Dossier
Une sexualité plus épanouie (3/5)
Et si on essayait de renouveler l'alchimie de notre désir ? Prenons le temps de découvrir pourquoi il peut fluctuer et de remédier aux freins psychologiques et physiques qui nous bloquent parfois. Médecins, sexologues, phytothérapeutes nous transmettent ici des clés pour mettre notre sexualité au diapason de nos aspirations, tout en prenant soin de soi et de la relation à l'autre…
Prendre soin de son intimité
Une femme sur dix déclare souffrir pendant les rapports sexuels. C’est le résultat d’une vaste enquête britannique menée auprès de 7 000 femmes par l’institut Bjog. La gynécologue phytothérapeute Bérengère Arnal entend souvent ses patientes lui confier leurs douleurs, qu’elles soient externes (vulve qui brûle, sécheresse irritante…) ou internes (dyspareunies) qui les empêchent d’avoir du plaisir. « Lorsque la muqueuse vaginale souffre pendant la pénétration, la réaction instinctive est de se crisper et de contracter le périnée… et le rapport se fait alors en force. » Dans les cas extrêmes, on parle de vaginisme : une peur panique de la pénétration. L’endométriose peut générer de fortes dyspareunies pendant l’acte. Heureusement, la plupart des gênes ressenties lors des rapports sont « assez superficielles », selon Bérengère Arnal. Pour autant, il ne faut pas négliger leurs causes physiologiques : infection vulvo-vaginale, sécheresse liée aux déséquilibres hormonaux ou simplement conséquences d’une toilette intime inadaptée. Ainsi, pas de toilette interne de la vulve, mais uniquement externe, matin et soir et entre deux rapports avec une huile lavante ou un gel doux aux hydrolats de camomille, sauge et rose. À savoir aussi, faire pipi juste après l’acte sexuel et boire est salutaire pour éviter les cystites.
Le microbiote vaginal est délicat et la sécheresse de ces tissus peut vite se manifester quand on est en pleine ménopause (à cause du manque d’œstrogènes) ou quand on prend un contraceptif œstro-progestatif. Dans son livre Pilule ou pas pilule ?, Bérengère Arnal précise : « Les hormones contraceptives perturbent l’excitation sexuelle, avec une vascularisation moindre du clitoris et des rapports plus douloureux ». Pour pallier cette sécheresse, privilégiez un lubrifiant naturel et nourrissez régulièrement la muqueuse.
Préparer soi-même un lubrifiant
Pas évident de trouver dans le commerce un lubrifiant intime dépourvu d’allergènes, de silicones et de perturbateurs endocriniens. L’expert en slow cosmétique Julien Kaibeck nous propose cette recette de gel compatible avec les préservatifs :
Ingrédients : 4 c. à soupe de gel d’aloe vera bio • 4 c. à soupe d’eau minérale • 1 c. à soupe d’hydrolat sans conservateur de fleur d’oranger, citron ou bleuet • 1/10e de c. à soupe de gomme xanthane • 1 c. à soupe de glycérine végétale • 6 gouttes de Cosgard.
Méthode : Désinfecter tous les ustensiles à l’alcool à 70°. Verser dans un bol tous les ingrédients dans l’ordre, fouetter pour obtenir un gel liquide et le...
transvaser dans un flacon. Le gel se conserve 3 mois à l’abri de la lumière et de la chaleur.
Bon à savoir : Les huiles de coco et d’amande douce, très utiles en cas de sécheresse vaginale, ne sont pas compatibles avec les préservatifs.
Par ailleurs, la vaginose, infection très courante, survient lorsque le microbiote est envahi par la bactérie gardnerella au détriment des lactobacilles. Elle peut se manifester par des pertes blanches ou grises, une forte odeur de fruits de mer et d’éventuelles rougeurs. Lors d’une relation sexuelle, le partenaire masculin peut lui aussi être contaminé et développer une urétrite ou une prostatite. Concernant les si fréquentes mycoses vaginales (d’origine intestinale), l’attaque de la flore provient du champignon Candida albicans. Elles provoquent des brûlures internes et externes de la vulve, des démangeaisons et pertes blanches. Moins touchés, les hommes peuvent tout de même être porteurs du candida ou avoir été contaminés, ce qui va se traduire par une inflammation et une démangeaison du gland et du prépuce. Pour soulager les démangeaisons de la vulve ou du gland, l’aromatologue Aude Maillard propose une combinaison d’huiles essentielles de lavande fine et tea tree (15 gouttes de chaque dans un flacon de 15 ml, à compléter avec de l’huile végétale de noyau d’abricot). On sèche bien les muqueuses avant de l’appliquer, jusqu’à six fois par jour durant dix jours. Bérengère Arnal prescrit en premier lieu des ovules antimycosiques, « indispensables pour désenflammer » (ou un gel antimycosique pour les hommes) et des antibiotiques pour traiter la vaginose chez les deux partenaires. Ensuite, on rééquilibre la flore avec des ovules de probiotiques et d’acide hyaluronique en alternance (quatre par semaine).
Nourrir sa muqueuse vaginale
Le microbiote vaginal est équilibré (soit un pH en dessous de 4,5) s’il est composé à 95 % de bactéries lactobacilles, et correctement lubrifié lorsqu’il est bien imprégné d’œstrogènes. En cas de sécheresse vaginale, voici le protocole proposé par la gynécologue Bérangère Arnal.
À faire :
- Prendre par voie orale de l’huile bio d’onagre ou de bourrache.
- Appliquer matin et soir dans le vagin de l’huile bio de noyau d’abricot.
- Deux fois par semaine, mettre des ovules de probiotiques (Lactobacillus casei rhamnosus Döderleini), en alternance avec des ovules d’acide hyaluronique pour nourir et hydrater les muqueuses. À faire 1 mois et à renouveler si nécessaire.
L’herpès génital, avec ses grappes de cloques sur les parties génitales, est très contagieux. Pour réduire les poussées virales, la naturopathe Anaïs Gomez préconise de la lysine à raison d’1 g par jour pendant trois semaines, que l’on pourra renouveler deux fois après une semaine d’arrêt. Attention, ce traitement est déconseillé en cas de maladie du foie ou des reins. En complément, une synergie d’huiles essentielles (HE) pourra être appliquée sur les lésions jusqu’à cinq fois par jour : mélanger 10 gouttes d’HE de niaouli et 10 gouttes d’HE de lavandin dans 30 g de crème neutre de l’hygiène intime.
Chez l’homme, l’âge ou certains médicaments peuvent être à l’origine de pannes érectiles ou d’éjaculations précoces. Mais le psychisme joue un rôle non négligeable, explique le médecin phytothérapeute Jacques Labescat : « Il existe souvent un élément déclencheur, un rapport sexuel qui s’est mal passé ou trop de pression durant un acte en particulier. Ça peut devenir une hantise et perturber ensuite l’érection ». Outre un soutien psychologique parfois nécessaire, ce praticien conseille à ses patients des plantes aphrodisiaques aux propriétés vasodilatatrices qui vont agir en profondeur, contrairement aux pilules miracles. On pourra prendre en teinture-mère 30 gouttes de Tribulus terrestris trois fois par jour ou 50 gouttes de gingembre matin et soir. La maca, en gélule, pourra également être conseillée. Chacune a besoin de temps pour agir, d’où l’idée d’effectuer des cures de deux à trois semaines, d’être attentif aux changements qu’elles occasionnent avant de renouveler, si besoin. Un anneau pénien en silicone (et pas en métal) aide aussi à ne pas aboutir trop tôt en concentrant l’afflux de sang à la base. On diminue également la pression avec des exercices d’autohypnose, de cohérence cardiaque et en mettant un préservatif. Ne l’oublions pas, se protéger reste la meilleure façon de limiter les infections sans bouder son plaisir.
Le tribulus titille le désir
L’effet du Tribulus terrestris ou croix-de-Malte sur le désir masculin a fait l’objet de nombreuses études cliniques. En 2017, 180 messieurs âgés de 18 à 65 ans ont suivi un traitement de trois mois. Et 85 % de ceux qui souffraient d’une libido basse ont constaté une amélioration. Chez les femmes aussi, cette plante s’avère intéressante. Des chercheurs brésiliens ont constaté un net progrès de la lubrification, du confort et des sensations pendant l’acte sexuel chez 30 femmes ménopausées traitées avec 750 mg de tribulus par jour pendant trois mois. Attention, cette plante est photosensibilisante et contre-indiquée en cas de problème hépatique.
Botanique érotique : un clitoris en fleur
Clitoria ternatea, aussi appelée pois bleu ou encore pois papillon, est une plante grimpante originaire d’Asie tropicale et équatoriale. C’est Carl von Linné, le père de la taxonomie, qui en a choisi le nom. La forme de sa fleur nous renseigne : elle ressemble en effet au clitoris de la femme. Utilisée depuis des siècles en médecine ayurvédique pour ses propriétés antioxydantes, la fleur est depuis peu devenue à la mode dans les tisanes et les cocktails pour son action antistress et décontractante, mais aussi pour ses pigments (anthocyanes) qui, dispersés dans un liquide, lui donnent une jolie teinte bleue.