclérose en plaques, le système immunitaire s’attaque à la gaine de myéline qui entoure les fibres nerveuses appelées axones, dont le rôle est la transmission des informations. Dans la SEP, la myéline est détruite. Parallèlement, il existe une atteinte des neurones et de leurs axones. La transmission des informations ne se fait plus correctement. Selon la localisation des lésions et du type de fibres atteintes (moelle épinière, cerveau, nerf optique, fibres sensitives et motrices), la symptomatologie est variable : diminution de la sensibilité, fourmillement, engourdissement, trouble de la marche, de l’équilibre, voire baisse de l’acuité visuelle, si le nerf optique est atteint. C’est d’ailleurs souvent le mode de découverte de la maladie. La SEP évolue le plus souvent par poussées (moment où les symptômes apparaissent, s’aggravent), entrecoupées de périodes de rémission.
La vitamine D impliquée dans la sclérose en plaques ?
Les scientifiques s’intéressent au rôle de certains nutriments comme facteurs de risque de la maladie et de ses poussées. C’est le cas de la carence en vitamine D. Une revue de la littérature publiée dans le Journal of American Medical Association Neurology en 2018 rapporte que la supplémentation en vitamine D peut jouer un rôle dans le déclenchement et l’évolution de la maladie. Une étude est d’ailleurs en cours (résultats prévus en 2022) qui évalue si la prise de vitamine D administrée en présence des premiers symptômes évocateurs mais avant que la maladie ne soit confirmée, peut réduire les risques de conversion. La carence étant très fréquente, il est important de vérifier votre taux de vitamine D et de vous supplémenter au besoin.
Pour cette maladie chronique, les traitements de fond (immunosuppresseurs et immunomodulateurs) sont souvent incontournables. Mais on peut la mettre en sourdine en s’appuyant sur deux piliers efficaces et indispensables pour améliorer sa qualité de vie et limiter son évolution. Une alimentation saine à visée anti-inflammatoire, riche en vitamine D et pauvre en sodium qui semble favoriser les poussées et le recours à des plantes rééquilibrantes du système immunitaire et anti-inflammatoires. La phyto peut aussi améliorer d’autres aspects de la maladie comme la fatigue ou les douleurs.
Nutrition
Gare aux faux amis !
- Les oméga-3 sont souvent cités pour leur effet anti-inflammatoire. S’ils ne volent pas leur réputation, il faut faire attention à leur provenance. Souvent issus des poissons gras, ces derniers sont malheureusement de plus en plus contaminés par les métaux lourds. Au quotidien préférez les oméga-3 d’origine végétale (graines de chia, lin, pourpier) et une fois par semaine...
- , consommez des petits poissons (sardines, anchois) moins contaminés que les gros du fait de leur place au début de la chaîne alimentaire.
- Pour tenir le coup et lutter contre la fatigue on peut avoir tendance à abuser de la caféine. Or la caféine, aussi appelée théine dans le thé ne fera que provoquer des pics d’excitation générant une plus grande fatigue. Tournez-vous plutôt vers le rooibos qui n’en contient pas. Cette plante originaire d’Afrique du Sud, est en revanche riche en polyphénols et en vitamine C qui aident à lutter contre l’épuisement. Pour un effet accru, optez pour la version non fermentée – le rooibos vert – qui en renferme encore plus et offre une saveur légèrement acidulée.
Le choix doit se porter d’abord sur les huiles essentielles (HE) cortison-like, c’est-à-dire celles qui soutiennent l’activité des glandes surrénales en mimant l’effet des corticostéroïdes naturellement synthétisés. L’HE de ciste ladanifère (Cistus ladaniferus) a des propriétés anti-inflammatoires reconnues grâce à une grande quantité de terpènes cortison-like, l’alpha-pinène. Elle est aussi un bon anti-infectieux, un atout lorsque le système immunitaire est déprimé par les traitements : les infections opportunistes sont ainsi mieux prévenues. On lui associe volontiers l’HE de géranium rosat (Pelargonium graveolens), sa teneur en monoterpénols lui donne des propriétés immunomodulantes intéressantes. Appliquez ces deux HE en synergie matin et soir sur le plexus solaire et sur le bas du dos (diluée à 50 % dans une huile végétale) en cure de trois semaines avec une pause de deux semaines. D’autres huiles essentielles peuvent être sollicitées contre les douleurs présentes lors d’une SEP.
Calmer les douleurs chroniques
Avec deux huiles essentielles, il est possible de prendre en charge les différents types de douleurs chroniques. Associez volontiers l’huile essentielle de lavande officinale (Lavandula officinalis) à celle d’estragon (Artemisia dracunculus). La première renferme une belle quantité de linalol et d’acétate de linalyle lui conférant ses vertus antalgiques, anti-inflammatoires, calmantes et anxiolytiques. Le méthylchavicol de la seconde agira plutôt sur les douleurs neuromusculaires, les spasmes, les contractures.
À faire Diluez 5 ml de chaque huile essentielle dans 10 ml de macérat huileux de millepertuis. Massez en regard des zones douloureuses trois fois par jour.
En cas de poussée, ce sont les corticoïdes à forte dose qui sont utilisés du fait de leur puissance anti-inflammatoire : il faut « frapper vite et fort », pour éviter les dommages sur la myéline et les axones, sources de séquelles. Toutefois, l’HE d’épinette noire (Picea mariana), ajoutera ses bienfaits car ses effets cortison-like sont parmi les plus puissants grâce à sa teneur en esters monoterpéniques. Elle est aussi tonique et stimulante, ce qui en fait une alliée pour lutter contre la fatigue très présente lors d’une poussée. Diluez-la à 20 % dans une huile végétale et appliquez-la quatre fois par jour sur le bas du dos pendant cinq jours. Pour consolider l’action de l’épinette noire, optez pour la boswellie. Bien que confidentiel dans la pharmacopée occidentale, ce remède de la médecine ayurvédique a des effets anti-inflammatoires et immunomodulateurs qui ont été confirmés par des études. Ses acides boswelliques inhibent la synthèse de médiateurs de l’inflammation (leucotriènes, cytokines) et modulent le fonctionnement de certains lymphocytes. Prenez deux gélules de 200 milligrammes titrées à 70 % d’acides boswelliques matin et midi pendant un mois, puis en cure de deux semaines par mois. En complément, reprenez les HE de ciste ladanifère et de géranium en approche de fond. La poussée étant passée, il faudra veiller à l’équilibre du système immunitaire pour éviter qu’une nouvelle poussée ne survienne.
Médecine traditionnelle chinoise
Soulagement au bout des doigts
En médecine traditionnelle chinoise, l’origine de la maladie correspond à une diminution du qi (énergie vitale) faisant le lit de l’insuffisance yin du rein et du foie. Avec cette approche, les patients rapportent une amélioration des douleurs, de la fatigue, de la spasticité. L’acupression, qui permet de stimuler des points d’acupuncture avec ses doigts, en fait partie. Voici deux points Shu du dos situés sur le méridien de la vessie qui sont intéressants. Pour un geste plus précis, n’hésitez pas à solliciter une aide, ces points se situant dans le dos.
À faire Le point Gan Shu 18V régule la circulation du qi du foie et le point Shen Shu 23V tonifie le yin du rein. L’appui est maintenu trois minutes, puis relâché, puis repris et associé à de petits mouvements circulaires pendant trois minutes. Renforcez l’effet en utilisant l’huile essentielle de Nard de l’Himalaya, (Nardostachys jatamansi), anti-inflammatoire, mais aussi équilibrante sur le plan émotionnel, elle favorise la libre circulation de l’énergie.
Apaiser les pics de douleurs
En cas d’accès douloureux, de recrudescence des douleurs, il est utile de compléter les applications locales d’HE par une prise orale de plantes antalgiques et anti-inflammatoires puissantes. L’écorce de saule blanc (Salix alba) est un excellent choix car elle contient des dérivés salicylés (comme la salicine) qui se transforment en acide salicylique, une substance anti-inflammatoire et antalgique cousine de l’aspirine.
À faire Soit vous optez pour l’extrait fluide de plantes fraîches standardisées (EPS de saule blanc), très riche en principes actifs, une cuillère à café deux fois par jour. Soit vous choisissez la teinture mère, à raison de 20 gouttes deux à trois fois par jour.
Cure thermale
Eaux bienfaitrices
Les thermes de Lamalou-les-Bains situées dans l’Hérault sont spécialisés dans la prise en charge des patients atteints de maladies neurologiques. La composition spécifique de ses eaux a une action régulatrice sur le système nerveux à laquelle s’associent des vertus toniques et antalgiques. Le programme spécial SEP complète donc la cure thermale classique par des séances de sophrologie, qi gong, ergothérapie, musicothérapie et de l’activité physique. Plusieurs patients ayant eu l’occasion d’en bénéficier rapportent une diminution des douleurs, de la consommation de médicaments antalgiques et hypnotiques et de la fatigue.