Apporter de la sérénité aux autistes avec les huiles essentielles
À l'hôpital Dufresne-Sommeiller, en Haute-Savoie, la médecin gériatre Maria Zimmer développe un protocole aromatique à destination des patients atteints de trouble autistique. Rituels respiratoires quotidiens, massages en situation de crise… Une seule fragrance peut être synonyme de relaxation.
Zn 2013, alors qu’elle travaille à l’hôpital de Saint-Julien-en-Genevois (74), la gériatre Maria Zimmer découvre les massages aromatiques relaxants. Forte de cette expérience, elle propose le recours aux huiles essentielles (HE) dès qu’elle intègre en 2020 l’unité de soins palliatifs de l’hôpital haut-savoyard Dufresne-Sommeiller. « Il y avait un “vide olfactif” dans le service, mais j’ai senti que l’équipe était intéressée et la direction ouverte à l’usage des huiles essentielles », se souvient-elle.
Une équipe pluridisciplinaire
Avec l’aide de la responsable des soignants et le soutien de la direction, elle constitue une équipe de volontaires pluridisciplinaire (kiné, psychomotricienne, socio-esthéticienne, aide-soignante, infirmières, cadre, médecin). Formée par la pharmacienne experte Céline Hilpipre, l’équipe se focalise dans un premier temps sur la mise en place d’un protocole basé sur la diffusion et les massages pour les patients en soins palliatifs.
Deux ans plus tard, ce sont les soignants de l’établissement d’accueil médicalisé pour patients handicapés (spectre de l’autisme, handicaps moteurs, polyhandicap, etc.) qui souhaitent bénéficier de cette thérapie complémentaire. Et plus particulièrement pour les patients autistes qui séjournent au long cours dans l’établissement. La plupart, fragiles émotionnellement, sont sujets à l’anxiété. « L’idée est de développer un protocole aromatique ritualisé permettant potentiellement d’éviter les psychotropes en cas d’angoisse », expose la médecin. Testé sur deux patients autistes particulièrement anxieux en début d’après-midi et le soir, le protocole consiste à les inviter à s’installer dans un fauteuil de leur chambre au moment où l’angoisse monte. « Là, le soignant diffuse de l’HE de petit grain bigarade anxiolytique, puis discute avec lui pour favoriser un retour au calme. » L’efficacité est notable. « Le patient est conditionné, il associe ce soin aromatique à une sensation de relaxation », explique la gériatre.
Chez les patients autistes dont l’anxiété se manifeste de façon irrégulière, les soignants proposent plutôt un massage des mains à l’HE de camomille noble, diluée à 2 %, tout en regardant le patient dans les yeux. « Ce soin apaisant est prescrit pour remédier aux situations de crise d’angoisse », précise Maria Zimmer. Tracés par écrit, car les équipes alternent deux à trois fois par jour, les protocoles sont pratiqués par les soignants volontaires. Car si la plupart souhaitent intégrer les HE comme outil de soins, certains sont plus réservés, voire incommodés par les odeurs. Une expérience qui rime avec tolérance donc, et qui porte ses fruits. « Même si on n’a pas diminué les traitements psychotropes, l’aromathérapie évite de miser uniquement sur des interdoses de médicaments en cas de crise, et valorise la présence du soignant. Ça motive ! », se réjouit Maria Zimmer. Des petits pas aromatiques dont les équipes peuvent déjà se féliciter !
Des précautions spécifiques
Chez les patients autistes particulièrement sensibles aux odeurs, la précaution d’emploi la plus importante est d’éviter toute surstimulation olfactive. « On utilise une seule HE à la fois, et peu dosée », à la différence des autres services hospitaliers où, pour éviter la lassitude, les HE utilisées changent régulièrement. Par ailleurs, les soignants doivent veiller à ne pas déclencher de crises d’épilepsie, pathologie à laquelle la majorité des résidents sont exposés. « On interdit toute HE contenant du camphre ou autres cétones (huiles terpéniques issues des conifères, eucalyptus, lavandin et lavande aspic, romarin, menthe) qui peuvent déclencher ces crises », conclut Maria Zimmer.