Dossier
La grande modernité des médecines traditionnelles (1/4)
L'aspiration à une prise en charge personnalisée et holistique engendre en France un retour en grâce des médecines traditionnelles. Venues de Chine, d'Inde ou d'Europe, elles sont aussi plébiscitées par la science, en quête de nouvelles solutions thérapeutiques. Voyons avec nos experts en quoi ces savoirs ancestraux offrent une approche pertinente de nos problématiques de santé.
La grande modernité des médecines traditionnelles
L'aspiration à une prise en charge personnalisée et holistique engendre en France un retour en grâce des médecines traditionnelles. Venues de Chine, d'Inde ou d'Europe, elles sont aussi plébiscitées par la science, en quête de nouvelles solutions thérapeutiques. Voyons avec nos experts en quoi ces savoirs ancestraux offrent une approche pertinente de nos problématiques de santé.
L’engouement pour les médecines traditionnelles se confirme au fil des ans et des sondages en France. Au point d’être reconnu comme un véritable mouvement de société. L’enquête d’opinion menée en 2023 par Odoxa indique que 48 % des Français ont recours à la médecine traditionnelle et 45 % aux plantes, jugées « aussi efficaces » que l’allopathie. Tandis que 89 % des sondés affirment s’être déjà soignés avec des thérapies alternatives, notamment des huiles essentielles (37 %) et de l’acupuncture (21 %). Leurs motivations ? Le soulagement des douleurs chroniques, les remèdes naturels et les solutions non invasives. D’autant plus que la médecine classique offre peu de solutions sans effets indésirables face à des maux courants tels que l’insomnie, les rhumatismes, les migraines ou des syndromes complexes comme le Covid long, l’intestin irritable ou la fibromyalgie.
Pour Jean-Michel Morel, médecin généraliste expert en phytoaromathérapie, « les médecines traditionnelles sont particulièrement pertinentes pour traiter des pathologies fonctionnelles qui nécessitent d’individualiser la prise en charge et d’aborder le patient de manière globale au-delà des symptômes ». La médecine traditionnelle chinoise, l’ayurvéda, ainsi que des disciplines européennes comme la naturopathie et la phytoaromathérapie – descendantes des préceptes hippocratiques et des savoirs arabo-persans – sont justement fondés sur une vision holistique de la santé. Elles prônent un lien thérapeutique voire énergétique entre l’homme et la nature, y compris dans les remèdes préconisés (plantes, acupuncture, yoga…), et elles accompagnent l’humain dans un axe corps, âme et esprit. En cela, elles répondent « à une demande sociétale croissante de soins plus compatissants et plus personnalisés », soulignait l’OMS en 2023 lors de son premier congrès mondial consacré à la médecine traditionnelle.
De son côté, la médecine scientifique « basée sur les preuves » s’ouvre de plus en plus à ce potentiel thérapeutique en conduisant nombre d’études sur les propriétés des plantes de diverses pharmacopées ou sur l’intérêt de l’acupuncture dans diverses maladies (rhumatismes, cancers, diabète…). Ces approches constituent aussi des solutions précieuses en cas de pathologies lourdes, et génèrent moins d’effets secondaires que les médicaments. De plus en plus de médecins et professionnels de santé se forment en France à ces disciplines complémentaires, enseignées dans plusieurs universités avec l’ambition de mieux faire cohabiter médecine conventionnelle et médecine ancestrale. Face aux défis de santé actuels, celles-ci ont beaucoup à nous apporter.
Se former à l’ethnomédecine
Comment donner de la valeur aux savoirs médicinaux traditionnels et les concilier avec la biomédecine ? C’est tout l’enjeu des deux diplômes universitaires d’ethnomédecine proposés à La Réunion, depuis 2012, et à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), depuis 2020. Au programme de ce cursus de deux ans (240 heures de cours) destiné aux professionnels de santé et aux étudiants en biologie et anthropologie : l’étude des systèmes thérapeutiques traditionnels en Guyane et à La Réunion, le statut du tradipraticien, la recherche ethnobotanique et la transmission des savoirs, la connaissance de la pharmacopée avec un séjour sur le terrain animé par l’expert et paysan herboriste Thierry Thévenin, et même la réalisation d’un herbier.